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Augmentation du tarif de l’électricité : l’alibi des énergies renouvelables

Le gouvernement a décidé la hausse des prix de l’électricité de 3 %, qui interviendra en 2011, et qui portera la hausse des tarifs à plus de 6% sur six mois, soit l’une des plus fortes depuis 30 ans. Accusés : les tarifs d’achat du photovoltaïque qui seraient à eux seuls responsables de cette augmentation réclamée par EDF. Une injustice pour les professionnels de la filière photovoltaïque, un alibi pour Europe Ecologie et les Verts….

Le ministre du Budget, François Baroin, a confirmé mercredi dernier l’augmentation de 3% des tarifs de l’électricité attendue début 2011, qui doit « alléger le fardeau financier pour EDF du rachat de l’énergie solaire ». EDF a l’obligation d’acheter l’électricité solaire à un tarif supérieur à celui du marché en application du Grenelle. C’est ce soutien aux énergies vertes en application du Grenelle qui fragiliserait les comptes d’EDF. Le gouvernement a donc accepté un amendement permettant de relever la contribution au service public de l’électricité (CSPE). Cette taxe, payée par chaque consommateur, finance notamment le développement de l’électricité photovoltaïque et représente 5 % du montant total de la facture en énergie des particuliers. « L’environnement n’a pas de prix, mais il a un coût. Il faut l’assumer quand on apporte son soutien à une politique », a justifié François Baroin.

« Il faut cesser les affabulations et les approximations sur le photovoltaïque ! » s’indignent les professionnels

