A l’initiative du programme Fair&Precious, l’Association Technique Internationale du Bois Tropical (ATIBT) a organisé un webinaire pour revenir sur ses valeurs, engagements et sensibiliser autour de la gestion durable des forêts tropicales. Pour l’occasion, l’ATIBT a donné la parole aux représentants de la société civile pour témoigner de leurs expériences terrain sur le sujet.
Les chiffres clés à retenir :
Concernant la forêt tropicale du Bassin du Congo[[l’ATIBT intervient au Cameroun, Gabon, République du Congo, où sont basées les concessions forestières certifiées FSC®, et travaille également en République démocratique du Congo, République Centrafricaine et d’autres pays du bassin pour promouvoir les certificats FSC® et PEFC.]]- 300 millions d’hectares de forêts denses (soit environ 3/4 de la surface de l’Union Européenne)
- Un des 2 poumons verts de la planète
- 25% du stockage de CO² terrestre tropical
- 10 millions d’hectares de surfaces certifiées (garanties zéro déforestation)
- + 10 000 espèces de plantes, 400 essences de bois et + 1 400 espèces d’animaux dont les mammifères emblématiques (grands singes, éléphants, buffles)
La déforestation et la lutte contre le réchauffement climatique : des sujets d’actualité
Face à l’urgence climatique, différents projets européens en lien avec la préservation de l’environnement ont vu le jour ces dernières années. Le Green Deal, initié depuis 2019 et le projet de réglementation sur la déforestation importée publié en novembre dernier (un projet en cours depuis plus de deux ans et demi en France au travers de la SNDI – Stratégie Nationale de lutte contre la Déforestation importée) sont autant d’initiatives qui font écho à la mission de l’ATIBT : tendre vers une consommation « Zéro déforestation ». Le soutien de l’ATIBT pour la certification et la gestion durable des forêts s’inscrit pleinement dans la stratégie européenne. La France, qui a une antériorité dans la lutte contre déforestation parmi les pays européens, reconnait les schémas de certification FSC® & PEFC-PAFC, comme des outils capitaux pour lutter contre la déforestation. Les certifications sont également reconnues comme outils d’analyse et de réduction de risque par l’Union Européenne.La gestion durable des forêts une solution pour préserver le second poumon de la planète
Les forêts tropicales jouent un rôle clé dans le bon fonctionnement du système environnemental mondial via notamment leurs fonctions régulatrices du climat par l’absorption et la captation du carbone. Le Bassin du Congo, ou second poumon vert de la planète, apporte aussi des services écosystémiques (ressources médicinales, alimentaires, maintien de la biodiversité…) dès lors qu’il est bien géré. En outre, pour rappel, la filière bois dans les pays du bassin du Congo est le premier employeur après l’Etat. Au Gabon par exemple, elle représente 17 à 18 000 emplois (avec une réelle perspective de croissance due à l’avancée de la transformation parmi les métiers du bois dans le pays). Avec pour ambition de promouvoir la gestion durable des forêts et le bois tropical certifié, l’ATIBT se donne pour mission de sensibiliser et d’apporter de la pédagogie sur leurs enjeux, à travers son programme Fair&Precious. Créé il y a 5 ans, ce programme fixe, à l’attention des gestionnaires forestiers, 10 objectifs de durabilité, alignés avec les Objectifs de Développement Durable des Nations Unies (maintien de la biodiversité, lutte contre l’érosion, contre le braconnage, formation des acteurs de la filière bois…). Fair&Precious intègre des engagements environnementaux et humains (comme la nécessité de fournir un emploi décent, rémunérateur et stable aux populations) et entend promouvoir l’initiative de gestion durable autant dans les pays producteurs que dans les pays européens.Témoignages : qu’en disent les acteurs sur le terrain ?
Edwige Eyang Effa, attachée de recherche à l’Institut de Recherche en Ecologie Tropicale basée au Gabon et Norbert Gami, anthropologue basé au Congo, ont témoigné et apporté leur vision sur l’importance de la préservation des forêts tropicales du bassin du Congo.Norbert Gami a rappelé que le Congo fait partie des premiers pays certifiés FSC® (depuis 2008). « Plus de 2 millions d’hectares de forêts sont certifiées FSC® et répondent à une volonté politique nationale d’avoir une forêt gérée durablement. Aujourd’hui l’exploitation forestière est vue comme destructrice alors qu’au contraire nous avons vu des progrès énormes en termes de conditions humaines et sociales des populations dans les exploitations gérées durablement. Celles-ci permettent un accès aux systèmes d’éducation et de santé, mais ont également permis de légaliser les contrats de travail, apportant ainsi une sécurité de l’emploi. La certification améliore de façon concrète le quotidien des populations locales et autochtones et la prise de conscience de l’importance de la préservation des forêts est réelle parmi les habitants. »
Edwige Eyang Effa, a quant à elle fait part de son expérience quotidienne dans les concessions certifiées, participant à l’accroissement de la biodiversité. « Les exploitants qui respectent la règlementation durable (via le prélèvement sélectif, la rotation dans la coupe de bois, une politique de conservation des écosystèmes rares avec la mise en place des zones de conservation et la protection des HVC, etc…) participent grandement à la préservation de l’environnement. Le Gabon a, depuis peu, imposé à toutes les concessions forestières des études d’impact environnemental, ce que les concessions certifiées font déjà en profondeur. Elles doivent en effet justifier de participer à la protection de la faune et de la flore (avec un plan de gestion et de préservation pour la protection de la biodiversité et/ou la préservation des communautés qui y vivent). La certification est toujours bénéfique pour l’environnement, sans compter les aspects transversaux (droits des communautés et des travailleurs). »Une récente étude de WCS a d’ailleurs mis en avant que la population d’éléphants du bassin croît depuis 30 ans grâce à la pratique de conservation et de surveillance des société de gestion forestière.
