300 dirigeants, signataires d’une tribune publiée dans Les Échos, affirment que la CSRD est un accélérateur de la compétitivité des entreprises. Ceux qui prétendent le contraire et demandent un moratoire voire un retrait de dispositions majeures du Pacte Vert européen mettent en danger notre avenir économique, environnemental et social. Une autre tribune collective publiée dans Le Monde rappelle que les entreprises européennes ont beaucoup à perdre à ne pas anticiper les effets du changement climatique.
Tribune collective publiée dans les échos :
👨🌾 Un enjeu de soutenabilité forte
Selon Gérald Naro et Alexandre Rambaud, la perspective d’une soutenabilité forte est fondée sur l’idée que les différentes formes de capital économique, humain et naturel sont complémentaires et non interchangeables. Certaines fonctions que le nature apporte, sont irremplaçables. Il en est de même pour les humains et leurs relations au sein de la société. Inestimables.
👩🎨 Un enjeu de souveraineté
Une étude menée par EcoVadis, basée sur plus de 100 000 évaluations d’entreprises, révèle que l’Europe de l’Ouest demeure la région de tête en matière de RSE. Les entreprises françaises se situent dans le Top 5 mondial. Défendre notre souveraineté, c’est aussi établir nos propres référentiels et réglementations. A ce titre, uniformiser le pilotage de la durabilité pour les entreprises européennes est un atout majeur.
🙆♂️ Un enjeu de justice
Maintenir le cap est un enjeu de justice : les nombreuses entreprises qui se sont déjà engagées dans la démarche doivent être encouragées, au risque de favoriser l’attentisme. La mise en place de la CSRD a été judicieusement pensée par étapes, avec des logiques de seuils pour créer un effet d’entraînement vertueux. Elle doit être suivie de la CS3D sur la diligence raisonnable, définissant des exigences RSE relatives aux chaînes d’activité, pour qu’une obligation de “faire” découle d’une obligation de “dire”. Il serait dramatique de casser cette dynamique.
👷♂️ Un enjeu opérationnel
Les 5 ateliers du business model régénératif permettent de poser sa stratégie CSRD. Le RegenBMC permet en effet de cartographier les activités de l’entreprise dans ses opérations et le long de la chaîne de valeur, d’identifier les principaux acteurs de la chaîne de valeur et d’élaborer un profil de chaque acteur qui rende compte de sa taille, de son secteur, de sa localisation et de la nature de ses activités.
Les 5 ateliers du business model régénératif permettent aussi d’activer sa stratégie de durabilité en lançant de nouveaux produits, services avec son réseau de partenaires.
Une approche basée sur l’économie de la mutualité, idéale pour collaborer avec les syndicats et partenaires sociaux, engager les clients, fournisseurs et investisseurs.
NOUS SOMMES VIVANTS, le collectif de la transition écologique
Tribune collective publiée dans Le Monde :
« Les opposants à la directive CSRD oublient que les entreprises européennes ont beaucoup à perdre à ne pas anticiper les effets du changement climatique »
La véritable asphyxie vient de l’inaction, pas de la transparence.
Plusieurs membres des patronats européens tirent à boulet rouge sur la CSRD, comme s’il fallait rendre responsable des déboires de l’économie européenne cette directive à peine entrée en vigueur. Est-ce pour faire oublier les vrais responsables de la sinistrose : l’instabilité politique, les prix de l’énergie, l’atonie du marché commun, le décrochage numérique européen, la faiblesse de l’investissement et l’absence de politique industrielle coordonnée ?
Ces critiques attribuent tous les maux à la directive européenne CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive). Cette réglementation pan-européenne, qui doit s’appliquer à près de 50 000 entreprises d’ici à 2027, est accusée de multiplier les contraintes administratives, de pénaliser les PME et de nuire à leur compétitivité. On oublie bien entendu son ambitieuse finalité, en se cachant derrière le faux nez de l’horreur du reporting ; préparer une économie durable et compétitive.
En France, Michel Barnier lui-même évoque la possibilité d’un moratoire. Feint-il d’ignorer que changer une directive européenne est un exercice à contretemps ? Cela prend deux à trois ans de consultations et de négociations, sans garantie d’un résultat adapté aux besoins actuels. Pendant ce temps, les entreprises resteraient dans l’incertitude, un handicap bien plus grave qu’un cadre clair.
Faut-il rappeler que le calendrier de la CSRD est progressif et réaliste : les grandes entreprises déjà soumises à la NFRD publieront leurs premiers rapports en 2025, les autres grandes structures suivront en 2026, et les PME cotées en 2027 avec des exigences simplifiées jusqu’en 2028. L’Europe laisse à chacun le temps de s’adapter.
