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La crise, jusqu’où ?

Alternatives Economiques - n°275 - Décembre 2008

L’excellent mensuel Alternatives Economiques consacre en partie son numéro de décembre 2008 à la crise économique et sociale et tente de répondre à la question jusqu’où elle va nous amener. Dans son éditorial, Philippe Frémeaux constate que « quand les indicateurs virent au rouge, quand les plans sociaux succèdent aux plans sociaux, la croissance devient à nouveau désirable à tout prix ». Pour l’éditorialiste: « Rien d’étonnant, aussi longtemps qu’une baisse de l’activité sera synonyme de chômage et de pauvreté, les politiques de développement durable apparaîtront comme un luxe de riches ». « Et pourtant », poursuit plus loin Philippe Frémeaux, « le moment n’est pas plus mauvais qu’un autre pour s’engager vraiment dans la voie d’un développement plus durable. Car une politique conséquente en la matière, outre ses effets sur l’environnement, ne manquerait pas d’avoir également des conséquences positives pour l’emploi, qu’il s’agisse d’investir massivement dans les énergies renouvelables, de développer le réseau de transports en commun ou encore de rénover le parc de logements pour en diminuer la consommation énergétique ». « Alors, pourquoi ne le fait-on pas ? » s’interroge Philippe Frémeaux. « Parce que cela supposerait d’accroître les dépenses publiques. Or, si Nicolas Sarkozy est désormais partisan d’une refondation du capitalisme, il ne s’est pas encore résolu à refonder la progressivité de l’impôt. Pourtant, il n’y a pas de mystère, on ne développera pas une économie plus écologique sans accepter un haut niveau de prélèvements. Parce qu’il faudra inciter les ménages et les entreprises à consommer et à investir de manière vertueuse; parce qu’une condition de l’acceptation d’une telle politique sera d’assurer des revenus de remplacement et une formation aux personnes contraintes de se reconvertir; parce qu’une économie plus durable donnera nécessairement plus de place aux services d’éducation, de santé, de culture ou de loisirs, au détriment de la consommation de biens et de services marchands. »

