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Copie conforme : pourquoi les médias disent-ils tous la même chose ?

Ils disent tous la même chose ! Qu’il s’agisse des radios, de la presse écrite, des télévisions, l’accusation va grandissant. Simple impression ou redoutable réalité? La vérification de cette présumée « copie conforme » exige un peu de géologie médiatique. Plongeons la foreuse dans les sédiments d’une journée d’information, et cela jusque dans les années cinquante, et l’on constate que l’art de produire de la similitude dans le choix et le traitement des nouvelles s’est bel et bien généralisé.

Le regard du journaliste a changé sur ce qui a toujours été sa raison d’être, à savoir l’événement. Aujourd’hui, on l’examine, on le mesure, on le met en série,… tant et si bien que le débat et la controverse deviennent plus importants que les faits eux-mêmes. Comment expliquer cette crise du journalisme ? Formation déficiente ? Délit de connivence ? Exigence de vitesse due aux nouveaux médias ? Effets pervers de la concurrence ?… Au bout du compte, la copie conforme menace notre démocratie, ébranlant un de ses piliers, en produisant une parole toujours plus douce et univoque. La chronique de Libération à propos de ce livre paru au Seuil : « En journalisme, Hervé Brusini a tout fait : lauréat du prix Albert-Londres pour un docu sur l’affaire Farewell, rédac-chef du 20 heures de France 2 (c’est en partie à lui qu’on doit la formule actuelle du JT), il travaille aujourd’hui au pôle numérique de France Télévisions. Ah, et il écrit aussi. Le livre s’appelle Copie conforme. Pourquoi les médias disent-ils tous la même chose ? Vaste question à laquelle Brusini répond en 130 pages. Il analyse la couverture médiatique de quelques 3 octobre, date prise au pif («une carotte plongée dans les glaces de l’information») ou compare la façon dont les journaux ont rendu compte de deux catastrophes : Malpasset en 1959 et Vaison-la-Romaine en 1992. Et là, on se demande si on écrit la même chose que les autres journaux qui ont parlé de ce livre… » Écouter : Comme on nous parle Pascale Clark recevait le 18 mai dernier Hervé Brusini l’auteur de Copie conforme et Denis Muzet, sociologue des médias, son dernier ouvrage, co-écrit avec François Jost, « Le téléprésident : essai sur un pouvoir médiatique », est paru en mars aux éditions de l’Aube dans Comme on nous parle sur France Inter :
Hervé Brusini par franceinter Écouter : les médias ont–ils un comportement grégaire ? Je vous invite également à écouter l’une des émissions Du Grain à moudre diffusée du lundi au vendredi sur France Culture avec Brice Couturier et Louise Tourret. Le 24 mai, ils recevaient Hervé Brusini mais aussi Eric Scherer, auteur notamment de : A-t-on encore besoin des journalistes ? (PUF, 2011) et David Servenaiy, journaliste à Owni. Etes-vous média addict ? Au contraire, pensez-vous que l’inf-obésité est un mal moderne et qu’on nous répète toujours les mêmes infos ? L’affaire DSK vous a-t-elle lassé ou bien cloué derrière un écran de télé ou d’ordinateur ? En tout cas, les audiences de la télévision, des sites d’information sur internet et la vente de journaux papier ont battu des records historiques les jours qui ont suivis l’arrestation de Dominique Strauss Kahn. Des audiences bien supérieures à celles enregistrées pour les récents évènements de portée historique comme les révolutions arabes, la mort de Ben Laden ou encore après le Tsunami au Japon et la catastrophe nucléaire de Fukushima. Pourtant au fil des heures qui ont suivi l’arrestation du directeur du FMI, et dans l’attente de faits nouveaux, on a beaucoup répété (du coté des médias) et beaucoup entendu (du coté du public) les mêmes faits et aussi les mêmes commentaires et les mêmes opinions qui n’en finissaient plus de circuler. Par exemple la polémique au sujet des images de Dominique Strauss Khan menotté (fallait-il les montrer ou pas), la comparaison entre les systèmes judiciaires français et américain, les soupçons de complots, l’accusation de complicité des médias qui en savaient évidemment beaucoup plus que le public, nous y reviendrons ce soir. Emballement qui est loin d’être une première. Nous appellerons cela la boucle médiatique. Un phénomène qu’Hervé Brusini analyse dans son ouvrage Copie conforme comme l’art de produire de la similitude dans le choix et le traitement des informations, un art qui s’est raffiné depuis les années 50 et les débuts de la télévision, en particulier avec l’avènement des chaines d’info en continu. Un « art », un savoir faire, dont on va se demander ce soir comment il a évolué et évolue encore avec internet alors même que que s’ouvrait ce matin le G8 de l’internet). Le web et son immédiateté d’abord, puis le web.2 et son ouverture aux participations, ont bouleversé l’économie de la presse, ont –ils profondément modifié à la production et à la réception de l’information et comment? Le journaliste « augmenté », tel que nous le promettent les optimistes du net, évitera-t-il l’erreur, la répétition, le ressassement ? Ou au contraire les favorisera-t-il brouillant la frontière entre l’information et le commentaire, et abattant les hiérarchies traditionnelle de l’info ? Enfin, la prolifération de signes entraine-t-elle la disparition du sens comme le craint Edgar Morin ? On en débat ce soir avec nos trois invités. – Ecoutez cette émission en cliquant ici.

