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Une note de La Fabrique Ecologique ouverte au débat collaboratif

Commerce mondial et développement durable

Quelles nouvelles régulations à l'heure de l'urgence climatique ?

La Fabrique Ecologique rend publique sa nouvelle note issue des travaux d’un groupe co-présidé par Diane Doré et Pierre-Samuel Guedj :  » Commerce mondial et développement durable : quelles nouvelles régulations à l’heure de l’urgence climatique ?  » Au moment où les négociations sur le climat rentrent dans une phase décisive, la question de la régulation du commerce mondial mérite d’être remise sur le devant de la scène. La crise financière de 2008 a été un nouvel épisode de difficultés mettant en jeu à la fois des facteurs économiques, sociaux et environnementaux. Malgré des effets positifs indéniables sur le développement de certains pays, le commerce mondial a contribué à la croissance des émissions de gaz à effet de serre, amplifié les inégalités et accéléré la surexploitation des ressources. Le renforcement mutuel entre le développement durable et le commerce mondial constitue pourtant un des objectifs de l’Organisation Mondiale du Commerce. Mais les outils destinés à réguler ses flux, ses impacts sur les sociétés et les économies, ainsi que sur l’environnement restent très insuffisants. Au-delà de la création d’une organisation mondiale de l’environnement, qui n’est malheureusement plus aujourd’hui à l’ordre du jour, la présente note formule des propositions concrètes et opérationnelles pour renforcer les régulations du commerce mondial en faveur du développement durable et du climat.

Synthèse

Au-delà des annonces faites ces derniers mois dans le cadre de la préparation de la COP21, la crise a mis un coup d’arrêt aux engagements mondiaux des pays en faveur de l’environnement (exploitation massive des gaz de schiste aux États-Unis, au Canada, et bientôt en Allemagne, …), en dépit de signes flagrants de l’accélération de la dégradation de notre environnement. Les inégalités sociales et environnementales ont explosé partout dans le monde, pénalisant la croissance et menaçant la stabilité politique des pays. Dans un grand nombre de pays en développement, ces pressions sur l’environnement impactant fortement notamment la biodiversité et le climat cohabitent avec des enjeux sociaux majeurs : persistance de la pauvreté, problèmes liés de sous-nutrition, manque d’accès aux ressources essentielles. Quant aux citoyens des pays dits développés, la fréquence des révélations sur les drames sociaux et environnementaux générés par certaines chaînes de productions de biens de consommation (des T-shirt aux crevettes en passant par les smart phones) génère une prise de conscience grandissante des dommages majeurs qui peuvent survenir dans ces chaines de valeur mondialisées. Pour permettre la poursuite des engagements en faveur de l’environnement et du climat et faire progresser les droits sociaux, une nouvelle régulation des marchés mondiaux doit voir le jour. Elle seule permettra l’établissement d’une concurrence plus loyale dans les échanges mondiaux et de réconcilier le développement du commerce mondial avec le développement durable. Or, si pour l’OMC, organe créée en 1995 pour promouvoir le commerce mondial à la suite du GATT, la promotion du renforcement mutuel entre développement durable et commerce fait pourtant partie intégrante de ses objectifs, la réalité est plus que mitigée. Pour relever ce défi, cette note prend le parti de privilégier l’évolution d’outils existant plutôt que la création ex nihilo de nouveaux dispositifs qui en l’état des équilibres géopolitiques est illusoire, et d’exploiter des mutations à l’œuvre qui constituent de puissants vecteurs d’évolution, parmi lesquels l’émergence d’un « Homo Ethicus Numericus » et des lanceurs d’alerte. Les recommandations prioritaires qui sont formulées sont de deux ordres : – Revoir en profondeur l’OMC dans son fonctionnement, ses principes directeurs, son système de règlement des différends et mettre en œuvre le principe de cohérence ; – Développer d’autres outils de régulation, comme l’intégration d’un mécanisme de clauses abusives dans le champ contractuel du commerce international, le renforcement et l’harmonisation de la protection des lanceurs d’alerte ou l’encadrement du décret d’application de la future loi sur le devoir de vigilance des sociétés mères et donneuses d’ordre vis-à-vis de leurs filiales. Cette note est issue des travaux d’un groupe de réflexion réuni dans le cadre de La Fabrique Ecologique entre juillet 2014 et juillet 2015.

