Alors qu’elle représente le plus grand marché de bois au monde, l’Union Européenne a reconnu dès 2003 la nécessité d’agir contre l’exploitation illégale des forêts, dans le but de protéger les forêts menacées, la biodiversité et les écosystèmes associés, et de lutter contre le dérèglement climatique. Sept ans après, le mercredi 7 juillet 2010, une écrasante majorité d’eurodéputés (644 sur 685) a enfin voté un règlement qui vise à bannir du marché européen le bois illégal. Ce règlement a été adopté par le Conseil des ministres de l’Agriculture le 20 Octobre 2010. Cela signifie qu’à partir du 3 mars 2013, le bois illégal sera banni du marché européen. Les entreprises important du bois devront tracer leur produit pour apporter des garanties d’informations sur le pays d’origine et la légalité du bois exploité.
Le 3 mars 2013, le Règlement Bois de l’Union Européenne (RBUE), adopté le 20 octobre 2010, entrera en vigueur. Il interdit toute commercialisation de bois illégal sur le territoire européen, qu’il soit importé ou produit au sein de l’Union européenne et impose aux importateurs de mettre en place des systèmes de vigilance pour éviter son entrée sur le territoire européen. Les Etats membres devront garantir une application efficace du RBUE.
L’exploitation illégale de bois pèse lourd sur les écosystèmes forestiers, les populations locales et l’économie des pays producteurs : perte d’habitats forestiers et de leur biodiversité vitale pour les populations autochtones, perte de revenus pour le gouvernement et les populations locales [1]. En 2004, la France importait 228 000 tonnes de bois rond gabonais (sur 1 millions de tonnes exportées) [2]. La même année, l’organisation Wood Ressource International estimait que l’exploitation illégale de bois représente 50% à 70% de l’exploitation totale de bois au Gabon.
Face à ce constat, l’Union européenne a décidé de fermer ses frontières au commerce de bois illégal en adoptant le Règlement Bois de l’Union Européenne (RBUE) le 20 octobre 2010. L’UE n’est pas isolée dans cette initiative. Les Etats-Unis ont mis en place le Lacey Act qui interdit la possession et le commerce de bois illégal depuis 2008. L’Australie est également en train de réfléchir à la mise en place d’un règlement similaire au RBUE. Ces initiatives vont probablement actionner d’autres leviers afin de compléter un dispositif mondial de lutte contre le bois illégal et par conséquent de lutte contre la déforestation.
Ainsi, à partir du 3 mars 2013, il sera enfin interdit de commercialiser du bois illégal et ses produits dérivés sur le marché de l’Union européenne. Les importateurs devront vérifier le lieu de récolte des bois qu’ils commercialisent et le nom des espèces. Ils devront également s’assurer que la récolte des bois importés s’est faite dans le respect de la législation en vigueur dans les pays concernés.
« Ceux qui importent et commercialisent du bois sur le marché européen doivent tirer profit de toutes les informations mises à disposition notamment par, Interpol et le PNUE [3], pour la mise en place de leur système de vigilance [4]. En cas d’absence ou de défaillance de ces systèmes, des sanctions seront appliquées lors des contrôles mis en place par les Etats membres », explique Eglantine Goux-Cottin, chargée de mission forêt internationale à FNE.
Pour que ce règlement soit le plus efficace possible, il faut que tous les Etats membres mettent rapidement en place les mesures de contrôle. Ils doivent harmoniser les sanctions encourues pour commercialisation de bois illégal afin de ne pas créer de faille dans le système. La France est en train d’élaborer son plan de contrôle qui devra être appliqué au cours des mois et années à venir.
« Il est essentiel que les importateurs français travaillent dès à présent sur leur système de vigilance sans attendre la finalisation du plan de contrôle de la France qui devra être élaboré rapidement », explique Sébastien Genest, responsable du dossier Forêt internationale pour FNE.
Pour Bruno Genty, Président de France Nature Environnement : « La mise en place du règlement bois marque un tournant pour le commerce de bois et de ses produits dérivés sur le marché de l’Union européenne. Le chantier de la Commission européenne n’est pas achevé. Elle doit préparer une extension de la liste des produits concernés par ce règlement, en particulier les papiers imprimés. ».
