L’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) a publié lundi un rapport d’expertise sur les effets sanitaires des systèmes d’éclairage utilisant des LED ; un tel travail n’avait jamais été réalisé. De par leur faible
consommation électrique et leur fort rendement, les éclairages utilisant des LED présentent des performances énergétiques de premier plan et trouvent toute leur place dans les politiques d’économie d’énergie. Leur marché est en pleine progression. Cependant, des risques liés à l’usage de certaines lampes à LED, pouvant conduire à des effets sanitaires
pour la population générale et les professionnels, ont été identifiés.
Les diodes mises sur le marché à des fins d’éclairage sont principalement caractérisées par la grande proportion de bleu dans la lumière blanche émise et par leur très forte luminance (« intensité lumineuse »). Les enjeux les plus préoccupants identifiés par l’Agence
concernent l’œil : effet toxique de la lumière bleue et risque d’éblouissement. La lumière bleue nécessaire pour obtenir des LED blanches conduit à un stress toxique pour la rétine. Les enfants sont particulièrement sensibles à ce risque, dans la mesure où leur cristallin reste en développement et ne peut assurer son rôle efficace de filtre de la lumière.
Ces nouveaux éclairages peuvent conduire à des « intensités de lumière » jusqu’à 1 000 fois plus élevées que les éclairages classiques, générant ainsi un risque d’éblouissement. Leur éclairage très directif, ainsi que la qualité de la lumière émise, peuvent par ailleurs être source d’inconfort visuel.
Dans le cadre de son expertise, et dans un contexte pionnier, l’Anses a conduit différents essais visant à évaluer les risques de ces nouveaux éclairages à l’aune de la norme européenne de sécurité photobiologique [1]. Certains de ces produits relèvent de groupes de
risques supérieurs à ceux des éclairages traditionnels, jusqu’alors accessibles par le grand public.
Dans ce contexte, l’Anses recommande que seules les LED appartenant à des groupes de risques similaires à ceux des éclairages traditionnels soient accessibles pour le grand public, les éclairages les plus à risque devant être réservés à des utilisations professionnelles dans des conditions permettant de garantir la sécurité des travailleurs.
Par ailleurs, l’Agence souligne la nécessité de diminuer les intensités lumineuses perçues, afin de limiter les risques d’éblouissement.
L’Agence recommande également d’éviter l’utilisation de sources de lumière riches en couleur bleue dans les lieux fréquentés par les enfants.
Enfin, l’Anses formule différentes recommandations relatives à l’information du consommateur, à l’évolution et la mise en œuvre des normes en vigueur et à l’acquisition de nouvelles connaissances sur les effets sanitaires des éclairages artificiels.
Vous retrouverez ci-dessous en détail les risques relevés par l’ANSES et ses recommandations. Vous pouvez également télécharger le rapport complet (282 pages) en cliquant ici et la synthèse et les conclusions Relatives à la saisine "Effets sanitaires des systèmes d’éclairage
utilisant des diodes électroluminescentes (LED)" en cliquant ici.
Les risques identifiés comme les plus préoccupants par l’Anses, tant par la gravité des dangers associés, que par la probabilité d’occurrence dans le cadre d’une généralisation de l’emploi des LED à des fins d’éclairage, sont liés aux effets photochimiques de la lumière bleue sur l’œil et à l’éblouissement. Il s’agit de risques à long terme résultant :
Risque lié à la lumière bleue
Le risque d’effet photochimique est associé à la lumière bleue. Son niveau dépend de la dose cumulée de lumière bleue à laquelle la personne a été exposée. Il résulte généralement d’expositions peu intenses répétées sur de longues durées. Des arguments issus d’observations humaines et d’études expérimentales sur des cultures cellulaires et sur différentes espèces animales convergent pour démontrer une toxicité particulière des courtes longueurs d’ondes (bleues) pour la rétine. La lumière bleue est ainsi reconnue pour
ses effets néfastes et dangereux sur la rétine, résultant d’un stress oxydatif cellulaire.
Trois populations plus particulièrement sensibles au risque ou particulièrement exposées à la lumière bleue ont été identifiées :
Risque lié à l’éblouissement
En éclairage d’intérieur, il est admis qu’une luminance supérieure à 10 000 cd/m² est visuellement gênante quelle que soit la position du luminaire dans le champ visuel. En raison notamment du caractère ponctuel de leur surface d’émission, les LED peuvent présenter des
luminances 1 000 fois plus élevées. Le niveau de rayonnement direct de ce type de source peut ainsi largement dépasser le niveau d’inconfort visuel, bien plus qu’avec les éclairages dits « classiques ».
