Fin avril, la Jamaïque a accueilli l’édition 2025, du Global Climate Finance Forum (GCFF), un rendez-vous international visant à rééquilibrer les flux financiers climatiques mondiaux. L‘événement a réuni investisseurs, PME climatiques et décideurs venus de plus de 15 pays. Le Forum a posé les bases pour un changement de paradigme : mobiliser le capital privé en faveur d’innovations portées par le Sud global. Marilyn Waite, Directrice Générale de Climate Finance Fund (CFF) a accepté de répondre aux 9 questions essentielles Cdurable.

Ceux qui subissent le plus les impacts du changement climatique doivent aussi être les plus proches des capitaux nécessaires pour y répondre.
Alors que le Sud global concentre la majorité de la population mondiale et la plus forte croissance des émissions, il ne perçoit que 15 % du financement climatique mondial. Le Global Climate Finance Forum (GCFF) 2025 s’est donné pour mission de réécrire cette inéquitable équation, à travers trois objectifs majeurs :
- Valoriser les solutions climatiques innovantes portées par les PME du Sud global ;
- Rééquilibrer les flux de capitaux transfrontaliers en faveur d’une finance plus juste ;
- Influencer l’agenda international à l’approche de la COP30 (10 au 21 novembre à Belém, Brésil).

Un dialogue de fond, ancrés dans la réalité des territoires
La Jamaïque est un leader en matière de financement climatique : du lancement de la première obligation contre les catastrophes climatiques à l’investissement dans les PME vertes, les énergies renouvelables et des systèmes de crédit inclusifs. Avec un accès sans visa pour 99 pays, elle incarne une conviction essentielle du GCFF : les discussions climatiques mondiales doivent avoir lieu là où la majorité mondiale peut véritablement participer.

Le forum a mis en lumière les freins systémiques à l’investissement dans les PME climatiques : taux d’intérêt prohibitifs (jusqu’à 27 %), instabilité monétaire (comme au Nigeria, où le Naira a perdu 400% de sa valeur en 4 ans), exigences excessives d’« investisseurs leaders », ou encore politiques fiscales inadaptées.
Des solutions concrètes ont émergé :
- En Inde, l’entreprise Nunam donne une seconde vie aux batteries de véhicules électriques pour créer des solutions de stockage d’énergie accessibles.
- Au Brésil, le collectif Courageous Land développe des systèmes agroforestiers innovants, mêlant reforestation, souveraineté alimentaire et emploi rural.
- En Afrique australe, Grid Africa installe des mini-réseaux solaires pour garantir l’énergie dans les zones sous-desservies.
Les visites de terrain, telles que celle de Stush in the Bush, PME jamaïcaine agro-écologique, ont permis de matérialiser les valeurs de résilience, d’inclusion et de durabilité au cœur du Forum.

Des recommandations stratégiques pour transformer la finance climatique
Matthew Samuda et d’autres ministres jamaïcains ont rappelé que les Small Island Developing States (SIDS) comme la Jamaïque sont à la fois très vulnérables aux impacts climatiques et particulièrement bien placés pour porter l’innovation climatique. Ils ont souligné les limites des mécanismes actuels de financement climatique, qui ne reconnaissent pas toujours les bénéfices systémiques et développementaux des projets du Sud. Ils ont plaidé pour la mise en place de cadres financiers plus équitables, plus réactifs, et pour des instruments comme le Blue-Green Fund permettant de mieux canaliser les capitaux publics et privés vers des solutions locales à fort impact.
Les principales recommandations issues des groupes de travail incluent :
- Adapter les instruments financiers aux réalités locales, avec des critères standardisés mais flexibles ;
- Positionner les gestionnaires de fonds locaux comme pivots des dispositifs d’investissement ;
- Renforcer la visibilité des PME climatiques via des campagnes ciblées et des outils de mise en relation investisseurs-entreprises ;
- Lancer une stratégie internationale de communication pour transformer la perception du risque dans les pays du Sud.

36 engagements pour une nouvelle ère du financement climatique
Face aux différents constats qui freinent l’accès des pays du Sud aux financements, les participants du GCFF 2025 ont pris 36 engagements concrets pour transformer durablement l’écosystème de la finance climatique. Ces engagements ne sont pas purement symboliques : ils incarnent une volonté partagée de changer les règles du jeu, en créant des solutions à la fois ambitieuses, ancrées localement et reproductibles.
Parmi les 36 engagements :
- Créer des instruments fiscaux incitatifs pour flécher l’épargne institutionnelle vers les PME climatiques ;
- Lancer des fonds mixtes innovants, gérés localement, pour dé-risquer les investissements ;
- Développer de nouveaux produits financiers adaptés (prêts à impact, plateformes de financement participatif…) ;
- Mettre en place des programmes de renforcement des capacités pour améliorer la gouvernance et la lisibilité des projets climatiques ;
- Construire une base de données transparente des PME climatiques du Sud global.
Questions Cdurable à Marilyn Waite, Directrice Générale de Climate Finance Fund (CFF)
Questions Cdurable !
ou c’est pas durable ?
Au delà des communiqués, qui ne présentent souvent que le « meilleur », et du développement durable, qui ne fait que tenter de réduire les impacts négatifs d‘une croissance volumique, nous nous intéressons aujourd’hui, 20 ans après la création de Cdurable.info, aux questions essentielles. Alors Cdurable ou pas ? 9 questions qui nous invitent à Comprendre pourquoi Agir & Coopérer avec le vivant, Cdurable !

