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Enquête Surfrider sur les media filtrants

L’invasion des media filtrants : des stations d’épuration à l’origine de cette nouvelle pollution majeure des eaux

Depuis quelques temps, les visiteurs des plages d’Atlantique et de la Manche constatent la présence par milliers de rondelles en plastique ayant la forme des camemberts d’un jeu bien connu. Elles ont été également identifiées dans certains cours d’eau comme la Seine. Mais aussi en Espagne sur les plages de Cantabrie. La source de cette pollution est longtemps demeurée une énigme, mais l’association Surfrider a enfin identifié l’origine. Ces rondelles de plastique proviennent de certaines stations d’épuration municipales ou industrielles : il s’agit de supports destinés à favoriser le développement des bactéries qui assurent la dernière étape du traitement des eaux (cela augmente le rendement de la dépollution). Lorsque des débordements se produisent, elles partent par milliers au fil des fleuves et finissent par aboutir dans la mer. Leur nom ? Les media flitrants.

Enquête Surfrider sur les media filtrants

Face à cette pollution à l’impact grandissant, l’association Surfrider Foundation s’est lancée dans une enquête minutieuse mais pas encore finalisée. Petit état des lieux de cette enquête avec François Verdet, responsable de l’antenne 64 de Surfrider, en charge du dossier « médias filtrants ». Il répond aux questions d’Elodie Melenec. Surfrider Foundation : Depuis quand Surfrider Foundation a eu connaissance de la pollution ? François Verdet : Installé sur la Côte Basque depuis juillet 2007, j’ai l’impression d’avoir vu ces bouts de plastique sur les plages depuis mon arrivée dans la région. Mais en novembre 2009, les quantités ont décuplé et l’antenne Côte Basque de Surfrider a pris la décision de lancer une enquête. Au début, ce fut bien difficile puisque personne ne s’était jusqu’alors intéressé à ce type de pollution. Nous avons entendu dire qu’il s’agissait de matériau de calage pour de gros objets transportés sur des navires ou des résidus broyés et évacués par des sous-marins en patrouille sous la mer ! Finalement, la réponse est venue de Corse. L’antenne locale de Surfrider, invité par la ville d’Ajaccio pour la présentation du projet d’une nouvelle station d’épuration, a reconnu ces pièces de plastique sur la couverture d’un document imprimé. On a pu enfin mettre un nom et une fonction sur ces mystérieux objets retrouvés par milliers sur les plages de la façade atlantique.
Photo : © naturalsurfing.com
Photo : © naturalsurfing.com
Surfrider Foundation : Pouvez-vous nous expliquer à quoi servent les média filtrants et comment ils se retrouvent sur les plages ? François Verdet : Ces « médias filtrants » ou « biomédias » (“bio carriers” en anglais et “biosoportes” en espagnol) sont en fait des supports pour des micro-organismes introduits dans certaines stations d’épuration municipales ou industrielles. C’est très simple : généralement, les eaux usées collectées passent d’abord à travers des grilles aux mailles de plus en plus fines pour retenir la matière en suspension. Elles sont soumises ensuite à des traitements chimiques ou UV et enfin à un traitement biologique pour éliminer les micro-résidus. Dans cette dernière phase, ce sont des bactéries qui dégradent les déchets. Et des chercheurs se sont aperçus qu’elles étaient plus efficaces si elles pouvaient se fixer sur un support. C’est pourquoi, depuis le début des années 2000, un nombre de plus en plus important de stations d’épuration aussi bien municipales qu’industrielles remplissent leurs bassins biologiques de millions de roulettes plastique sur lesquelles vont se fixer les bactéries. Malheureusement, certains bassins contenant les biomédias débordent et les supports plastique se retrouvent dans les cours d’eau, puis dans les mers et océans. Pour prendre quelques exemples, nous avons répertorié des cas de pollution à Paris sur la Seine, au Pays Basque sur la rivière Oria, au Portugal sur le rio Minho. Et ce sont à chaque fois des centaines de milliers voire des millions de médias filtrants qui viennent polluer le milieu naturel.