Les réactions des professionnels du solaire ne se sont pas fait attendre. Ainsi, le Comité de Liaison Énergies Renouvelables (CLER) [[Le Comité de Liaison Énergies Renouvelables (CLER) est une association agréée de protection de l’environnement qui fut créée en 1984. Son objet est la promotion des énergies renouvelables et de la maîtrise de l’énergie. Aujourd’hui, le CLER fédère un réseau de près de 200 professionnels répartis sur l’ensemble du territoire national. Les adhérents du réseau sont très variés : des associations (Espaces Infos Énergie – Agences de l’énergie – ADIL – PACT – Associations locales spécialistes des énergies renouvelables et/ou de l’efficacité énergétique), des entreprises (Bureaux d’étude – Consultants – Installateurs – Architectes – Exploitants – Développeurs) et des organismes publics (Organismes de formation – Collectivités territoriales – Bailleurs sociaux).]] et l’association HESPUL reviennent dans un communiqué de presse sur la question du financement de l’électricité renouvelable afin de souligner les enjeux du développement de ces filières et éclairer les zones d’ombre : « Compte tenu du mode de calcul actuel de remboursement des surcoûts, cela signifierait que près de 4 000 MW de systèmes seraient en service dans notre pays alors qu’il y en aura tout au plus 800 MW fin 2010, 5 fois moins ! Ces 4 000 MW correspondent à la « file d’attente » des projets pour lesquels une demande de raccordement a été déposée auprès d’ERDF, la filiale d’EDF qui gère les réseaux de distribution pour le compte des collectivités. Seule une faible part de ces projets sera réalisée, soit parce qu’il s’agit de demandes à visée purement spéculative, soit parce que les projets seront abandonnés. Faire comme s’ils étaient tous déjà en fonctionnement relève d’une manipulation », accusent le CLER et HESPUL. « En vérité, le photovoltaïque pèse aujourd’hui 0,75% de la facture, soit moins de 3 euros par an pour un ménage moyen. Mieux : la fameuse CSPE liée à l’obligation d’achat a été … bénéficiaire pour EDF de 670 millions d’Euros en 2009 [[Effet prix positif sur le coût des obligations d’achats, net de CSPE in Présentation résultats groupe EDF 2009]], à la plus grande satisfaction du groupe et de ses actionnaires », affirment les associations. « Il faut savoir que les fluctuations du coût de l’électricité renouvelable sont dues pour l’essentiel aux variations du prix de l’électricité sur la bourse européenne qui sert de référence au calcul de la compensation versée à EDF. Cependant, rappelle le CLER, toutes les sources d’électricité renouvelables seront rentables à plus ou moins long terme : dès aujourd’hui pour la petite hydraulique, demain pour l’éolien, d’ici quelques années pour la biomasse, le biogaz et le photovoltaïque. » « Dans le cas de ce dernier qui délivre sa production directement sur les points de consommation, le calcul du surcoût photovoltaïque par référence à un prix de gros sur un marché international très fluctuant n’est de toute évidence pas adapté. Un mode de calcul prenant pour référence le prix de détail comme en Allemagne refléterait bien mieux la réalité et réduirait immédiatement de 15 à 20% le montant de la CSPE correspondante. Quoiqu’il en soit, poursuit Le Comité de Liaison Énergies Renouvelables, la baisse rapide des coûts du photovoltaïque permettra d’atteindre la compétitivité avant 2020, ce qui garantit au consommateur le caractère temporaire de l’aide somme toutes modique qu’il apporte via les tarifs d’achat, et à la collectivité un excellent retour sur investissement à moyen terme ». Dans ce communiqué le CLER qui fédère plus de 200 professionnels s’étonne qu’ « on oublie par ailleurs de s’émouvoir d’autres dépenses qui affectent bien plus fortement les comptes d’EDF, par exemple le « Tarif Agent » qui permet aux salariés et retraités de l’entreprise de se fournir à très bas prix en électricité, une mesure financée elle aussi par les consommateurs qui a coûté en 2009 plus de 1,1 milliard d’Euros pour les seuls retraités, probablement autant pour les actifs [[Source : comptes annuels d’EDF 2009]]. De telles sommes ne seraient-elles pas bien mieux utilisées pour combattre réellement la précarité énergétique ou contribuer à rénover un réseau de distribution notoirement déficient et le préparer à devenir enfin vraiment « intelligent » ? » s’interroge la fédération. « Obsédés par une volonté systématique de dénigrement, on passe sous silence les bénéfices certains à court, moyen et long terme du développement du photovoltaïque : au-delà des 10 000 emplois créés ces dernières années dans la filière proprement dite, il faudrait aussi compter les milliers d’emplois et les centaines de millions d’Euros de chiffre d’affaires des grandes entreprises françaises qui fournissent produits et services à une industrie mondiale en pleine croissance. Si l’on veut tirer pleinement profit des efforts de recherche menés notamment par le CEA au sein de l’Institut National de l’Énergie Solaire (INES), mais aussi si l’on souhaite attirer des investissements étrangers sur notre territoire, nous avons absolument besoin d’un marché national dynamique et prévisible. Pourquoi refuser à nos entreprises la possibilité de se développer sur l’un des secteurs les plus prometteurs du siècle qui s’ouvre et accepter dans le même temps de dépenser des milliards d’Euros dans le projet ITER sans aucune perspective de production d’électricité avant plusieurs décennies ? Décidément, les pourfendeurs mal avisés du photovoltaïque feraient mieux de prendre leur calculette et de chausser des lunettes qui leur permettent de voir plus loin que le bout du nez des intérêts immédiats supposés de notre « champion national ». Faute de quoi ils contribueront à mettre de moins en moins lentement et de plus en plus sûrement notre pays hors-jeu d’un défi industriel et social parmi les plus stimulants de notre époque », concluent le Comité de Liaison Énergies Renouvelables (CLER) et l’association HESPUL.