1 – Quelle est la nature de ma relation avec le vivant ?
Ma relation avec le vivant repose sur une conscience profonde d’interdépendance. En tant qu’ingénieure, je comprends les équilibres qui rendent la vie possible. En tant que directrice d’une plateforme philanthropique, je mesure chaque jour à quel point nos systèmes économiques actuels menacent ces équilibres.
Le vivant n’est pas une ressource à exploiter, mais quelque chose de fragile et de précieux, auquel nous appartenons.
Cette conviction guide ma manière d’agir, en réorientant les flux financiers, en soutenant les projets qui régénèrent la nature.
2 – Quels sont mes besoins et choix d’alimentation ?
Je suis de préférence vegan. J’ai temporairement dévié de ce régime pendant ma grossesse, puis à nouveau depuis le début de l’allaitement. Toutefois, j’essaie autant que possible de maintenir une alimentation majoritairement végétale.
Mes motivations sont d’abord liées à la santé et à l’écologie, mais aussi à des considérations éthiques. La lecture du livre « Pourquoi nous aimons les chiens, mangeons des cochons et portons des vaches », une introduction au carnisme, a eu un impact important sur ma réflexion.

3 – Quel est mon type d’habitat actuel et idéal ?
Je vis en milieu urbain, à Issy-les-Moulineaux. C’est un cadre qui me convient, notamment parce qu’il offre un accès immédiat à plusieurs espaces verts. À cinq minutes à pied de chez moi, se trouvent trois parcs publics, dont un jardin botanique. Je considère qu’un environnement de vie idéal inclut des espaces naturels accessibles, sans nécessiter des logements très étendus, afin de préserver une empreinte écologique raisonnable.

4 – Quelle activité physique favorise mon bien-être et ma santé ?
Je suis baha’ie1, et donc ma pratique spirituelle est importante pour mon bien être et s’inscrit dans mon quotidien. Elle est parfois complétée par des moments de méditation.
La Terre n’est qu’un seul pays
Bahá’u’lláh
et tous les hommes en sont les citoyens
Je privilégie également des formes d’activités physiques douces et intégrées dans la vie de tous les jours, comme la marche ou les promenades. J’ai un chien, ce qui m’incite à sortir régulièrement, même si cela est parfois plus compliqué depuis l’arrivée de mon enfant. J’apprécie aussi les activités dynamiques comme la danse ou la Zumba, mais je ne suis pas attirée par les salles de sport.
5 – Quels savoirs m’ont permis de comprendre comment agir ?
Ma compréhension de l’action s’est construite progressivement à travers des savoirs issus de ma formation et mes expériences professionnelles dans le champ de la finance durable m’ont permis de comprendre que nos choix économiques sont déterminants. Que cela soit à titre individuel comme collectif. J’ai pris conscience de l’importance de mobiliser les outils financiers au service de la transition écologique et de la justice sociale.
Ces savoirs m’ont donné des clés pour m’engager, aligner mes choix avec mes valeurs, et accompagner d’autres acteurs dans cette même démarche.

Comment attirer des financements privés pour des projets climatiques dans les pays en développement ?
6 – Quel est le sens que je donne à mon travail ?
Je donne beaucoup de sens à mon travail. J’y consacre une grande partie de mon temps, et il me semble essentiel qu’il soit en cohérence avec mes valeurs. Je souhaite que mon activité professionnelle contribue positivement à la société et à l’environnement. C’est pourquoi j’essaie de m’aligner avec des valeurs de durabilité et d’éthique dans mon quotidien professionnel.

7 – Quelle énergie j’utilise pour mes usages et besoins ?
Je suis cliente chez Enercoop, un fournisseur d’énergie 100 % renouvelable. Il s’agit principalement d’énergie solaire. Je ne possède pas de voiture donc je me déplace exclusivement en transports en commun (métro, RER, train, bus) et à pied. Je n’ai pas encore de vélo, mais c’est une possibilité que je considère dans le futur.

8 – Quelle est mon implication personnelle pour l’intérêt général ?
Mon activité professionnelle est entièrement dédiée à l’intérêt général. Par ailleurs, je m’efforce également d’aligner mes finances personnelles avec mes valeurs, notamment en m’inspirant d’initiatives comme https://bankforgood.fr/ ou de ressources comme le livre « Activez votre argent ».
9 – Quels sont mes liens de coopération et ma participation au bien commun ?
Mes coopération se font notamment via mon travail au sein du Climate Finance Fund. Nous collaborons avec un écosystème engagé : associations, banques, coopératives, fintechs durables, gestionnaires d’actifs à impact, etc.

10 – Carte blanche : quel est le message essentiel que vous souhaitez faire passer à nos visiteurs ?
Un principe central pour moi :
chaque euro, même placé sur un compte courant, a un impact soit positif, soit négatif.
Il en va de même pour l’épargne et les dispositifs de retraite. Il est aujourd’hui possible et important d’aligner ces choix avec des valeurs de justice sociale et écologique, grâce à des outils concrets et accessibles comme BankforGood.fr
- La foi bahá’íe est une religion mondiale et indépendante. Son histoire débute en Perse en 1844. Son fondateur est Bahá’u’lláh, un noble persan qui a proclamé être le porteur d’une nouvelle révélation, un nouveau message divin, dont la finalité est d’établir l’unité des peuples de la terre. ↩︎