Alors que la démocratie représentative traverse une crise de confiance profonde, plus de 60 communes en France ont choisi une autre voie depuis les élections municipales de 2020 : celle d’une démocratie locale vivante, partagée et transformatrice. Le rapport « Prendre le pouvoir pour le partager », porté par la coopérative Fréquence Commune, documente cette aventure collective et inédite, marquée par la montée en puissance d’une alternative politique locale fondée sur une démocratie plus directe et délibérative, bien au-delà de la simple participation citoyenne.

Fruit de plus d’un an d’enquête de terrain, de 127 entretiens individuels et d’une immersion dans la réalité de 21 communes participatives, ce rapport de 290 pages donne à voir les pratiques, les défis et les apprentissages de celles et ceux qui, à l’échelle municipale, ont tenté de faire de la politique autrement. Ce rapport propose une analyse dense de 21 communes (grandes et petites) qui ont tenté, parfois avec audace, de réinventer l’action publique locale.
Assemblées citoyennes décisionnaires, conseils municipaux élargis à des non-élus, réorganisations internes plus horizontales, décisions collectives sur la fiscalité locale, l’aménagement urbain ou encore la sécurité alimentaire : autant d’expérimentations concrètes, parfois radicales, dont ce rapport tire les enseignements – sans occulter les échecs, les limites ni les tensions rencontrées.
Ce rapport est écrit par Élisabeth Dau, spécialiste des dynamiques démocratiques locales et du municipalisme depuis 15 ans, Léa Legras et Cléa Fache, toutes deux chargées d’étude au sein de la coopérative Fréquence Commune. Ces dernières ont co-fondé le projet Climate Change – Commons and Radical Democracy in Europe, un tour d’Europe de 4 mois pour aller à la rencontre d’acteur·rices sur la démocratie locale et les communs.
Réparer la démocratie depuis les territoires
Ces communes – de Vaour (Tarn) à Poitiers (Vienne) – ont transformé leurs institutions : gouvernance partagée, implication directe des habitant·es, expérimentations démocratiques ambitieuses, redistribution du pouvoir jusque dans les services municipaux. Elles se confrontent aussi aux limites du cadre légal, aux tensions politiques et aux défis d’une intercommunalité souvent opaque.
Des territoires en résistance et qui prennent soin
Dans un contexte de montée de l’extrême droite, de précarité accrue et de violences politiques, ces communes s’affirment comme des digues démocratiques. Elles réinventent le rôle des élu·es, féminisent et dépatriarcalisent la vie politique, défendent les libertés associatives et posent les bases de villes et villages-refuges.
Féminiser la politique : une autre manière d’exercer le pouvoir
Le rapport met en lumière une ambition forte portée par de nombreuses communes participatives : féminiser la politique. Il ne s’agit pas seulement d’augmenter la présence des femmes en politique, mais de transformer en profondeur les pratiques du pouvoir. Coopération, horizontalité, soin des individus et du collectif : ces principes, inspirés des luttes féministes, guident une nouvelle manière de gouverner. En intégrant les personnes minorisées, en prenant en compte les inégalités systémiques et en valorisant des formes d’organisation non patriarcales, ces communes expérimentent une démocratie plus inclusive, plus juste et profondément transformatrice.
Reprendre la main sur les ressources locales
Face aux urgences sociales, écologiques et économiques, les communes participatives ont aussi entrepris de se réapproprier les ressources de leurs territoires : eau, alimentation, terres agricoles, énergie, forêts ou patrimoine local.
Leur objectif : absorber les chocs, garantir un accès équitable, développer une économie locale et solidaire, et renforcer l’autonomie collective.

Ces initiatives s’accompagnent de pratiques démocratiques innovantes, pour politiser les arbitrages nécessaires en temps de restrictions budgétaires. Plutôt que de décider seuls dans l’urgence, les élu·es impliquent les habitant·es dans les choix cruciaux pour préserver les services publics et construire des communs durables.
Ces politiques locales ouvrent des voies concrètes vers des territoires plus justes, résilients et souverains.