La préservation des forêts tropicales : un enjeu économique mondiale puissant
Gérer durablement les forêts tropicales, ce n’est pas gratuit. Pour qu’elle soit comprise de tous et mise en place, l’ATIBT aux côtés d’ONG, comme WWF, mais aussi d’organismes de certification, mettent en place des formations auprès de tous les acteurs de la filière, pour continuer de lutter contre le commerce illégal du bois. L’objectif de l’association est de doubler les surfaces certifiées au cœur du Bassin du Congo, mais aussi dans d’autres pays d’Afrique.« Aujourd’hui la certification est connue mais on ne paie pas le juste prix pour ce bois car il y a une réelle concurrence déloyale des exploitations illégales qui ne respectent pas les règles et mettent à mal l’environnement et la société. » a déclaré Françoise Van de Ven, Présidente de l’ATIBT. « 300 millions d’hectares de forêts ne peuvent pas être sous surveillance au quotidien ! Et sur 51 millions d’hectares de forêt de production, seulement 10% sont certifiés aujourd’hui. C’est en progrès mais beaucoup de travail reste à faire. Avec nos partenaires comme KfW, PPECF, et d’autres qui encadrent les acteurs vers la certification, nous espérons doubler les surfaces certifiées au bassin du Congo mais aussi de manière plus étendue car la question de la certification du bois tropical se pose aussi bien au Liberia, en Sierra Leone… » précise la Présidente. « Grâce à la gestion durable des forêts, nous pouvons constater un vrai progrès. Nous pouvons compter désormais 95 000 éléphants versus 60 000 il y a quelques années et la majorité de ces mammifères se trouvent dans des concessions forestières! Sur le plan économique, notre ambition est de continuer à valoriser l’initiative Fair&Precious car grâce à cela, nous continuons de préserver les forêts tropicales pour les générations futures, tout en créant de l’emploi en local et en dynamisant la faune et la flore et en stockant du carbone. » conclue-t-elle.
L’ATIBT, engagée pour donner de la valeur à la forêt
Bien gérer les forêts tropicales, c’est contribuer à leur protection. Pour sauver la forêt, il faut couper des arbres et cette idée, très mal reçue par les Européens, reste souvent mal comprise. « Si nous voulons protéger la forêt, consommons du bois certifié au juste prix ! »Selon Benoît Jobbé-Duval, Directeur Général de l’ATIBT, « les entreprises forestières font en quelque sorte de la « cueillette », c’est-à-dire qu’elles prélèvent un, voire deux arbres par hectare tous les 25 ou 30 ans. Dans ce contexte, il y a une certaine dégradation liée à l’action de l’homme, mais temporaire (cette dégradation est réversible en peu d’années) et dont les effets restent bénéfiques car ils contribuent à l’emploi, au financement d’actions notamment de formations, de lutte contre le braconnage et de santé publique. C’est essentiel de saisir ce que représente la gestion durable des forêts pour les générations à venir ». Importateurs et consommateurs de bois tropical doivent comprendre que choisir du bois certifié c’est donner de la valeur à la forêt, pour les populations qui y vivent et en vivent »Le bois tropical est la seule matière première naturelle renouvelable à l’infini, qui apporte des services aux populations locales et à toute la planète. Il est de la mission de l’ATIBT mais aussi de tous les acteurs de la filière de promouvoir le bois certifié pour préserver ce trésor pour les générations futures.
A propos de l’ATIBT
L’Association Technique Internationale des Bois Tropicaux (ATIBT) a été fondée en 1951, à la demande de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) et de l’Organisation de Coopération et de Développement Économiques (OCDE). Au service de la filière « bois tropicaux », de la forêt jusqu’au consommateur final, l’association joue un rôle moteur dans la mise en œuvre de projets internationaux dédiés à la gestion durable et responsable des forêts tropicales. Elle se positionne aussi comme l’un des meilleurs référents technique et scientifique de la ressource bois tropical. Entre 2016 et 2019, l’ATIBT a connu une augmentation de près de 50% du nombre de ses adhérents, portant son effectif à plus de 130. Aux côtés d’acteurs de la filière « bois tropicaux africains », l’ATIBT rassemble des états (république du Congo, république de Côte-d’Ivoire, république centrafricaine), d’autres association professionnelles africaines (Gabon, Côte d’Ivoire, Cameroun, RDC) et européennes, des centres de recherche, des bureaux d’études, des ONG (à l’image de WWF et la Fondation Prince Albert II) et de grandes entreprises. – www.atibt.org – www.fair-and-precious.org