Sur la base de la littérature scientifique existante, d’autres risques liés à l’utilisation des systèmes d’éclairage à LED, ont été évoqués et sont abordés plus largement dans le rapport et l’avis rendus par l’Agence. Cependant, des connaissances relatives à ces risques sont encore parcellaires et demande à être approfondies. L’Anses a fait une série de
recommandations visant à pallier ce manque. Au niveau européen, un groupe de travail a été mis en place par le SCENIHR afin d’évaluer
les effets sanitaires liés aux éclairages artificiels au sens large, dont les LED.
Adapter le cadre règlementaire et normatif
Considérant notamment les risques sanitaires liés à la lumière bleue émise par certains éclairages à LED, les risques d’éblouissement important induit par ces éclairages et la présence sur le marché de produits à LED à visée luminothérapeutique, de confort ou de bien être, l’Agence demande que :
Considérant que les normes en vigueur pour concevoir les installations d’éclairage à LED ne sont actuellement pas toujours appliquées par les professionnels (électriciens, éclairagistes, concepteurs d’éclairages) et que la norme de sécurité photobiologique parait insuffisamment adaptée aux éclairages à LED, l’Anses recommande :
Pour l’Anses, il est nécessaire :
Utilisation, information et traçabilité
Dès à présent et dans l’attente de la mise en œuvre d’un cadre réglementaire adapté, l’Anses recommande d’informer le consommateur des risques sanitaires liés à l’usage des systèmes d’éclairage par LED.
Considérant notamment les risques avérés d’une exposition aiguë à la lumière bleue et les incertitudes quant aux effets d’une exposition chronique à de faibles doses, ainsi que l’existence de populations sensibles à la lumière en général, l’Anses recommande :
Considérant l’existence de populations de travailleurs pouvant être exposés à des éclairages à LED de forte intensité, l’Anses préconise de développer des moyens de protection adéquats pour les travailleurs particulièrement exposés à un éclairage à LED. Considérant le manque d’informations accessibles au public concernant les éclairages à LED disponibles sur le marché, l’Anses recommande :
L’éclairage représente en France 10 % de la consommation électrique totale, soit 350 kW / h par an et par ménage. En application de la
directive européenne pour l’éco-conception, la Commission européenne a prévu une interdiction progressive de la commercialisation des lampes les plus consommatrices d’énergie. Les ampoules fluoro-compactes dites « basse consommation », ou d’autres sources d’éclairage comme les diodes électroluminescentes plus économes en énergie, ont pour vocation, à terme, à les remplacer. Ces dernières ont d’ailleurs fait l’objet d’un avis de l’Agence de l’Environnement et de la Maîtrise
de l’Energie (Ademe) en février 2010.
Les diodes électro-luminescentes sont des sources d’éclairage en plein développement technologique et économique. Utilisées depuis
de nombreuses années dans l’électronique comme sources de lumières faibles et monochromatiques pour des applications de témoins lumineux, elles trouvent aujourd’hui leur place dans des systèmes d’éclairage à part entière : feux de signalisation, éclairage portatif, feux de véhicules et éclairages domestiques d’ambiance, par exemple.
La première LED à spectre visible a été créée en 1962, émettant une intensité lumineuse extrêmement faible. La diode bleue a été inventée dans les années 90, suivie par la mise au point de la diode blanche qui a permis de nouvelles applications majeures (pour l’éclairage et les écrans de télévisions et d’ordinateurs notamment). Les premières LED blanches sont peu à peu apparues sur le marché, notamment celui de l’éclairage domestique et sont maintenant de plus en plus puissantes.
Ces éclairages, de part leur faible consommation électrique et leur fort rendement, présentent des performances énergétiques de premier plan et trouvent toute leur place dans les politiques d’économie d’énergie.
Comparées aux autres types d’éclairage, les LED présentent une meilleure efficacité énergétique (rendement). A titre d’exemple, certaines LED atteignent des rendements allant jusqu’à 100 à 150 lm/W alors que ceux des lampes à incandescence de l’ordre de 10 à 15 lm/W, ceux des lampes halogènes de 15 à 30 lm /W, et ceux des lampes fluorescentes compactes de l’ordre de 50 à 100 lm/W. La durée de vie des LED actuelle est quant à elle estimée 50 fois supérieure à celle des lampes à incandescence et 3 à 5 fois supérieure à celles des lampes fluorescentes compactes.
La technologie des LED n’est cependant pas exempte d’inconvénients, la qualité de la lumière qu’elles émettent (température et indice de rendu de couleur) n’est notamment pas toujours équivalente.
[1] Norme NF EN 62471. Cette norme s’applique aux lampes et aux appareils utilisant des lampes. Elle propose des limites
d’exposition au rayonnement de ces sources de lumière Elle s’intéresse à l’ensemble des dangers photobiologiques pour l’oeil (dangers thermiques et photochimiques) et définit 4 groupes de risques : le groupe de risque 0 (exempt de risque), le groupe de risque 1 (risque faible), le groupe de risque 2 (risque modéré) et le groupe de risque 3 (risque élevé).