Un souffle pour 2026
Ce rapport n’est ni un manuel, ni une évaluation. C’est une invitation à apprendre, s’inspirer, se relier. Dans une période où nous glissons tous les jours un peu plus dans une nuit démocratique, il montre que d’autres voies sont possibles. Tous·tes ces élu·es, ces agent·es et ces habitant·es témoignent combien le mandat des communes participatives a été un remède à l’impuissance et à la résignation. Loin d’être réservée aux grandes villes, cette capacité d’expérimentation et de réinvention humble et joyeuse, depuis les territoires, trace des pistes concrètes pour redonner de l’espoir à la démocratie locale. Un potentiel plein de promesses pour les futures mairies de 2026.

Prendre le pouvoir pour le partager – Expériences et apprentissages des communes participatives 2020–2026
Un ouvrage de Fréquence Commune (SCIC), en lien étroit avec Actions Communes, publié le 12 mai 2025.
Biographie des autrices
Élisabeth Dau
Juriste de formation, Élisabeth Dau est co-fondatrice et directrice des études et recherches de la coopérative Fréquence Commune. Spécialiste des dynamiques démocratiques locales, elle mène des recherches-actions et crée des passerelles entre mondes académiques, institutionnels, militants et coopératifs autour des enjeux démocratiques. Au ministère des Affaires étrangères, elle a coordonné des
travaux sur la gouvernance démocratique. À l’IRG, elle a animé des dialogues sur les formes de légitimité du pouvoir en Afrique et en Europe.
Spécialiste du municipalisme et des listes participatives, elle a dirigé de 2018 à 2021 le programme de recherche Municipalisme, Communs et Territoires. Elle contribue à la revue Horizons Publics et accompagne des organisations civiles et philanthropiques sur les stratégies démocratiques. En tant que conférencière, elle valorise les expériences de réinvention démocratique depuis les territoires en France
et en Europe. Elle est co-autrice du rapport Prendre le pouvoir pour le partager.
Léa Legras
Géographe et écologue de formation, Léa Legras est chargée d’études chez Fréquence Commune. Elle a contribué à la documentation de l’Assemblée citoyenne de Poitiers et co-fondé le projet Climate Change – Commons and Radical Democracy in Europe, un tour d’Europe de 4 mois pour aller à la rencontre d’acteur·rices qui tentent de se réapproprier le pouvoir et les ressources au travers de cinq leviers
d’action : les communs, le municipalisme, les assemblées citoyennes, les référendums locaux et les coopératives énergétiques. Elle est co-autrice du rapport.
Cléa Fache
Issue d’un parcours en écologie transdisciplinaire, Cléa Fache est également chargée d’études chez Fréquence Commune qu’elle a rejoint à la suite d’un tour d’Europe Climate Change – Commons and Radical Democracy in Europe qu’elle a co-créé dans une démarche de recherche engagée pour aller à la rencontre de collectifs, d’élu·es, d’habitant·es et de chercheur·ses qui expérimentent différentes formes de
démocratie radicales à travers les communs, le municipalisme, les assemblées citoyennes pour le climat, les référendums locaux et les coopératives énergétiques, dans un but de réappropriation des pouvoirs et des ressources par les habitant·es.
Elle a également contribué à la documentation de l’Assemblée citoyenne de Poitiers.
Elle est co-autrice du rapport.
La mairie est à vous en 2026 !
7èmes Rencontres Nationales des Listes Citoyennes et participatives
Poitiers du 21 au 24 août 2025
À l’approche des élections municipales 2026, le réseau Actions Communes, en partenariat avec l’association Poitiers Collectif, organise les 7èmes Rencontres Nationales des Listes Citoyennes à Poitiers, du 21 au 24 août 2025. Cet événement majeur se tiendra au Parc et aux Salons de Blossac, un lieu emblématique de la ville de Poitiers.
Objectifs des Rencontres Nationales à Poitiers
L’objectif principal de ces rencontres est de permettre à un maximum de listes citoyennes, qu’elles soient déjà constituées ou en cours de formation, de se doter des outils nécessaires pour réussir leur campagne municipale et instaurer une gouvernance partagée au sein de leur commune.
La France, avec ses 35 000 communes et plus de 500 000 élus locaux bénévoles, offre un terrain exceptionnel pour le développement de la démocratie participative et des mouvements municipalistes. Ces Rencontres Nationales sont une occasion unique de valoriser cette spécificité française et de renforcer l’engagement citoyen à l’échelle locale.
