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Le 19 janvier en librairie aux éditions de L'Aube

Ce que je n’accepte pas, le dernier message de Danielle Mitterrand

« C’est une première dame et c’est aussi une grande dame. Elle aurait pu rester confortablement aux côtés de son mari pour les photos officielles à l’Elysée mais elle a choisi l’action. Elle veut juste un monde plus juste et se bat partout dans le monde pour cela ». Elise Lucet introduisait ainsi Danielle Mitterrand lors de sa dernière intervention télévisée. Peu après son décès, Gilles Vanderpooten nous offre une dernière conversation…

Même si Michel Joli, le secrétaire général de la Fondation France-Libertés que présidait Danielle Mitterrand, récuse dans sa post-face le mot de « testament » pour qualifier ce livre dans lequel l’ex-première Dame de France s’est une dernière fois livrée, c’est bien d’un testament qu’il s’agit. Morte le 22 novembre dernier à Paris et sachant que sa fin approchait, Danielle Mitterrand avait accepté, en effet, une dernière conversation. Son questionneur est Gilles Vanderpooten [[Fondateur de la série « Conversation pour l’avenir », Gilles Vanderpooten dirige également la rédaction de l’ONG Reporters d’Espoirs.]], co-auteur avec Stéphane Hessel d’Engagez-vous, la suite du célébrissime opuscule Indignez-vous. De la résistance, d’hier, d’aujourd’hui et de demain, aux crises politiques, écologiques et sociales, Danielle Mitterrand nous livre dans cet ouvrage un dernier cri d’alarme, une critique acérée du monde dans lequel nous vivons. Celle qui n’a jamais cessé de combattre l’injustice nous invite à suivre une autre voie pour vivre mieux et vivre ensemble. Références : Ce que je n’accepte pas par Danielle Mitterrand – Editions de L’Aube – 110 pages – Prix public : 7,10 euros.