Pour le SER, « les énergies renouvelables servent de bouc émissaire habituel »

Les professionnels du SER[[Le Syndicat des énergies renouvelables regroupe plus de 500 adhérents, représente un chiffre d’affaires de 10 milliards d’euros et plus de 80 000 emplois. Elle est l’organisation professionnelle qui regroupe les industriels de l’ensemble des filières énergies renouvelables : biomasse (FBE), bois, biocarburants, éolien (FEE), énergies marines, géothermie, hydroélectricité, pompes à chaleur, solaire photovoltaïque (SOLER), solaire thermique et thermodynamique.]] contestent le diagnostic et souhaitent rappeler les éléments de coûts qui construisent ces charges de service public de l’électricité. La Contribution au Service Public de l’Electricité (CSPE) est une taxe forfaitaire payée par le consommateur d’électricité pour payer un certain nombre de surcoûts parmi lesquels :
  • Le financement de la production d’électricité à partir de la cogénération gaz ;
  • La péréquation tarifaire (c’est-à-dire le fait que les consommateurs des DOM COM paient un tarif identique aux consommateurs métropolitains malgré un coût de production de l’électricité plus important) ;
  • Le financement des énergies renouvelables électriques ;
  • Etc.
Pour 2010, la Commission de Régulation de l’Energie rappelle que le financement des énergies renouvelables pèse pour 24 % de la taxe quand la cogénération gaz pèse 32 % et la péréquation tarifaire 41%. Historiquement, ce sont bien la péréquation tarifaire et la cogénération gaz qui captent la plus grande partie de la charge de service public de l’électricité (cf. graphique ci-dessous).
Graphique du SER
Graphique du SER
*Estimation Lorsque la CSPE ne suffit plus à couvrir les charges réelles de service public, l’opérateur historique n’est plus compensé par l’Etat par la dite taxe à la hauteur des coûts réels. C’est le cas aujourd’hui à hauteur de 1,6 milliard d’euros. C’est pourquoi, le Parlement a décidé de proposer, à juste titre, dans le cadre du projet de loi de finances, une augmentation du plafond forfaitaire de la CSPE afin qu’EDF puisse être remboursée des sommes avancées. En effet, le déficit de recouvrement a été creusé ces dernières années par les charges les plus lourdes, à savoir la péréquation tarifaire et les contrats d’achat, concernant l’électricité produite à partir de centrales de cogénération gaz. Les énergies renouvelables, si elles bénéficient d’un soutien financier à travers la CSPE, ne représentent pas aujourd’hui, à elles seules, une charge qui justifie l’augmentation de 3,2% de la facture électrique dont les médias se sont faits l’écho. En 2010, les énergies renouvelables électriques auront coûté 6,3 euros par ménage.

Les réactions politiques

Europe Ecologie : « l’alibi des renouvelables ne tient pas face aux errances nucléaires d’EDF » Pour Europe Ecologie et les Verts, cette hausse et les raisons qui sont évoquées pour la justifier, appellent plusieurs observations. « La CSPE ne représente qu’un pourcentage faible des factures d’électricité. Elle sert à compenser à EDF les surcouts engendrés par la péréquation tarifaire, l’achat des énergies renouvelables, de la cogénération et enfin de la tarification sociale. Ce qui pèse le plus sur les factures des usagers est l’augmentation du tarif de transport et distribution alors même qu’ERDF a chroniquement sous-investi dans les réseaux et qu’une part toujours plus grande de ses bénéfices remonte à la maison mère au lieu d’être investis. Cette hausse décidée à la hussarde hors des mécanismes habituels interviendrait dans un contexte de dégradation sociale lourde, où les effets de la crise économique se font toujours ressentir sur les ménages, notamment les plus fragiles équipés de chauffage électrique, et alors qu’une forte hausse avait déjà eu lieu en août 2010. Il serait par ailleurs malhonnête d’imputer cette nouvelle hausse au soutien aux énergies renouvelables. Ce sont les choix stratégiques d’EDF que vont supporter les ménages : l’entêtement dans le nucléaire, les surcoûts du chantier de l’EPR, à Flamanville, et le prolongement de centrales vétustes mais aussi les investissements hasardeux dans le nucléaire à l’étranger ». – Parti Communiste : « Contrairement aux engagements du Grenelle de l’environnement il recule sur les objectifs définis en matière de développement des énergies propres » Dans un communiqué de presse, le PCF estime que « L’Etat actionnaire à 85 % serait mieux inspiré d’alléger les contraintes financières de l’entreprise EDF en cessant de prélever près de deux milliards d’euros de dividendes par an. C’est par manque d’anticipation et d’inspiration d’une vraie politique énergétique que le gouvernement a créé une véritable bulle spéculative que connaît l’énergie solaire. Contrairement aux engagements du Grenelle de l’environnement il recule sur les objectifs définis en matière de développement des énergies propres. En effet il revient notamment sur les avantages fiscaux en réduisant de moitié le crédit d’impôt pour l’investissement des panneaux solaires mais aussi et surtout par l’augmentation des tarifs ! C’est une nouvelle fois dans le porte-monnaie des citoyens que cela va se jouer ! Tout en ne s’attaquant pas aux affairistes de tout poil spécialistes du renouvelable qui eux continueront d’empocher les plus values ! C’est d’une grande filière industrielle énergétique que la France a besoin. Le PCF dénonce également avec ses parlementaires et ses élus dont le groupe communiste à la Région le 18 octobre 2010, le projet de loi NOME qui obligera EDF à vendre ¼ de sa production nucléaire à ses concurrents et qui se traduira une nouvelle fois par des hausses de tarif pour les usagers. Les communistes sont décidés à engager le débat avec les salariés et les citoyens dans le cadre de l’élaboration d’un Programme Populaire Partagé. »

