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Investissements polluants, sous-évaluation des risques, prestations fictives…

Que font-ils de notre argent ? Et si on demandait des comptes à notre banquier ?

Vous êtes un citoyen modèle comme la planète en a besoin : vous préférez le bio à la junk food, vous prenez le train plutôt que l’avion, et au lieu de vous acheter une nouvelle voiture avec l’héritage de votre grand-mère, vous laissez votre pécule au chaud sur votre compte courant ou un placement sans risque. Erreur ! En faisant cela, vous êtes plus irresponsable que celui qui s’offre un 4×4. Il y a fort à parier en effet que vos économies servent à financer toute une usine, voire une nouvelle plateforme pétrolière en eau profonde. Car ne vous y trompez pas, les dix, cent ou mille euros qui traînent sur vos comptes ne restent pas à votre agence. Ils partent immédiatement pour une course folle à travers le monde dont Stanislas Dupré nous détaille les grandes étapes. Ce qu’il révèle : les banques, qui n’en sont même pas forcément conscientes elles-mêmes (problème de traçabilité), sont les premiers pollueurs ; elles évaluent mal les risques sociaux et environnementaux (et donc mettent en péril vos placements) ; et la solution de l’épargne responsable est aujourd’hui un leurre.

Bref, cette enquête est d’abord une prise de conscience : consommer responsable, c’est bien. Mais à quoi cela sert-il si notre épargne (le premier poste de dépense des Français, devant l’alimentation) est nocive ? C’est aussi un acte militant : en nous montrant ce qui se passe derrière le guichet et en proposant le premier classement des banques en fonction de leur empreinte environnementale, ce livre met les pieds dans le plat et dénonce les mauvais élèves du secteur. Cela ne changera rien ? Pas sûr : l’étiquetage écologique des réfrigérateurs et des voitures a profondément modifié ces filières. Pourquoi n’en serait-il pas de même des banques ? Stanislas Dupré est directeur général d’Utopies, cabinet de conseil et think tank spécialisé dans le développement durable. Depuis plus de dix ans, il conseille les directions des groupes du CAC 40 et de grandes banques. Face à l’inertie du secteur bancaire, il lève aujourd’hui avec ce livre le voile sur leurs (mauvaises) habitudes et avance des solutions. Le lancement du livre s’accompagne d’une campagne de sensibilisation du public lancée par Utopies avec Les Amis de la Terre. Pour en savoir plus : Le premier classement carbone des banques françaises : le secteur bancaire en tête des entreprises les plus polluantes.

Le livre en 12 citations

Banques et climat : « Si l’on veut éviter la catastrophe climatique, nous avons dix ans pour réallouer massivement les investissements des activités les plus polluantes comme l’extraction pétrolière vers l’efficacité énergétique et les énergies renouvelables. »« Selon les estimations de l’Agence International de l’Energie, l’effort d’investissement annuel représente 7 fois le plan Marshall »« Les banques financent, avec notre argent, l’économie polluante d’hier. Si l’on veut éviter la catastrophe climatique, il est urgent de les inciter à financer l’économie verte de demain ». Marketing bancaire et intérêt des épargnants : « Le marketing des produits financiers et la fiscalité de l’épargne sont une machine à orienter l’argent des épargnants français vers le financement des activités polluantes qui ont triomphé au siècle passé. Environ 10 à 13% d’un portefeuille moyen en action finance l’extraction pétrolière. »« 5000 euros sur un compte en banque moyen ou placé en assurance vie polluent autant que l’utilisation d’un 4×4 »« Des produits financiers verts existent, investis dans les énergies renouvelables par exemple. Ils polluent dix fois moins que les produits d’épargne traditionnels et sont tout aussi rentables, mais les banque ne les distribuent pas »« Si l’on prend la performance de l’indice NEX, investis dans les énergies renouvelables, on s’aperçoit que sur les dix dernières années, il fait une bien meilleure performance que le CAC 40. Mais les cours de l’indice NEX ne passent pas au journal de 20h, il est donc plus simple pour les banquiers de vendre des produits investis dans le CAC 40. Ça rassure les clients »« La plupart des grandes banques sont enfermées dans leurs habitudes. Elles préfèrent vendre leurs fonds et livrets maison très polluants mais auxquels les commerciaux et les clients sont habitués depuis des années. Créer et vendre des produits verts demande plus de pédagogie auprès des clients donc plus de formation des conseillers. »« La logique commerciale dominante dans les banques est de « placer » un maximum de produits en un minimum de temps, souvent au détriment de l’intérêt financier du client. » Les propositions de l’auteur « Le gouvernement veut raboter les niches fiscales. Il faudrait aussi raboter les émissions de CO2 liées à notre épargne : un bonus-malus climat devrait être intégré dans la fiscalité des revenus de l’épargne. »« Les dépenses fiscales actuelle, déjà dénoncées pour leur inefficacité économique par la Cour des Comptes, constituent surtout une véritable subvention au financement des secteurs les plus polluants de l’économie d’hier, extraction pétrolière en tête. Cette fiscalité est totalement incohérente avec les objectifs des politiques publiques françaises et européennes »« La crise des subprime a montré que les banques ne sont plus capables d’identifier quelles activités économiques elles financent avec notre argent. Elles n’arrivent donc pas à anticiper les conséquences financières des risques sociaux liées à ces activités. Il est temps d’imposer la traçabilité de notre épargne, comme cela a été fait il y a dix ans dans l’alimentaire après la crise de la vache folle »« Aujourd’hui la plupart des clients trouvent les questions financières trop compliquées et préfèrent faire confiance aveuglément à leur banquier. Mais demain, une partie croissante de nos retraites dépendra de nos placements. Savoir ce que les banquiers font de notre argent deviendra donc une préoccupation des français, et un sujet de débat public ».