Une vie d’engagement

NDLR : article publié le 22 novembre 2011 à l’occasion du décès de Danielle Mitterrand. L’épouse de l’ancien président de la République est décédée, à l’âge de 87 ans, dans la nuit du 22 novembre 2011. Elle avait été placée en coma artificiel à l’hôpital parisien Georges-Pompidou où elle avait été admise vendredi. Elle y avait déjà été hospitalisée, mais avait participé le 21 octobre à l’anniversaire des 25 ans de sa Fondation, France-Libertés, créé « pour favoriser l’accès à l’eau pour tous, redéfinir les véritables richesses et faire reconnaître et respecter le droit des peuples ». Celle qui se reconnaissait dans les mots de Jean Paul Sartre « Il n’est pas juste de vouloir traiter les souffrances des hommes sans s’engager dans la lutte contre les causes même de ces souffrances » avait créé cette fondation pour toujours rester à l’écoute des peuples et de leurs droits et retransmettre leurs attentes. Une femme engagée pour les droits de l’Homme Née le 29 octobre 1924 à Verdun (Meuse), Danielle Mitterrand est la fille d’un directeur d’école – révoqué en 1940 par Vichy pour ne pas avoir dénoncé les élèves juifs de son collège – et d’une institutrice, tous deux militants de la SFIO. « J’avais 16 ans. J’ai dû sortir de l’insouciance et mesurer ma capacité de révolte devant l’injustice, celle que subissaient ces enfants, celle que subissait mon père », écrit-elle dans Le Monde en mai 1986. Elle rejoint le maquis à 17 ans comme infirmière bénévole et sera l’une des plus jeunes médaillées de la Résistance. C’est à Cluny (Saône-et-Loire), dans la maison familiale où s’est réfugié son père, qu’elle rencontre le capitaine « Morland », alias François Mitterrand, recherché par la Gestapo. Elle l’épouse le 27 octobre 1944. Entraînée malgré elle dans le tourbillon de la politique, elle accompagne son mari lors des nombreuses campagnes qu’il mène entre la guerre et 1981. Elle est là, présente, attentive, à toutes les étapes de l’ascension politique de François Mitterrand, en militante et en femme de gauche. Le 19 mai 1974, elle pleure de rage, quand la victoire tient à 0,62% des suffrages, qui sont allés à Valéry Giscard d’Estaing. Le 10 mai 1981, elle verse de discrètes larmes de joie quand son mari le bat à son tour, avec plus de 3,5 points d’écart. Au lendemain de l’élection, elle promet qu’elle ne renoncera pas à son rôle de militante. Elle va tenir parole. A l’Elysée, elle refuse de se laisser enfermer dans le protocole et parvient à utiliser la tribune que lui offre sa place d’épouse du chef de l’Etat pour se consacrer à la défense des droits de l’Homme. En 1986, elle crée la fondation France-Libertés. Quels opprimés n’a-t-elle pas soutenus ? La femme du président deviendra le cauchemar des ambassades, la bête noire du Quai d’Orsay, un enfer pavé de bonnes intentions pour les conseillers du palais résume Béatrice Gurrey dans Le Monde. La cause des Kurdes fait figure d’obsession, au point de susciter cette plaisanterie affectueuse de Roger Hanin : « Vous lui demandez l’heure, elle vous répond cinq heures moins quatre Kurdes ». Ce qu’elle a longtemps reproché à François Mitterrand, c’est ne pas avoir été assez socialiste : « Je ne comprends pas, François, puisque tu as le pouvoir, pourquoi ton gouvernement ne prend-il pas telle ou telle décision… » Il répondait : « Je n’ai pas le pouvoir. La France, comme le reste du monde, est assujettie à une dictature financière qui gère tout, décide de tout. » Peut importe, la femme du président aura l’art de se mettre à dos quelques dirigeants du monde : si les Chinois s’irritent de son amitié avec le Dalaï-Lama, Hassan II est son meilleur ennemi. Il lui fit payer très cher son absence dans les voyages officiels du chef de l’Etat au Maroc, son soutien déterminé au Front Polisario, ou aux prisonniers politiques. Non seulement il entrava ses déplacements, mais le souverain alaouite aura le front, en 1991, sur TF1, de qualifier la femme du président d’« épouse morganatique ». Dix ans avant le printemps arabe, elle fustige le pouvoir tunisien « dans son entreprise de dévastation de la société civile ». Sa bataille des dernières années ? L’accès de toutes les populations à l’eau potable. En 2011, elle s’était également engagée contre l’exploration et l’exploitation des gaz de schistes. Lauréate du prix Nord-Sud (1996), Danielle Mitterrand, qui s’est rendue à plusieurs forums sociaux mondiaux, a écrit deux best-sellers : En toutes libertés (1996) et Le livre de ma mémoire (2007). Jusqu’au bout, Danielle Mitterrand aura eu toujours le même combat contre ce qu’elle appelle « le terrorisme économique mondial », celui des forces de l’argent. Le combat d’une vie… « La vie est quelque chose de formidable, l’esprit de résistance de Danielle doit nous habiter car rien n’a d’importance si nous ne profitons de chaque instant de notre vie » résume Emmanuel POILANE, Directeur de France Libertés. Il estime que, « malgré son départ, Danielle Mitterrand nous laisse un message d’espoir, qui montre la voie d’un monde plus juste aux générations qui inventeront le monde de demain ». « Nouveaux résistants à l’ordre néolibéral, bâtisseurs d’un monde où chacun trouve sa part de vie, de liberté et d’action, expérimentateurs de solutions alternatives aux problèmes du temps… Qu’ils se rassemblent, s’unissent, fusionnent partout dans le monde pour mettre un terme à la dictature économique et financière, suppôt des dictateurs politiques. Celles-ci semblent être, enfin, ébranlées par la colère des peuples. C’est heureux mais ce n’est qu’un début. Je souhaite de tout cœur que nos propositions en faveur des biens communs du vivant soient comprises de tous et participent à l’urgente et indispensable métamorphose de la société humaine vers une nouvelle civilisation ». DANIELLE MITTERRAND Pour en savoir plus sur les combats de Danielle Mitterrand, je vous invite à lire Mot à mot de Yorgos Archimandritis édité en 2010. Cet abécédaire éclaire le parcours de Danielle Mitterrand et dresse ainsi, avec sensibilité et clarté, le portrait d’une des plus grandes personnalités politiques et citoyennes de notre temps. Danielle Mitterrand écrivait à propos de son engagement avec France Libertés : « La vie a voulu que je parcoure un long chemin dans le temps. Le destin m’a donné l’occasion de fouler de nombreux tapis rouges et de rencontrer les grands de ce monde. Mais il m’a surtout permis de côtoyer des populations de tous les continents, d’entendre les témoignages d’hommes et de femmes oubliés du bonheur de vivre et accablés par la misère. Les tapis rouges des voyages présidentiels ne m’ont pas égarée, pas plus que les lustres ne m’ont éblouie. J’ai vu s’effondrer des dictatures, d’autres se constituer avec la protection et parfois l’encouragement des puissants de ce monde. J’ai vu s’écrouler le communisme comme un château de cartes bousculé par les peuples qui ne supportaient plus le mépris de ses dirigeants. Aujourd’hui j’observe un capitalisme qui se fissure et se détruit lui-même, victime de sa démesure totalitaire et de son mépris pour les valeurs humaines non marchandes. 25 ans après avoir créé France Libertés, les raisons d’être de la Fondation sont toujours valables… J’ai eu la chance de voir des situations changer, nous avons même gagné certains de nos combats. Mais une trop grande partie de l’humanité reste au bord du chemin, et subit de plein fouet les folies de notre système. Le changement climatique en est un exemple : une fois de plus ce sont les plus pauvres, les plus vulnérables qui seront les premiers à payer pour notre « mal-développement ». C’est pour cela que les actions que nous menons à la Fondation, pour favoriser l’accès à l’eau pour tous, pour redéfinir les « véritables richesses » et pour faire reconnaître et respecter le droit des peuples, me semblent toujours aussi nécessaires et essentielles. France Libertés est essentiellement un maillon actif d’un réseau mondial qui aspire à organiser l’alternative à la mondialisation du commerce et de la finance pour une société qui donne toutes ses chances à la vie. »