– Eglantine Goux-Cottin, chargée de mission forêt - FNE : 01 44 08 64 1
"Grâce au vote du Parlement européen, l’industrie européenne du bois va devoir utiliser exclusivement du bois légal. Il est enfin mis un coup d’arrêt aux entreprises qui prospèrent grâce à l’exploitation illégale et à la destruction des forêts" déclare Jean Bakouma, responsable du pôle Forêt au WWF-France. Il souligne : "Ce règlement va aussi redonner de la compétitivité aux filières européennes. Après des années de commerce incontrôlé du bois, l’UE agit enfin pour réduire son empreinte écologique sur les forêts du monde et permettre ainsi de répondre de manière durable à la demande grandissante de produits bois et papier".
Une première étape qui favorisera l’essor de la certification
Le WWF salue la décision des députés européens d’agir contre l’exploitation illégale des forêts. Ce vote est l’aboutissement de dix ans d’efforts des principales ONG environnementales.
"Il y a un an, les ministres européens de l’Agriculture avaient échoué à s’accorder sur une loi ambitieuse. Maintenant, ils doivent montrer leur volonté d’interdire les activités illégales dans le secteur forestier en veillant à l’entière application de ces nouvelles règles et en punissant les entreprises qui ne s’y conforment pas. Toutefois, le règlement ne concerne que la dimension légale des produits et ne constitue qu’une première étape qui va faciliter l’arrivée sur le marché des produits éco-certifiés crédibles" détaille Jean Bakouma
L’Union européenne est l’un des principaux importateurs mondiaux de bois : une part importante de ces importations (16-19%) provient de l’exploitation illégale des forêts. Or la déforestation est responsable d’environ 20% des émissions de gaz à effet de serre et les forêts abritent plus de la moitié de la biodiversité terrestre. 350 millions de personnes à travers le monde dépendent intégralement des écosystèmes forestiers pour leur subsistance. L’équivalent d’un terrain de football de forêt tropicale disparaît toutes les deux secondes.
– Les points positifs : Le nouveau règlement va envoyer un signal clair au marché sur la prohibition du bois illégal. Elle devrait aussi conduire à des changements systémiques dans l’industrie du bois. Les sociétés opérant sur le marché de l’Union Européenne vont devoir établir un système de traçabilité des produits bois en aval (jusqu’au premier point de vente). De plus, les entreprises vendant du bois en Europe et les propriétaires forestiers vont devoir établir un système de traçabilité amont sur le pays d’origine et vérifier le risque de bois illégal. La combinaison des deux systèmes de traçabilté "amont-aval" aidera à assurer la légalité du bois du pays d’exploitation au dernier point de vente. Les fraudeurs pourront être sanctionnés d’une amende, proportionnelle au dommage environnemental et aux pertes économiques résultant de leur infraction. Enfin, la loi renforcera significativement le programme FLEGT, une série d’accords bilatéraux entre l’UE et les pays tropicaux, destiné à empêcher l’entrée de bois illégal sur le marché européen.
– Les points négatifs : les Etats membres se sont opposés à la proposition du parlement de créer, au niveau européen, des peines planchers et des sanctions ce qui créera des inégalités entre les différents acteurs. Entre autres insuffisances, les papiers imprimés ont été exemptés de la réglementation pour, au moins, les cinq prochaines années. Selon la Confédération Européenne des Industries du Papier, les produits imprimés importés chaque année représentent environ 3,2 milliards d’euros. Enfin, la date d’application de la loi est trop tardive, deux ans après l’entrée en vigueur, et les Etats membres se sont opposés à une modification de la Directive sur la protection de l’environnement par le droit pénal visant à ajouter l’exploitation illégale du bois et le commerce lié à la liste des crimes environnementaux qui requièrent des sanctions pénales dans l’UE.
[1] Dans le monde, 20% à 50% de l’exploitation mondiale de bois serait illégale (PNUE et Interpol 2012). L’exploitation illégale de bois se produit majoritairement dans les pays tropicaux. Au Cameroun, 50% de l’exploitation de bois serait illégale. On passe à 55% en Indonésie (Chatam House 2010) et 80% en Bolivie (Banque Mondiale, 2012).
[2] UNECE/FAO, 2006
[3] Programme des Nations Unies pour l’Environnement
[4] système de diligence raisonnée imposé par le RBUE