Les critiques soulignent encore que la CSRD imposerait des charges disproportionnées, notamment aux PME. Pourtant, la directive intègre le principe de proportionnalité. Ceux qui ont réellement fait l’effort de lire les recommandations de l’EFRAG, organisme européen consultatif chargé de détailler les modalités de l’application de la directive, savent à quel point ces règles sont souples ; les entreprises déterminent elles-mêmes la “matérialité” des sujets ESG à reporter, c’est-à-dire leur pertinence pour leur activité. Il n’y a donc pas de contrainte inutile si le sujet est jugé non matériel. De même, les PME bénéficient de modèles simplifiés et d’un accompagnement progressif.
En fait, ce n’est pas la règle qu’il faut modifier, mais son application via un réel exercice pédagogique … Pour rendre la CSRD accessible à tous, il suffit en fait de mettre à disposition des entreprises des guides pratiques sectoriels, illustrant comment déterminer la matérialité et rapporter les données clés. Ce détail permettrait de montrer la réalité de la charge déclarative ; à peine 20 % des sujets listés méritent en fait d’être reportés — cette clarification aurait le mérite de rétablir la juste mesure de cet exercice d’évaluation des risques.
Ces mesures ne demandent ni moratoire ni révision, mais un effort de coordination entre les acteurs publics et privés. Ainsi, n’écoutez pas ceux qui dramatisent la situation pour des fins qui leur sont propres. Et encourageons les organisations patronales et les chambres de commerce à répondre aux questions des entreprises sans nourrir les fantasmes et phobies administratives.
Rappelons aussi qu’à l’âge de l’intelligence générative, les plateformes numériques permettent d’ores et déjà de simplifier la collecte et l’analyse des données ESG pour faire gagner un temps précieux de reporting, allégeant d’autant la contrainte…
Les opposants à la CSRD oublient enfin que les entreprises européennes ont tout à gagner à anticiper les attentes des investisseurs et des consommateurs, de plus en plus sensibles aux critères ESG. À moyen terme, elles ont énormément à perdre à ne pas anticiper les effets du changement climatique.
Le GIEC a évalué les impacts économiques potentiels du réchauffement climatique sur le PIB mondial. Selon le rapport de 2022, une augmentation de la température mondiale de 2 °C par rapport aux niveaux préindustriels pourrait entraîner une réduction du PIB mondial de 10 % d’ici à 2100. Si nous suivons la trajectoire actuelle et que le réchauffement atteint 4 °C, les pertes pourraient atteindre 23 % du PIB mondial. Certains secteurs sont menacés à très court terme, notamment l’agro-alimentaire pour lequel 30 % des chaînes d’approvisionnement pourraient être impactés dès 2030…
L’Union Européenne commettrait une erreur historique à se défaire d’une directive qui permet de préparer son économie à la réalité de la transition. C’est aussi un formidable levier d’influence, car l’Union légifère ainsi hors de ses frontières ; plus de 5 000 entreprises américaines qui travaillent en Europe y sont soumises.
La CSRD est déjà une réussite européenne ; elle enrichit à l’échelle du continent, et au-delà, le vocabulaire commun des entreprises. La véritable asphyxie viendrait de l’inaction, pas de la transparence en matière environnementale.
À la fin de ses Mémoires, Jean Monnet, un des pères fondateurs de l’Europe, écrivait : « les hommes n’acceptent le changement que dans la nécessité et ils ne voient la nécessité que dans la crise ». La crise climatique est palpable, visible en de nombreux endroits, déjà là. La CSRD est in fine la manifestation la plus évidente du changement nécessaire que doivent entreprendre les entreprises. Il ne faut pas s’étonner que certains grincent des dents; ils commencent à entrevoir la réalité et préfèrent détourner le regard. Aidons-les à la regarder en face…
Signataires :
- Laetitia Carle, DG de Greenly, membre du board de France Digitale
- Sophie Chassat, Partner Accuracy, membre du comité gouvernance du Medef
- Joseph Choueifaty, CEO & Co-founder de Goodvest
- Rodolphe Durand, Professeur à HEC Paris, Fondateur de l’Institut S&O
- Leonid Goncharov, Co-founder & CEO Work & Go, Membre du Comex 40 du Medef
- Alexis Normand, Fondateur de Greenly, membre du comité gouvernance du Medef
- Alexis Kryceve, Associé-Fondateur HAATCH Conseil
- Dominique Turcq, (professeur à HEC, dirigeant d’entreprise, directeur associé chez McKinsey)
- Jean Moreau, Co-founder & CEO at PHENIX
- Cédric Meston, Cofounder HappyVore