Réactions

La première secrétaire du parti socialiste, Martine Aubry, a salué « la femme d’action de réflexion et d’engagement », rendant hommage à « sa parole intransigeante ». Le candidat a l’élection présidentielle François Hollande a salué « une grande dame, engagée très jeune dans la résistance, qui avait mis son courage et son immense énergie au service de la cause qui valait pour elle, celle des libertés ». Du côté des ONG, les réactions sont également nombreuses. A l’image de « Green Cross [qui] a pris acte avec une grande tristesse du décès de Madame Danielle Mitterrand. Plus que tout, nous retenons l’impact, la vision, la sincérité et la profonde humanité de son engagement. Toutes nos pensées vont en ce moment vers sa famille et ses proches, et tous ceux qu’elle a ému, convaincu et fait bouger. Nous avons perdu une militante passionnée et une défenseure infatigable des droits de l’homme la nuit dernière. Les chemins de Mikhaïl Gorbatchev, Président fondateur de Green Cross International, et de Danielle Mitterrand se sont croisés à maintes reprises et dans des contextes différents. L’ancien Président de l’URSS et l’épouse de François Mitterrand se rencontrèrent à de nombreuses reprises, dès les années 80, pour consolider leurs engagements pour un monde juste, pacifique, en harmonie avec l’environnement. Les engagements communs de Green Cross et de France Libertés en faveur de l’accès à l’eau et à l’assainissement universel ont mené les deux organisations à unir leurs forces dès leurs premières heures et en 2006, aux côtés de la Coalition Eau, pour que le Droit à l’eau soit enfin reconnu dans la législation française. Danielle Mitterrand est restée engagée jusqu’à son dernier souffle, via la Fondation France Libertés dont elle venait tout juste de présider le 25ème anniversaire. Son œuvre habite et anime toutes les campagnes et les projets. Son énergie déployée à rendre notre monde meilleur et notre planète plus saine nous rapproche de ses convictions et de ses engagements. Plus que jamais, il nous faut continuer à propager avec assiduité, enthousiasme et sérénité l’engagement collectif qu’elle a contribué à impulser pour assurer la protection et le respect des ressources naturelles, et prioritairement de l’eau ».

 

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David Naulinhttp://cdurable.info
Journaliste de solutions écologiques et sociales en Occitanie.

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1 COMMENTAIRE

  1. Hommage à Danielle Mitterand
    Green Cross a pris acte avec une grande tristesse du décès de Madame Danielle Mitterrand. Plus que tout, nous retenons l’impact, la vision, la sincérité et la profonde humanité de son engagement. Toutes nos pensées vont en ce moment vers sa famille et ses proches, et tous ceux qu’elle a ému, convaincu et fait bouger. Nous avons perdu une militante passionnée et une défenseure infatigable des droits de l’homme la nuit dernière. Les chemins de Mikhaïl Gorbatchev, Président fondateur de Green Cross International, et de Danielle Mitterrand se sont croisés à maintes reprises et dans des contextes différents. L’ancien Président de l’URSS et l’épouse de François Mitterrand se rencontrèrent à de nombreuses reprises, dès les années 80, pour consolider leurs engagements pour un monde juste, pacifique, en harmonie avec l’environnement. Les engagements communs de Green Cross et de France Libertés en faveur de l’accès à l’eau et à l’assainissement universel ont mené les deux organisations à unir leurs forces dès leurs premières heures et en 2006, aux côtés de la Coalition Eau, pour que le Droit à l’eau soit enfin reconnu dans la législation française. Danielle Mitterrand est restée engagée jusqu’à son dernier souffle, via la Fondation France Libertés dont elle venait tout juste de présider le 25ème anniversaire. Son œuvre habite et anime toutes les campagnes et les projets. Son énergie déployée à rendre notre monde meilleur et notre planète plus saine nous rapproche de ses convictions et de ses engagements. Plus que jamais, il nous faut continuer à propager avec assiduité, enthousiasme et sérénité l’engagement collectif qu’elle a contribué à impulser pour assurer la protection et le respect des ressources naturelles, et prioritairement de l’eau.