Exigence de transparence par Hervé Brusini

Hervé Brusini, l’auteur de Copie conforme a signé une tribune dans le quotidien Le Monde (21 mai 2011) revenant sur le traitement journalistique de l’affaire DSK : Ce fut une sidération citoyenne et journalistique. Par les chemins de la fiction, le réel nous laissait bouche bée. La série américaine du samedi soir affichait un personnage aux traits bien connus : un Français promis à un avenir suprême. Arrestation, expertises, audition, au fil des heures nous vivions la succession classique des ingrédients de ces histoires mille fois vues, à ceci près que chacune de ces images-là accélérait la chute d’un puissant dénommé Dominique Strauss-Kahn. Très vite la sidération prit fin quand on entendit la responsable du Front national affirmer qu’elle n’était pas étonnée : « La vérité, et tout le monde le sait, c’est que Paris bruisse depuis des mois sinon des années dans les milieux politiques ou journalistiques de relations assez pathologiques de M. Strauss-Kahn à l’égard des femmes… C’est un peu le système en France, on ne parle pas sous prétexte que c’est la vie privée… » L’antienne du FN « seul à dire les choses » est bien connue. Mais la polémique reprit avec l’entrée en scène des confrères américains. La valeur vérité allait être mise à mal. La France avait crié sa colère de voir ainsi livré à la vindicte du regard mondial l’un de ses illustres compatriotes ; les journalistes américains répliquaient par la connivence « bien connue » qui conduit au mutisme tricolore dès que l’intimité des politiques est en cause. Et d’exhumer la fille cachée d’un président, la séparation d’un couple d’opposants… Plutôt que de donner des leçons, les plumes françaises étaient conviées à balayer devant leur porte. Mieux, et non sans raison, des confrères parisiens rappelaient à leur tour qu’ils ne se s’étaient pas tus, qu’ils avaient fait ce qu’ils estimaient être leur travail, quitte à s’exposer à quelques mauvais coups en retour dans la dénonciation d’un « rapport aux femmes frôlant le harcèlement » de la part de Dominique Strauss-Kahn. Ainsi, alors que, pour l’heure, on ignore encore les faits précis, le détail des circonstances d’un dossier qui bouleverse la politique et l’économie mondiales, le journalisme s’invite de lui-même à s’étriper en place publique. Et non sans ironie compte tenu de ce constat de méconnaissance, à s’envoyer à la figure l’épineuse question de l’enquête. Dont acte. Pas étonnant que 57 % de Français pensent que cette affaire n’est qu’un monstrueux complot. Ou la valeur vérité réduite à néant que la théorie du complot renvoie toujours à une autre théorie du complot. Peut-on alors se risquer à savoir ce qu’il en est de cette fameuse investigation ? La liberté d’impression comme le dit joliment Jean-Luc Godard conditionne bien sûr l’exercice de l’investigation. Et de ce point de vue, la multiplicité des supports d’information permet de contourner le triste sire qui rêverait d’un quelconque rétablissement de l’antique censure. Ces stratégies n’ont d’ailleurs guère à être mises en oeuvre. Osons écrire que le journaliste français est libre. L’époque du ministre Alain Peyrefitte inaugurant le journal télévisé relève de la section des momies du Louvre. Pour autant, le sexe et la politique ne sont pas les territoires banalisés des colonnes de nos journaux. Car l’enquête n’a peut-être pas la même histoire ici et là-bas. Le « fouille-merde » cher à nos politiques quand ils manifestent leur