Des milliers de médias filtrants ont été repéré sur la Seine
Des milliers de médias filtrants ont été repéré sur la Seine
Surfrider Foundation : Quelles sont vos revendications et vos objectifs dans ce dossier ? Que mettez vous en œuvre pour faire avancer cette enquête ? François Verdet : Notre objectif est bien évidemment de faire cesser cette pollution d’un genre nouveau. C’est tellement paradoxal de polluer l’eau en voulant la nettoyer ! Aujourd’hui, une demi-douzaine de personnes travaille sur le dossier chez Surfrider selon plusieurs axes : 1) Des enquêtes de terrain pour accumuler le plus d’informations et de témoignages possible dans les cas de pollution avérés dans le but de porter plainte contre les responsables. 2) La médiatisation du problème pour pouvoir être averti le plus rapidement possible en cas de nouvelle pollution, pour sensibiliser les responsables politiques et les inciter à demander les meilleures garanties aux installateurs de stations d’épurations communales. Pression également sur les grandes entreprises qui distribuent et conseillent ce procédé à leurs clients. Le but est de les inciter à améliorer le process. Plus généralement, nous mettons une forte énergie à la réalisation de ce dossier « médias filtrants » parce qu’il nous semble emblématique d’un des combats phare de l’association : la lutte contre les déchets aquatiques. Si l’idée d’accrocher des bactéries sur des supports est bonne (on parle d’un gain d’efficacité de 30%), elle n’est pas nouvelle. Depuis longtemps, certaines stations d’épuration utilisent de la pierre volcanique comme support de micro-organismes. Et il n’est pas bien grave de voir ce matériau s’échapper dans les cours d’eau et les océans. Malheureusement, pour des raisons de coût et de facilité de production, on a choisi de remplacer une pierre naturelle par des bouts de plastique qui ne seront jamais biodégradable et viendront polluer un peu plus le milieu aquatique. Surfrider Foundation : Où en êtes-vous aujourd’hui ? Le dossier a-t-il bien avancé ? François Verdet : Pour la partie médiatisation, information et lobbying, nous avons contacté l’ensemble des départements français et l’association des élus du littoral, tout comme le Ministère de l’environnement et nombre d’associations naturalistes et de sports nautiques. Nous portons ces jours-ci le dossier à Bruxelles et nous préparons une compagne de sensibilisation en Espagne. Les 45 antennes de Surfrider en Europe sont en alerte pour réagir au plus vite en cas d’apparition d’une nouvelle pollution. L’antenne Picarde vient d’ailleurs d’en rencontrer récemment. Nous poursuivons par ailleurs notre enquête sur le cas le plus inquiétant qui touche le littoral atlantique de la Cantabrie (Espagne) à la Vendée (France). Nous avons reçu plus de 50 témoignages à ce sujet. Et malheureusement, de nombreux indices laissent à penser que les fuites sont le fait d’une ou deux entreprises situées le long d’un cours d’eau au nord de l’Espagne à proximité de la frontière avec la France. Si nous avons la quasi certitude d’avoir identifié les responsables et les dates des accidents, nous cherchons maintenant à connaître les quantités déversées. Qui pourraient malheureusement atteindre des millions voire dizaines de millions de pièces !

