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Vingt ans après sa découverte, le saola reste un mystère

Vingt ans après la découverte du saola (Pseudoryx nghetinhensis), cette nouvelle espèce d’ongulés reste plus mystérieuse et insaisissable que jamais. C’est pourquoi, le WWF, le Groupe de travail Saola, la Commission de la sauvegarde des espèces de l’UICN ainsi que la Société pour la Conservation de la Vie sauvage mettent en garde sur les dangers que font peser la chasse intensive et la gestion insuffisante des réserves sur cette espère rare qui est déjà en voie de disparition.

Une découverte d’exception A la fois très proche du bovin mais ressemblant fortement à l’antilope, cette espèce a été découverte en 1992 par une équipe conjointe du WWF et du ministère vietnamien de la foresterie. En arpentant les forêts de Vu Quang, près de la frontière entre le Vietnam et le Laos, l’équipe a trouvé un crâne avec d’inhabituelles longues cornes droites dans la maison d’un chasseur. Elle a alors compris qu’il s’agissait d’une découverte extraordinaire. En effet, le saola s’est avéré être le premier mammifère découvert au cours de ces 50 dernières années, une des découvertes zoologiques les plus surprenantes du 20e siècle et une grande nouvelle pour la science. Deux décennies plus tard, nous avons à notre disposition encore que peu d’information sur l’écologie et le comportement de cette espèce. En 2010, des villageois de la province de Bolikhamxay, au centre du Laos, ont capturé un saola, mais l’animal est mort quelques jours plus tard. Le dernier enregistrement vidéo qui a pu être fait d’un saola, provenant d’une caméra camouflée, remonte à 1999.
Copyright William Robichaud
Copyright William Robichaud
Une espèce mystérieuse menacée par la chasse illégale « Le saola est une espèce extrêmement secrète qui n’est que très rarement vue », a déclaré Nick Cox, Directeur du programme espèces du WWF Grand Mékong. « En effet, bien qu’il habite une chaîne de montagne très restreinte, il n’y a toujours aucune observation scientifique de l’animal à l’état sauvage. Les quelques saolas en captivité n’ont pas survécu ». En effet, la difficulté à détecter l’animal empêche les scientifiques de faire une estimation précise de la population. « Si tout va bien, il peut y avoir quelques centaines de saola dans la région », a déclaré William Robichaud, coordonnatrice du Groupe de travail Saola. « Au contraire, si les choses vont plutôt mal, la population peut avoisiner une dizaine d’individus ». Bien que le développement empiète de plus en plus sur son habitat forestier, la plus grande menace pour l’espèce est celle de la chasse illégale en grande partie destinée au marché très lucratif de la médecine traditionnelle chinoise. Régulièrement, les saolas sont attrapés accidentellement par des pièges métalliques fixés par les chasseurs afin d’attraper des animaux tels que le cerf Sambar, le cerf Muntjac ou les civettes. Ces espèces sont également prisées par les marchés alimentaires vietnamiens et laotiens. « Paradoxalement, le saola est l’un des rares vertébrés du Viêtnam dont le prix ne s’avère pas trop excessif » a ajouté William Robichaud, coordonnateur du Groupe de travail Saola. « La plupart des saolas pris dans les pièges le sont par accident, comme c’est le cas des dauphins qui connaissent un fort taux de mortalité en raison de la pêche au thon». Un niveau d’urgence qui nécessite des efforts croissants de conservation Depuis la découverte du saola, le Viêtnam et le Laos ont établi un réseau d’aires recouvrant l’habitat de cet animal. Aujourd’hui, certaines réserves adoptent des approches novatrices dans le but de lutter contre le braconnage endémique de l’espèce. Au sein de la Réserve Naturelle du Saola, dans la province de Thua Thien Hue au Vietnam, de nouvelles techniques de co-gestion pour la protection de la forêt, soutenues par le WWF, engendrent de bons résultats. Depuis Février 2011, la toute nouvelle équipe de gardes forestiers qui patrouille dans la réserve a retiré plus de 12 500 pièges et fermé près de 200 camps illégaux de bûcherons et de chasse. « Les gouvernements du Vietnam et du Laos ont créé des réserves dites « critiques », c’est-à-dire où les mesures de conservation sont prioritaires, cette initiative doit être félicitée », a déclaré le Dr Barney Long, spécialiste des espèces asiatiques pour le WWF États-Unis. « En augmentant les efforts qui permettent de mieux gérer la protection de l’habitat du saola et grâce aux retraits ciblés des pièges, ces aires protégées représenteront bien plus que de simples lignes tracées sur une carte ». Chris Hallam, conseiller planification de la conservation au sein du WCS Laos déclare que « si le niveau de chasse peut être considérablement réduit, nous sommes optimistes quant aux perspectives des espèces (…). Cela nécessite un apport financier qui permettrait aux patrouilles d’être davantage présentes sur le terrain dans les zones où vivent le saola mais aussi de développer des initiatives positives en faveur de la conservation de l’espèce. Ces fonds seraient également nécessaires pour réduire la demande des consommateurs pour un certain nombre de produits issus de ces animaux ». Depuis la confirmation en 2011 de l’extinction du rhinocéros de Java, autre espèce emblématique du Vietnam, la protection du saola est devenu un enjeu essentiel de conservation par son urgence. Un symbole sérieux de la biodiversité « En 2012, le saola fête son vingtième anniversaire. A moins que des mesures ne soient prises instantanément, il risque de ne plus y en avoir beaucoup » ajoute Chris Hallam. Le saola est une icône pour la biodiversité de la chaîne des Annamites qui longe la frontière du Vietnam et du Laos. Cette zone riche en biodiversité bénéficie d’une incroyable diversité d’espèces, pour la plupart rares et endémiques. En plus du saola, deux nouvelles espèces de cerf, le Muntjac à grand bois et le Muntjac du Truong Son, ont été découvertes dans les forêts de conifères de la région, respectivement en 1994 et 1997. « Dans le commerce des espèces sauvages, l’absence de demande significative pour le saola donne beaucoup d’espoir pour la conservation de l’espèce », a déclaré William Robichaud. « Cependant, il est essentiel que nous continuions à agir. L’un des animaux les plus rares et les plus distinctifs du monde est en train de glisser discrètement vers l’extinction et ce, par manque d’intérêt et de bienveillance».

 

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David Naulinhttp://cdurable.info
Journaliste de solutions écologiques et sociales en Occitanie.

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