Le projet « Entre Deux Eaux » est à l’initiative de deux diplômés de l’Ecole supérieure de commerce de Lille (ESC lille), option management de projet, Emeline HASSENFORDER et Benjamin NOURY. « Entre Deux Eaux » est un projet de recherche itinérant au service de l’eau. Afin d’aider les porteurs de projets futurs, Emeline et Benjamin souhaitent analyser les projets de coopération transfrontalière existant dans 11 bassins hydrographiques qu’ils ont préalablement identifiés. Cette analyse leur permettra de comprendre pourquoi ces projets ont réussi ou échoué, quels ont été les obstacles et les risques à leur développement et, finalement, quelles leçons en tirer pour les projets à venir. Dans un deuxième temps, faire prendre conscience au grand public, par l’intermédiaire d’un livre présenté sous forme de carnet de voyage, de l’importance de coopérer autour des ressources en eau : économiser l’eau domestique est une chose, mais accepter que des centaines de migrants climatiques arrivent dans les pays développés parce qu’ils sont victimes de sécheresse ou d’inondation est une problématique d’une autre ampleur. Une prise de conscience facilitée par les témoignages et découvertes de ce voyage Entre Deux Eaux …
Cela fait maintenant 1 mois et demi que nous sommes partis sur la route des grands projets hydropolitiques. Nous sommes arrivés à Istanbul et avons terminé nos interviews sur le Danube. Une belle aventure… Certaines de nos rencontres ont été marquantes, et la bonté et la gentillesse gratuite des personnes sur notre chemin absolument incroyable. Il y a eu cette femme, Eva, de Bratislava, qui, après nous avoir reçus en RDV nous a emmené au marché de Noël pour nous faire goûter toutes les spécialités slovaques ; et cet homme, un turc, pas plus tard qu’hier, assis à côté de nous au café qui nous a offert les « iki çay, teşekkürler » que nous avions péniblement baragouiné en turc ; sans parler de toutes les personnes qui nous ont reçus sur leurs sofas, dans un lit ou juste par terre en couchsurfing (www.couchsurfing.com) Je voudrais donc dédier cette première newsletter à toutes ces personnes, dont la gentillesse a éclairé notre route, et à toutes les autres, qui se seront reconnues.Le Danube, fleuve le plus international…
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Ce que nous avons pu observer sur le Danube…
Le projet que nous avons sélectionné est appelé Danube Regional Project (DRP). Ce projet quinquennal (2002-2007) avait pour principal objectif de réduire la pollution par les nutriments dans le fleuve ainsi que de renforcer les capacités de l’ICPDR. Il a été une grande réussite, puisque le niveau de nutriments a diminué et nombre de bonnes pratiques ont été mises en place. Il faut surtout noter que les 18 pays composant le bassin y ont participé, et mener un projet d’une telle ampleur n’aurait peut-être pas été possible dans un autre domaine que celui de l’environnement, où les acteurs concernés sont généralement d’accord sur un enjeu commun. (www.undp-drp.org) Au niveau des populations, peu de gens se sentent malheureusement concernés par la propreté ou le partage des eaux. Il est vrai que lorsque les parisiens se baladent sur les bords de Seine, peu d’entre eux se demandent si les eaux usées qu’ils ont rejetées le matin même sont en train de défiler sous leurs yeux. Et pourtant… Le long du Danube, peu de pays sont aux normes européennes concernant le rejet des eaux usées urbaines et industrielles. Ainsi, à Budapest (voir vidéo), nous pouvons observer le long des rives des énormes bouches d’égouts se jetant directement dans le fleuve. Tandis qu’à quelques centaines de kilomètres en contrebas, nous retrouverons des plages où les gens se baignent (cf. Sous les ponts de Novi Sad…). Comment le savoir, puisque ce qui se passe en amont est en dehors de leurs frontières ? C’est là tout l’intérêt de mettre en place des actions communes, tant au niveau Ministériel qu’au niveau des populations. Depuis 5 ans, l’ICPDR a ainsi créé le « Danube Day » (www.danubeday.org) tous les ans, le 29 juin, des concerts, activités éducatives et expositions ont lieu dans tous les pays du Danube, afin que les populations célèbrent ensemble leur ressource commune. Il faut dire qu’avant d’en arriver là, les habitants du bassin du Danube en ont vu de belles : scissions (Tchécoslovaquie), guerre (Yougoslavie), régime totalitaire (Ceausescu en Roumanie)… En France, notre génération a tendance à oublier la chance que nous avons de n’avoir pas connu la guerre. Ces personnes que nous avons rencontrées, qui avaient à peine 20 ans comme Branislav et Ivana en Serbie, ont dû se cacher pour éviter les bombardements qui visaient à détruire les ponts ou les usines de traitement des eaux de leurs villes. Car, comme c’est souvent le cas, les populations subissent les conséquences des dégradations mais ne perçoivent pas nécessairement les bénéfices des projets mis en place. Nombre de projets de coopération transfrontalière, de par leur nature politique, n’arrivent pas à toucher les populations directement. Lorsque l’on part du niveau supranational, et que l’on descend l’échelle géographique, il faut une myriade d’intermédiaires avant de toucher les individus. Et plus ces intermédiaires sont nombreux, plus il est difficile de les gérer et de mesurer l’impact de leur action. Au niveau du Danube par exemple, la majorité des documents n’est pas traduite en langue locale. Or, très peu de managers de l’eau, et encore moins d’agriculteurs parlent l’anglais. Ils ne profitent donc pas des conclusions des rapports qu’ils ont pourtant participé à rédiger. Malgré ces quelques critiques, cette descente du Danube est une belle leçon de coopération, et nous espérons que vous l’aurez appréciée autant que nous. N’hésitez-pas à nous faire parvenir vos commentaires par email ou via notre site internet. Notre prochaine étape, du Tigre et de l’Euphrate, sera moins facile, car nous commençons à ressentir la barrière de la langue, et les enjeux de l’eau au Moyen-Orient sont autrement plus pimentés et conflictuels. Lors de notre prochaine newsletter (mi-février), nous verrons comment la Syrie, pourtant en aval, a réussi à négocier un accord bilatéral avec sa voisine turque. Nous nous rendrons dans la région du GAP (Grand Projet Anatolien de développement de 22 barrages et 19 usines hydroélectriques) afin de constater de nos propres yeux les résultats de cette immense entreprise. Vous pouvez d’ores et déjà voir les premières photos et vidéos de la zone en cliquant sur le lien suivant http://entre2o.free.fr En attendant, Bonne Année !