Pour tout savoir sur les media filtrants et agir

Pour tout savoir sur les media filtrants
Pour tout savoir sur les media filtrants
La pollution des plages par des milliers de rondelles de plastique (appelées aussi médias filtrants, biomédias ou camemberts plastique) est de plus en plus repérée par les pratiquants du littoral et les vacanciers. Les témoignages sont fréquents… et les questions nombreuses. Pour expliquer simplement le phénomène, Surfrider Foundation a réalisé une notice (au format A3) que vous pouvez télécharger et diffuser en cliquant ici. Vous pouvez également écouter en cliquant ici la chronique de Sylvie Barrans sur France Bleue Pays Basque. L’essentiel est dit en deux minutes. Enfin, retrouvez tous les articles publiés sur le sujet en cliquant ici. C’est à vous d’agir en identifiant et quantifiant les pollutions constatées près de chez vous Où que vous habitiez, si vous fréquentez les plages,
Si vous en trouvez, remplissez la fiche de quantification
Si vous en trouvez, remplissez la fiche de quantification
lacs et rivières de votre région dans les jours à venir, n’hésitez-pas à baisser les yeux pour voir si vous n’en trouvez pas. Elles se trouvent généralement au milieu des rebuts flottants échoués sur les berges, coincés dans les rochers ou dans la végétation. Sur la plage, elles sont mêlées à la laisse de mer. Si vous en trouvez, remplissez la fiche de quantification de l’association Surfrider Foundation en cliquant ici (un simple mail à l’attention de François Verdet avec le résultat de vos investigations – description, quantité et photo à l’appui – fera aussi bien l’affaire d’ailleurs !). D’avance merci. Surfrider Foundation cherche également à entrer en contact (anonymat respecté à la demande) avec des personnes qui travaillent dans des stations d’épuration qui utilisent le procédé en France et en Espagne (Pays Basque et Galice notamment).
Les modèles observés varient avec le temps : - il y a deux ans, on ne voyait que des “camemberts” à 6 parts (3), - cet hiver, sont apparus d’abord sur la Côte Basque Sud (San Sebastian…) les petits modèles noirs (1), puis on les a vu ici du côté de Biarritz, d’abord de manière anecdotique et maintenant dans des proportions importantes (40 % environ). - Les “médias filtrants” blanc, de grand format (4) sur la photo , modèle K3 d’AnoxKaldnes (société appartenant maintenant à Véolia) sont toujours rares. - Par contre ceux à 4 parts (2), longtemps absents des plages locales, commencent à faire leur apparition. Il s’agit des modèles distribués par les grandes sociétés françaises de traitement des eaux et repérés dans les pollutions de la Seine et du Miño. Ils sont référencés type K1 chez AnoxKaldnes par exemple.
Les modèles observés varient avec le temps : – il y a deux ans, on ne voyait que des “camemberts” à 6 parts (3), – cet hiver, sont apparus d’abord sur la Côte Basque Sud (San Sebastian…) les petits modèles noirs (1), puis on les a vu ici du côté de Biarritz, d’abord de manière anecdotique et maintenant dans des proportions importantes (40 % environ). – Les “médias filtrants” blanc, de grand format (4) sur la photo , modèle K3 d’AnoxKaldnes (société appartenant maintenant à Véolia) sont toujours rares. – Par contre ceux à 4 parts (2), longtemps absents des plages locales, commencent à faire leur apparition. Il s’agit des modèles distribués par les grandes sociétés françaises de traitement des eaux et repérés dans les pollutions de la Seine et du Miño. Ils sont référencés type K1 chez AnoxKaldnes par exemple.

 

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David Naulinhttp://cdurable.info
Journaliste de solutions écologiques et sociales en Occitanie.

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3 Commentaires

  1. L’invasion des media filtrants : des stations d’épuration à l’origine de cette nouvelle pollution majeure des eaux
    Voilà enfin la réponse détaillée à la trouvaille de mes petites filles sur une plage du côté d’Ilbaritz (Biarritz) vers mi-octobre. Les enfants ont ramené ces petites choses à la maison (!!!) et j’ai fini par les jeter dans le conteneur pour plastiques (était-ce le bon choix?). Il y en avait pas mal de ces objets, plus ou moins enfouis dans le sable!

  2. L’invasion des media filtrants : des stations d’épuration à l’origine de cette nouvelle pollution majeure des eaux
    je rentre de la plage de Cannet et j’ai été intrigué par ses drôles de pâtes en plastique.Encore une invasion sournoise.
    Comme pour les larmes de sirènes rien n’est prévu pour les repêcher,un cadeau pour le futur.

  3. L’inaction des associations…
    Les média-filtrants sont observés sur les plages atlantiques depuis 2009 et Surfrider fait beaucoup de « bruit » (appel à témoignages sur leur présence observée…) pour connaitre leur provenance!
    Crédulement, j’ai crû comprendre que ces observations permettraient à Surfrider de déposer plainte contre ces « pollueurs » afin qu’ils soient sanctionnés! Ne rêvez pas, lorsque la « STEP », station d’épuration d’EVRY SUR SEINE a rejeté plus de un million de ces média-filtrants en Février 2010, Surfrider n’a engagé aucune action juridique contre ce polueur! Ainsi, aucune amende ne leur a été infligée, il n’y a eu aucune plainte (Surfrider n’est pas la seulle assoc. qui prétend défendre l’environnement…). Triste constat…