Au sommaire de cet ouvrage

I. MON ARGENT POLLUE : Ce chapitre explique pourquoi nos choix d’épargne (et les banques) ont un rôle central à jouer dans la lutte contre le changement climatique.
  • Les aventures de ma prime de fin d’année: Où va l’argent confié à notre banquier ? Quelles activités finance-t-il ? Avec quels impacts sociaux et environnementaux ? Voyage pédagogique au pays des subprime, des produits dérivés et des financements de projets polluants.
  • Dix ans pour faire la révolution industrielle : En s’appuyant sur études de l’Agence Internationale de l’Energie et sur son expérience auprès des multinationales S. Dupré explique que les investissements devront être reportés massivement des activités les plus polluantes (exploration pétrolière en tête) vers les technologies vertes (énergies renouvelables en tête) si l’on veut éviter le scénario catastrophe en matière climatique.
  • Pas de révolution industrielle sans appui des banques : Les banques et notre épargne jouent un rôle clé dans cette transition. Or l’épargne et les activités des banques sont aujourd’hui très largement tournés vers le financement de l’économie – très polluante – d’hier. Dans le secteur de l’énergie, le financement de l’exploration production pétrolière absorbe la part du lion des flux financiers.
II. ET CELA NE ME RAPPORTE PAS PLUS : Ce chapitre explique qu’il existe des produits financiers « verts » mais que les banques ne les distribuent pas. Il fait tomber l’idée reçue selon laquelle ces produits verts seraient plus risqués ou moins rentable, en montrant que notre épargne est aujourd’hui loin d’être gérée de façon optimale.
  • Quand un risque social ou environnemental devient une bombe à retardement financière : Comment la crise des subprime, la faillite de Général Motors et la marée noire de BP ont-il pu arriver, malgré les risques financiers évidents qui de dessinaient ?
  • Quels experts pour repérer les bombes ? Les habitudes confortables et les petits conflits d’intérêt à chaque niveau de la chaine d’évaluation du risque financier (direction des risques dans les entreprises, auditeurs, agences de notation, analystes financiers, gérants de portefeuille et conseillers clientèle) laissent passer des risques financiers qui finissent par rendre notre épargne polluante et peu rentable.
  • Les tentatives de déminage : Quelques réformes ont été faites, les rapports de développement durable ou l’Investissement Socialement Responsable tentent d’apporter un peu de transparence, mais les évolutions à ce jour ne sont pas à la hauteur des enjeux.
III. LES BANQUES VONT-ELLES CHANGER ? : Cette partie explique pourquoi malgré le conservatisme et la puissance de lobbying des du secteur financiers, les banques finiront tôt où tard par évoluer sur ces questions.
  • Les ONG se réveillent : Comment les banques deviennent la cible des ONG écologistes (Amis de la Terre, Greenpeace, etc.) et pourquoi cela va s’amplifier dans les années à venir.
  • Les clients se rebellent : Comment la bataille des associations de consommateurs contre les pratiques marketing (surfacturation, conseils inadaptés, etc.) des banques créé un terrain favorable aux revendications des ONG.
  • La fin de l’âge d’or : Pourquoi le modèle des grandes banques françaises va devoir évoluer vers plus de transparence et de prise en compte de l’intérêt des clients.
  • Propositions pour accélérer le changement : Pour conclure l’auteur avance quatre propositions, dont le verdissement des niches fiscales liées à l’épargne, c’est à dire l’intégration d’une taxe carbone sur les revenus de l’épargne.
Zoom sur la taxe carbone sur l’épargne : Dans un contexte d’enlisement des négociations internationales sur le climat et de réflexions sur la remise à plat des niches fiscales, l’auteur propose de développer une taxe carbone sur les revenus de l’épargne. Le dispositif consisterait à se débarrasser des niches fiscales attachées à tel ou tel produit d’épargne (assurance-vie, etc.), que la Cour des Comptes juge totalement inefficace pour introduire un système s’appuyant notamment sur l’intensité carbone de l’épargne. Ce système incitatif permettrait d’alléger le coût du capital pour les activités de l’économie verte, et d’inciter les grandes entreprises polluantes à se transformer pour ne pas voir augmenter le coût d’accès au capital. Il inciterait les épargnants à financer en priorité les secteurs peu polluants, permettant ainsi de bénéficier des retombées de la révolution industrielle qui s’annonce.

Références

Que font-ils de notre argent ? de Stanislas Dupré – Editeur : Nil – date de parution : 18 novembre 2010 – 258 pages – ISBN-13: 978-2841115112 – Prix public : 19 €

 

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David Naulin
David Naulinhttp://cdurable.info
Journaliste de solutions écologiques et sociales en Occitanie.

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