Signataires

– Alain Blogowski, Ancien Secrétaire Interministériel du Conseil National de l’Alimentation (CNA) – Diane Carillo, Chef de projet Traçabilité et Développement Durable GS1 – Alain Chapdaniel, Directeur de la Chaire Sustainable Demand-Supply Chain d’AgroParis Tech – Diane Doré, Project Manager, Direction du Développement Stratégique Asie In Vivo, Présidente du groupe de travail – Pierre-Samuel Guedj, Président Affectio Mutandi, Président de la Commission RSE du Conseil Français des Investisseurs en Afrique, Vice-président du groupe de travail – Michel -Jean Jacquot, Avocat à la cour – Catherine Lapierre, Economiste – Solenne Lhéritier, rapporteur du groupe de travail – Gabriel Marty, Project Officer, Global Agreement on climate change, rapporteur du groupe de travail – Anaëlle Roucou, Consultante junior chez Affectio Mutandi Conformément aux règles de La Fabrique Ecologique, seuls les signataires de la note sont engagés par son contenu. Leurs déclarations d’intérêts sont disponibles sur demande écrite adressée à l’association. Autres membres du groupe de travail • Pierre Commère, Directeur Pôle Produits de la mer, ADEPALE • Olivier de Carné, Directeur adjoint, Direction Chaîne Alimentaire Durable, Coop de France • Jean Luc Pelletier, Secrétaire Général de l’USIPA Personnes rencontrées dans le cadre de ces travaux – Ludivine Tamiotti, Juriste en charge des questions environnementales à l’OMC Yann Queinnec, Directeur d’Affectio Mutandi – Maylis Souque, Secrétaire Générale du PCN France – Jean Marie Paugam Président du PCN France. – Philippe Noguès, député PS du Morbihan, rapporteur de la proposition de loi sur le devoir de vigilance des entreprises vis-à-vis de leurs filiales et fournisseurs – Nayla Ajaltouni, Secrétaire Générale de l’association Ethique sur l’Etiquette Relecture Cette note a été discutée par le comité de lecture de La Fabrique Ecologique, composé de Guillaume Duval, Géraud Guibert, Marianne Greenwood, Marc-Olivier Padis, Guillaume Sainteny et Lucile Schmid. Elle a enfin été validée par le Conseil d’administration de La Fabrique Ecologique du 30 octobre 2015. Cette note sera relue par plusieurs personnalités avant sa publication définitive. Conformément aux règles de La Fabrique Ecologique, cette publication sera mise en ligne jusqu’à la fin du mois de janvier 2016 sur le site de l’association (www.lafabriqueecologique.fr) afin de recueillir l’avis et les propositions des internautes. Sa version définitive sera publiée en mars 2016.

Sommaire

I. Commerce mondial et développement durable : un bilan mitigé – A. Le nouveau visage de la mondialisation en matière de commerce mondial
  • 1. De nouveaux modes de production et d’échanges des biens et services
  • 2. L’OMC et le multilatéralisme en panne suite à l’enlisement du cycle de Doha
  • 3. La montée en puissance du bilatéralisme et des accords régionaux
  • 4. Les règles de l’OMC et des accords bilatéraux défavorables aux projets d’investissement dans les énergies renouvelables
– B. Les enjeux socio-économiques et environnementaux liés au commerce mondial
  • 1. Les conséquences de la mondialisation sur les questions sociales
  • 2. L’impact de la mondialisation sur les enjeux environnementaux
– C. Une multiplication des drames intimement liés à l’absence de régulation du Commerce International
  • 1. Rana Plaza : l’enfer de la filière textile au Bengladesh
  • 2. Production de crevettes en Thaïlande : retour de l’esclavage
  • 3. Admirables smart phones
  • 4. Quelles conséquences tirer de ces drames ?
II. Les outils actuels au service du développement durable pour réguler le commerce mondial – A. Les outils de régulation au niveau mondial
  • 1. L’OMC : le régulateur en chef du commerce mondial au service du développement durable ?
  • 2. Les Traités Bilatéraux d’Investissement, protecteurs des intérêts économiques par-dessus tout
  • 3. Les grands accords internationaux sur l’environnement, peu suivis d’effets
  • 4. Les normes « soft law » développées par les organisations internationales, un premier pas
  • 5. La multiplication des certifications
  • 6. Les accords cadre-mondiaux d’entreprises, une des réponses des grandes entreprises à la mondialisation
– B. Les outils de régulation du commerce mondial au niveau européen
  • 1. L’obligation d’un reporting extra-financier
  • 2. L’obligation de contrôle des substances chimiques (REACH)
  • 3. Le système SPG+ : les préférences commerciales communautaires au service de la promotion du développement durable dans les pays en développement
– C. Des outils spécifiques dédiés mis en œuvre au niveau français
  • 1. Adoption en cours de la loi sur le devoir de vigilance des sociétés mères et entreprises donneuses d’ordre : un parcours compliqué
  • 2. Un PCN français à la pointe
  • 3. Une plateforme RSE : lieu de dialogue et échanges de bonnes pratiques
III. Nos recommandations pour réconcilier commerce mondial et développement durable – A. Une réforme en profondeur de l’OMC pour une réelle régulation du commerce mondiale en faveur du développement durable
  • 1. Instaurer le principe de cohérence dans les textes de l’OMC
  • 2. Réformer en profondeur le fonctionnement de l’OMC pour intégrer les normes sociales et environnementales dans la régulation du commerce mondial
  • 3. Réviser en profondeur les procédures d’arbitrage de l’ORD en faveur du développement durable
– B. Les clauses juridiques : un outil au service de la RSE – C. La proposition de loi sur le devoir de vigilance des sociétés mères et donneuses d’ordre – D. Renforcer les pouvoirs de l’OIT, en le dotant de pouvoirs de contrôle et sanction – E. Mobilisation citoyenne et lanceurs d’alerte Conclusion

