La connaissance scientifique est suffisamment avancée et claire sur le sujet pour ne plus nous permettre de douter de la gravité de la crise écologique actuelle. Si les scientifiques s’emploient depuis bien longtemps à alerter les décideurs et l’opinion (conférence de Stockholm, Club de Rome, GIEC…), Copenhague a constitué un sérieux coup d’arrêt pour tous ceux qui l’envisageaient comme le tournant à ne pas rater pour l’humanité. L’augmentation irréversible du prix du pétrole siffle la fin de l’ère de l’énergie bon marché sans que nous ayons pour autant conscience de la dépendance énergétique de nos sociétés. Les écosystèmes, notamment océaniques, sont gravement menacés par les nuisances inhérentes à la suractivité humaine, et la question du changement climatique a fini d’inquiéter les seuls bobos. La crainte des climatologues concerne le risque actuel d’atteinte d’un seuil où la situation serait irréversible. Pour la première fois dans l’histoire de l’humanité, nous rencontrons les limites de la biosphère. Le caractère d’urgence, plus facilement associé aux thématiques sociales, s’étend à la sphère écologique.
Plus visible, la crise sociale n’est pas moins grave. Si les 30 glorieuses ont cherché à tendre vers une économie plus redistributive, depuis les années 80, on assiste à une rupture au détriment de la majorité de la population. Les inégalités sont incroyablement plus prégnant[[Voir l’étude de Thomas Friedman et de Jeffrey Sachs sur l’évolution des revenus des principaux dirigeants d’entreprises américaines et de leurs salariés]] et le renouvellement social s’épuise. Les pays en développement peinent à sortir de leur condition, et persistent dans le work in progress. Quand aux pays dits développés, ils assistent, stupéfaits, au retour de la grande pauvreté.
Ces crises écologiques et sociales ont-elles des origines communes ? Capitalisme décomplexé, ultra-libéralisme, impuissance de l’Etat, limite des organisations internationales… Les dérives de surconsommation, de gaspillage, présentés comme modèle à l’ensemble de la société[[Voir les théories de l’économiste et sociologue Torsten Veblen sur la logique d’acquisition ostentatoire de biens et services dans nos sociétés occidentales, dont le but n’est pas le seul confort, mais bien l’épanouissement social.]]>, alimentent la crise écologique, en même temps qu’elles soulignent les inégalités. Mais baisser la consommation matérielle implique un changement de modèle culturel, un changement de notre approche du progrès également…
Pour nos gouvernements, l’amélioration des conditions sociales passe par une croissance économique la plus forte possible. Pour d’autres analystes, plus la croissance sera forte, plus la crise environnementale sera proche, violente, durable, et susceptible d’entrainer dans son sillage une nouvelle crise sociale… Alors, la croissance économique est-elle la solution ou le problème ? Existe-t-il une croissance durable et quelle serait-elle ? Peut-on conserver, améliorer et diffuser nos modes de vies occidentaux ou doit-on faire des sacrifices aujourd’hui pour préserver notre avenir ?
Taxe carbone, taxe Tobin, salles d’injections : autant de mesures d’une évidente nécessité qui ne sont pourtant pas mises en œuvre. Pourquoi le populisme, l’obscurantisme et l’électoralisme, prennent-ils parfois le pas sur des décisions d’avenir et d’intérêt général, comment y remédier ? Les citoyens/consommateurs sont-ils les victimes ou les coupables ? Les médias : marchands de divertissements ou informateurs objectifs et éclairés ? Les entreprises, alliées ou adversaires de la préservation de l’environnement et du progrès social ? Le changement passe-t-il par l’incitation et la sensibilisation, ou par la contrainte ? A quand la fin d’indicateurs obsolètes (PIB) ? Fiscalité environnementale ou pouvoir d’achat ? Crise environnementale, crise sociale ou plutôt crise de sens ?
Deux histoires, deux personnalités, deux modes d’action et deux visions du présent et du futur pour une confrontation sans concession où nos deux hommes tenteront de faire émerger des solutions nouvelles.
Jean-Marc Jancovici, ingénieur de l’Ecole polytechnique, enseignant, consultant et spécialiste dans le domaine de l’énergie et du climat, il est membre du comité stratégique de la Fondation Hulot et co-rédacteur du « pacte écologique », paru avant les élections présidentielles de 2007. De 2000 à 2010, il est l’auteur et le développeur principal du Bilan Carbone® pour le compte de l’ADEME et de la Mission Interministérielle de l’Effet de Serre. Il crée en 2007 avec Alain Grandjean Carbone 4, un cabinet de conseil en stratégie carbone, leader technique sur son secteur.
Jean-Marc Borello, ancien éducateur spécialisé avant de rejoindre la Protection Judiciaire de la Jeunesse, il a également été conseiller à la Mission Interministérielle de Lutte contre les Drogues et la Toxicomanie. En 1984, avec Régine, il crée SOS Drogue International rejointe par d’autres associations, qui deviendra le Groupe SOS, dont il est aujourd’hui Délégué Général et Président du directoire. Le Groupe SOS est un groupement constitué d’associations et d’entreprises qui intervient dans les secteurs du sanitaire, social et médico-social, de l’éducation, de l’insertion, de la presse, du commerce équitable et du développement durable et qui regroupe plus de 4 000 salariés, répartis dans 250 établissements. Depuis début 2010, Jean-Marc Borello est Président et co-fondateur du Mouvement des Entrepreneurs Sociaux. Il est reconnu comme expert des questions sociales en France. Il fait partie des 100 personnalités qui vont changer le monde en 2011 selon Terra Eco.
Ce débat sera animé par Mathieu Taugourdeau, Directeur de La Manufacture Durable.
Ce rendez-vous est organisé par Ashoka et le Groupe SOS, en partenariat avec le Comité 21, Les Ateliers de la Terre, Carbone 4, Mairie de Paris, Crédit Coopératif, L’Atelier, Sciences Po Environnement, Le Réseau Français des Etudiants pour le Développement Durable.