bonheur à lire, écouter ou voir de plaisantes révélations, est une invention américaine. Ida Tarbell fut à l’origine de cette appellation présidentiellement contrôlée par Théodore Roosvelt. Au début du XXe siècle, la journaliste fut qualifiée de muckraker parce qu’elle dénonçait les méfaits d’un certain John D. Rockeffeler dans l’exploitation des femmes et des enfants, nouveaux employés de l’industrie pétrolière. L’investigative journalism s’enracine dans une tradition sociale bâtie sur la défense du faible. Rapidement, il fera l’objet d’une théorisation, d’un enseignement spécifique. L’enquête est considérée comme un pilier de la production de l’information américaine. Un art de faire indissociable du système judiciaire accusatoire. Le journaliste met en lumière dans le cadre d’une démocratie légale qui l’accompagne, à l’instar des parties au procès qui produisent leurs preuves. L’exigence de transparence englobe tous les secteurs de la vie publique ou privée, de la chasse à la corruption comme à celle du mensonge, et cela dans cette même recherche de l’élément qui démontre. Le puritanisme ambiant veut une exemplarité à tous crins ; y contrevenir, c’est s’engager à être exposé au plus grand nombre qui vous juge à la façon du magistrat dans son tribunal. A moins que vous ne soyez en mesure de contredire, arguments à l’appui, la plainte qui vous vise. Dans ce rapport à la vérité, le sexe fait partie du spectre que l’on explore. Il touche les plus puissants, entrepreneurs et même policiers. Actuellement en librairie aux Etats-Unis, on peut trouver le « top ten » des scandales sexuels politiques. La France des années 1900 a connu cette même indignation journalistique devant l’injustice sociale. Bagne ou Tour de France, les écrits d’Albert Londres et de ses confrères pointent un même doigt de justicier. Avec l’avènement du journalisme, le commentaire politique règne d’abord en maître. L’importation des techniques américaines du reportage ont permis que soient ensuite publiées les premières affaires politico-judiciaires et bien après jusque sur le petit écran. Mais l’enquête n’est pas ce fondement de la production d’informations. Certes les enquêteurs sont bien là. Il leur faut ce fil du document, du témoignage qui désignent, de l’action judiciaire qui oppose des parties. Mais l’initiative journalistique pure est chose rare. L’enquête française est toujours en relation avec un événement déclencheur. De plus, elle s’est aussi fixé des limites déontologiques, comme le respect de la vie privée. Depuis peu, ce principe s’amende. Cette vie privée oblige maintenant à une indéfectible transparence, quelle que soit l’importance du ministre. Fin de -l’omerta, de la connivence ou des avantages en nature. Ce n’était pas le cas il y a peu. Le sexe est souvent resté sujet de gaudriole et de sous-entendus pour machistes. Certes, on le publie, on le commente mais sans lui conférer le statut d’information. De quoi nous préserver tous d’une forme d’horreur médiatique. Soit, mais si la chambre est payée aux frais de la République ? Quand, derrière la porte, les pratiques se font intolérables ? Faut-il que nos légitimes préventions évoluent ? « L’affaire DSK » repose la question d’une valeur vérité dont les démocraties souffrent davantage chaque jour.

 

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David Naulinhttp://cdurable.info
Journaliste de solutions écologiques et sociales en Occitanie.

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