Introduction

La mondialisation s’est progressivement imposée et a pris pied sur tous les continents et quasiment tous les pays depuis plus de 30 ans, à la faveur des politiques libérales menées de par le monde dans de très nombreux pays. La libéralisation des échanges de biens, de services et de capitaux impulsée par le GATT[[General agreement on tarif and trade, auquel l’OMC a succédé en 1995.]] puis par l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) a été conduite avec un postulat dominant : la libéralisation des échanges et des économies dope la croissance et permet la création de richesses et le plein emploi pour le plus grand nombre. Si cette libéralisation a effectivement permis l’élévation du niveau de vie moyen d’un certain nombre de pays, la mondialisation économique actuelle a aussi créé des déséquilibres et favorisé une montée des risques, intolérable pour l’humanité à court comme à long terme. La mondialisation a aujourd’hui atteint un point critique. Elle est source de problèmes qui dépassent complètement les compétences et les capacités des États, alors que ces derniers, y compris au sein de l’Union européenne, se cantonnent encore trop souvent à une diplomatie orientée vers la satisfaction quasi exclusive de l’« intérêt national ». L’intensification des échanges commerciaux, le déploiement des firmes multinationales dans le monde au travers d’investissements directs à l’étranger et sous la forme de partenariats variés, la mobilité des capitaux et l’intégration financière, tous ces mouvements ont conduit à un très fort recul du pouvoir des États et à leur interdépendance accrue, alors qu’une réelle régulation au niveau mondial peine à émerger … La situation dans laquelle se trouve notre planète et une très grande partie de la population mondiale demeure très précaire : problème de mal- et sous-nutrition voire de famines, aggravation du problème majeur de la menace climatique, explosion des inégalités et manque d’accès aux services essentiels pour les plus démunis, non-respect des Droits de l’Homme, dégradations des écosystèmes… Ces situations n’ont fait qu’empirer suite à l’éclatement de la crise financière en 2008. Une mobilisation massive de finances publiques pour sauver des institutions financières a été mise en place, mais les outils indispensables pour prévenir de telles crises et réguler la mondialisation n’ont pas suivi. Face à cette régression du pouvoir des États et cette interdépendance, et sans réelle régulation mondiale, comment protéger les biens publics mondiaux (climat, ressources naturelles, biodiversité, environnement sain, …) et faire respecter les droits humains fondamentaux ? Aujourd’hui, la mondialisation n’a de fait jamais été autant controversée tant ses impacts négatifs sur le plan social et environnemental sont souvent dramatiques et en passe d’annihiler ses effets positifs. Les niveaux d’engagement des États diffèrent singulièrement en matière de développement durable et la mondialisation se prête au dumping social et environnemental. Ainsi l’Union européenne, qui apparait comme pionnière sur nombre d’enjeux sociaux et environnementaux, l’est parfois au détriment de sa compétitivité sur le marché mondial. Un enjeu majeur émerge alors : est-il possible de réconcilier la mondialisation le développement durable, y compris pour le volet majeur de l’action climatique ?, avec deux questions sous-jacentes : – Quels nouveaux outils ou adaptation de ceux existant seraient à même de contribuer à une régulation de la mondialisation qui favorise le développement durable ? – Comment assurer des règles de concurrence équitables au niveau mondial entre les États « a fair level playing field » pour restaurer la compétitivité de l’UE, la zone du monde qui s’impose de façon unilatérale le plus de contraintes en matière de responsabilité sociétale des entreprises (RSE) et de développement durable ? Ce rapport centrera son étude sur le lien entretenu entre le commerce mondial et le développement durable pour plusieurs raisons : – L’explosion du commerce mondial est un élément central du phénomène de mondialisation – Compte tenu du poids du commerce mondial dans l’économie mondiale, une régulation du commerce mondial intégrant les enjeux de RSE et du développement durable pourrait être un levier majeur pour articuler ces deux dimensions.

Note intégrale

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Documents joints

A PROPOS DE LA FABRIQUE ÉCOLOGIQUE

La Fabrique Écologique, fondation pluraliste et transpartisane de l’écologie, réfléchit, propose et lance des débats sur les politiques publiques et des propositions concrètes en matière d’écologie et de développement durable. Son exigence de très grande rigueur, la précision de sa méthodologie et la qualité et la diversité de son réseau d’expertise lui permettent de publier des notes considérées comme des références sur les sujets traités.

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Cyrille Souchehttp://cdurable.info
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