La crise, jusqu’où ? par Guillaume Duval

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Alors, la crise, jusqu’où ? Pas facile de dire de quoi demain sera fait, admet Guillaume Duval. En introduction à ce dossier, indispensable à lire pour comprendre les véritables enjeux auxquels nous sommes confrontés, il constate : la panique financière a bien été stoppée, mais si le spectre de 1929 s’est éloigné, la confiance n’est pas revenue. Produits dérivés, fonds spéculatifs, les cadavres restent probablement encore nombreux dans les placards du « système financier fantôme » construit grâce à la dérégulation financière. Lors du G20 du 15 novembre dernier, les grandes puissances ont bien annoncé leur intention d’y mettre bon ordre à l’avenir, mais il faut encore traduire ces paroles en actes. Et, en attendant, finir de purger les montagnes de mauvaises dettes entassées en toute opacité dans les paradis fiscaux. Guillaume Duval poursuit : « Surtout, l’économie réelle flanche partout: l’immobilier plonge, la consommation est en berne, l’investissement recule et le chômage repart à la hausse. La vague de défiance et le rationnement du crédit déclenchés par la panique financière ont brutalement accéléré un ralentissement économique déjà bien engagé. Parallèlement, les espoirs mis sur les pays émergents se sont envolés: nombre d’entre eux, en effet, pâtissent de la fuite des capitaux, repartis vers les pays riches, et de la baisse des exportations et du prix des matières premières causées par la récession au Nord. Résultat: les conjoncturistes pronostiquent désormais pour 2009 la plus forte récession de l’après-guerre dans les pays développés. Faillites d’entreprises et défaillances des ménages (et plus seulement des très pauvres) fragilisent de nouveau les institutions financières. Avec à la clef le risque d’un nouveau resserrement du crédit et de nouveaux besoins de recapitalisation. Une dynamique qui pourrait déboucher sur une stagnation prolongée comme dans le Japon des années 90 (voir page 70). Pourrait-on limiter l’ampleur et la durée d’une telle crise? Cela dépend surtout des politiques monétaires et budgétaires. Comme d’habitude, les pouvoirs publics américains réagissent massivement. Mais le surendettement des ménages américains est tel qu’il est peu probable que cela suffise à éviter une récession prolongée. Les autorités chinoises viennent elles aussi de lancer un plan ambitieux de soutien à la demande intérieure. Toutefois, malgré sa croissance spectaculaire, l’économie chinoise ne pèse encore que 6% de l’économie mondiale, tandis que celle des Etats-Unis en représente toujours 25% et celle de la zone euro 22%. Parallèlement le Fonds monétaire international, qui a tiré des leçons du passé, vient au secours sans barguigner des pays du Sud en difficulté. Pour l’instant, c’est surtout l’Europe qui est le maillon faible de la lutte contre la récession. Sur le plan monétaire, la Banque centrale européenne a tardé à prendre la mesure du ralentissement. Et malgré le plan de sauvetage bancaire, l’Europe n’a pas encore su s’entendre pour soutenir budgétairement l’économie réelle à la hauteur des enjeux. »L’Europe et les Etats-Unis à l’heure de la récession : Les Etats-Unis réagissent vigoureusement face à la récession. Ce n’est pas le cas, en revanche, de l’Europe qui est pourtant beaucoup moins endettée. – Bientôt un gouvernement économique européen ? : La crise financière a relancé le débat sur la nécessité d’un gouvernement économique européen. Mais celui-ci reste largement hors de portée. – La mondialisation de la crise : Chute des exportations, des investissements internationaux, du crédit…, les pays du Sud n’échappent pas à la crise. – La Chine peut-elle résister ? L’économie chinoise est moins dépendante de l’extérieur qu’il n’y paraît. Mais elle n’est pas à l’abri d’un ralentissement prononcé qui fragiliserait la légitimité du régime. D’où le plan de soutien d’envergure décidé par le gouvernement. – Avis de tempête pour les entreprises : L’assèchement du crédit fait courir un risque réel de faillite aux PME. Quant aux grandes entreprises, c’est leur fort niveau d’endettement qui pourrait les pénaliser.

Également au sommaire de ce numéro : Le capitalisme à l’assaut de nos assiettes

Parmi les autres articles proposés dans le numéro de décembre 2008 d’Alternatives Économiques, nous attirons votre attention sur : – Le dossier intitulé Le capitalisme à l’assaut de nos assiettes. Bientôt les fêtes. Une occasion de se réunir en famille autour d’un bon repas ou d’aller entre amis au restaurant. Une occasion aussi de réfléchir au contenu de nos assiettes alors que capitalisme et industrialisation transforment nos goûts et notre façon de nous nourrir. A l’instar de l’évolution observée dans d’autres secteurs, comme l’habillement, notre alimentation subit un double mouvement de diversification et d’uniformisation. Pour le meilleur parfois, pour le pire souvent. Mais aussi : – Le bois certifié s’implante en Afrique : Les premières forêts africaines certifiées pour leur gestion durable voient le jour dans le bas sin du Congo. Avec quel impact sur le terrain ? Reportage au Cameroun. – Climat : que demander au Sud ? Alors que les négociations climatiques s’ouvrent à Poznan, une étude propose des pistes pour répartir équitablement les efforts. – Un monde pas merveilleux : Apo Leong dirige l’Asia Monitor Resource Center (AMRC), une ONG hongkongaise qui milite pour les droits des travailleurs en Asie. Cette ONG est partenaire de l’association Peuples solidaires, qui lance en France la campagne « Bienvenue dans le monde (pas si) merveilleux de Disney ». – Mieux inciter au don : Les donateurs imposables bénéficient de réductions d’impôts conséquentes, mais cette politique fiscale n’est ni équitable ni suffisamment incitatrice.

 

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