Devant les caprices du climat, l’opinion s’inquiète, les climatologues ressortent les calculettes et même les Américains, qui ont pourtant refusé de signer le protocole de Kyoto, commencent à avoir mauvaise conscience. Ils ne se sont donc pas engagés à réduire les gaz à effet de serre et, comme des enfants punis, regardent fondre la glace.
Le 21 octobre, le glaciologue Peter Clark, de l’Université de l’Oregon, a annoncé dans Science que la Terre perdra encore plus vite sa calotte au Groenland et l’Antarctique sa couverture blanche. En conséquence de quoi il faut s’attendre à une remontée rapide du niveau des océans. Chaque saut du mercure, chaque tempête, chaque inondation, fait grimper l’angoisse de plusieurs degrés. En un siècle, la Terre, elle, a pris seulement 0,6°C ; mais depuis une trentaine d’années, l’augmentation de la température s’accélère. Pour trois raisons : 1) Nous avons fait décoller sur les chapeaux de roues une civilisation de consommation carburant au charbon, au pétrole, au gaz naturel, qui saturent l’atmosphère de CO2. 2) Les yeux plus gros que le ventre, nous avons entassé sur la planète des troupeaux de bovins et d’ovins qui dégagent du méthane, responsable de près de 20% de l’effet de serre. 3) Nous produisons, à cause des feux de végétation et de la dégradation des engrais azotés, du gaz hilarant qui demeure plus d’un siècle dans l’air et entre pour 2% dans le réchauffement planétaire. Pour avoir brûlé la vie par tous les bouts, serons-nous condamnés à l’enfer sur Terre ? Comme on peut le lire et le voir dans l’Atlas de la menace climatique de Frédéric Denhez (Editions Autrement, 80p. et 100 cartes, 15 €), la carte du monde sera remaniée… et les cartes à peine redistribuées, les pays du sud devenant encore plus pauvres, ceux du Nord plus fertiles. Les rendements agricoles, dans notre hémisphère, profiteront du coup de chaud, allié à l’allongement de la saison de la croissance, alors que l’hémisphère austral, déjà aride, perdra des sols arables et des sources d’eau douce. L’Amérique et la Russie auront plus de blé ou autres céréales, et deviendont le « silo à grains de l’Eurasie », prédit Denhez, ingénieur en environnement. En revanche, le riz, principale nourriture de la partie la plus pauvre de la planète, s’accommode mal des variations trop brutales du thermomètre. Outre que les habitants des côtes devront se replier dans les terres, les espèces animales et végétales méridionales remonteront vers le nord, les nordiques, elles, vers le pôle pour trouver un peu de fraîcheur. Les plus opportunistes, les espèces qui s’adaptent le mieux, non seulement tireront leur épingle du jeu, mais deviendront envahissantes au point de bouleverser tout l’écosystème. Au mépris des autochtones, plantes et animaux émigrès des tropiques de deuxième génération proliféreront sosu nos latitudes. Si elles deviennent indéracinables, ce sera le bouquet… tropical.