 

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David Naulinhttp://cdurable.info
Journaliste de solutions écologiques et sociales en Occitanie.

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3 Commentaires

  1. Augmentation du tarif de l’électricité : l’alibi des énergies renouvelables
    Arretez chaque fois de vous en prendre aux acquis sociaux de telles ou telles entreprises. Comparez les salaires plus le fameux tarif agent et vous verrez que même cela les salaires sont en dessous du privé.

  2. Augmentation du tarif de l’électricité : l’alibi des énergies renouvelables
    Je voudrais réagir à l’attaque du CLER contre le « tarif agent » dont bénéficient entre autres les agents d’EDF.
    Je suis agent EDF et je trouve ignoble que cette association suggère qu’on supprime ce qui est une partie de la rémunération du personnel de l’entreprise publique. Sachez messieurs que cette entreprise qui a réussi, sans l’aide du contribuable (car l’état n’a pas mis un euro dans la construction des centrales nucléaires), à procurer à la nation une électricité 35% moins chère que la moyenne européenne, elle le doit au dévouement de tous ses salariés ainsi qu’à l’intelligence de ses ingénieurs. Le fait de les rémunérer partiellement en nature, comme le font la plupart des entreprises qui vendent un produit, n’est qu’un juste retour des choses. Mais rassurez-vous, notre gouvernement qui adore dresser les citoyens les uns contre les autres (excepté pour les plus riches) pour restreindre les acquis, vous a entendus : le « tarif agent » est déjà dans le collimateur.
    Vous feriez mieux de rester dans votre domaine, celui de la protection de l’environnement où il y a beaucoup à faire, plutôt que de polluer le débat par des propos aussi malveillants et jaloux que déplacés.
    Et surtout de bien vous renseigner : l’augmentation des tarifs à venir, de 35 % justement pour rejoindre la moyenne des tarifs européens, n’est due qu’à la poussée des technocrates de Bruxelles, qui ont sommé notre gouvernement (lequel a peu résisté) d’introduire artificiellement la concurrence sur le marché de l’électricité en france, sous la menace de sanctions. Le quart de la production d’EDF va être cédée (cf. loi NOME) à des compagnies privées qui vous la revendront prochainement en prenant leur bénéfice, et surtout en augmentant progressivement les prix, jusqu’à rejoindre le fameux « prix de marché » (+ 35%!). Les efforts de l’entreprise publique et de ses prétendus agents privilégiés (par le « tarif agent » !) vont probablement être annihilés.
    Au lieu donc de vous indigner à l’encontre du personnel d’EDF vous feriez mieux de vous informer sur les conséquences désastreuses de la politique ultra-libérale de Bruxelles, contre laquelle l’état français n’a pu ou plutôt pas voulu se dresser.