En plus de lutter contre toutes les formes de pauvreté, d’inégalité et d’exclusion, en France et dans le monde, le Secours Catholique-Caritas France (SC-CF) milite également pour une transition écologique “juste et fraternelle” ! L’inaction est profondément injuste car ce sont les plus pauvres qui subissent le plus les effets des crises écologiques. D’où cet appel à un changement de modèle, replaçant la solidarité et la coopération au cœur de nos priorités, en rupture avec une logique fondée sur la consommation et la compétition. Daphné Chamard-Teirlinck, Responsable Transition Écologique Juste au Secours Catholique – Caritas France, a accepté de répondre aux 9 questions essentielles Cdurable.
Les 10 ans du Laudato Si‘ du Pape François
Lettre Encyclique du Pape François sur la sauvegarde de la maison commune
Ce texte, publié en 2015 appelle à protéger la planète et à lutter contre les injustices sociales. Il a marqué un tournant en engageant fortement l’Église catholique dans le débat écologique mondial, en soulignant notamment l’impact des dérèglements climatiques sur les plus pauvres.
Dans les années 2010 en particulier, a émergé dans le monde une “génération climat” prête à vivre en cohérence avec ses valeurs écologiques tant au niveau personnel que professionnel, spirituel et politique. Dans l’Église aussi, les mentalités évoluent et une voix forte émerge, portée notamment par l’élan de l’encyclique du Pape François Laudato Si’.

Vous ne savez pas comment commencer ? Essayez ces cinq moyens simples de briser la glace : géniaux pour les réseaux sociaux, les groupes de croyants ou des conversations informelles :
🌿 « La “sauvegarde de notre maison commune”, ça veut dire quoi pour toi ? »
🌍 « Si tu pouvais changer une seule chose dans la façon dont nous traitons la Terre, ça serait quoi ? »
🌱 « Sois honnête… tu as déjà parlé à une plante pour l’aider à pousser ? Tu lui as dit quoi ? Ça a marché ? »
✨ « Tu vois de l’espoir où quand il est question de climat et d’environnement ? »
📲 « Je viens d’apprendre qu’il y a plus de 50 ans, le pape Paul VI a dit qu’on avait besoin d’un changement radical pour protéger la Création. Tu savais que les papes parlent de l’environnement depuis des décennies ? »
Plusieurs mouvements, comme le Mouvement Laudato Si’, Église Verte ou Lutte et Contemplation, œuvrent pour encourager la conversion écologique, promouvoir des modes de vie plus sobres et mobiliser les communautés chrétiennes en faveur de la protection de la création et de la solidarité avec les plus vulnérables.
Une transition écologique juste et fraternelle

Le Secours Catholique-Caritas France se mobilise de son côté pour une transition écologique juste et fraternelle.
La transition écologique ne peut être juste que si elle prend en compte à la fois les limites de la planète et les droits fondamentaux des individus, en garantissant un accès équitable aux ressources vitales.
Secours Catholique-Caritas France
Cela signifie :
- d’une part, permettre à chaque être humain de vivre dignement, dans le respect des droits fondamentaux de chacun : “le plancher social”
- d’autre part, prendre en compte les limites planétaires pour préserver les ressources vitales : « plafond écologique »
L’inaction face à la transition serait injuste : ce sont toujours les plus pauvres qui subissent le plus durement les crises écologiques, la transition doit être conduite de manière équitable.
Justice sociale et engagement écologique
L’association dispose de solides atouts pour articuler justice sociale et engagement écologique : un réseau profondément ancré dans les territoires et connecté au monde, une expertise reconnue sur la pauvreté, une capacité d’expérimentation au plus près du terrain avec des modes d’actions pionniers qui ont fait leurs preuves.
La capacité du Secours Catholique-Caritas France à accompagner la dimension spirituelle est aussi une valeur ajoutée pour mobiliser et sensibiliser.
L’ancrage ultramarin et les partenaires internationaux jouent un rôle de vigies, tout comme les plus vulnérables en métropole. Diverses expériences — factures d’énergie insupportables, difficultés de mobilité, insécurité alimentaire —, témoignent des effets concrets des crises écologiques et sociales. Cela situe le SC-CF, en première ligne pour recueillir et analyser, afin d’en témoigner, voire d’interpeller.
Quelles voies pour une transition écologique juste ?
Des solutions du local à l’international
Enfin, des solutions s’inventent pour développer de nouveaux savoir-faire à tous les niveaux : agro-écologie, éco-lieux, gouvernances alternatives, mobilité en milieu rural, accès digne à l’alimentation … Ces projets, souvent construits à l’initiative des personnes concernées, et leur développement donnent lieu à des partenariats locaux, nationaux et internationaux qui renforcent le pouvoir de vivre de chacun et permettent un changement durable.

Le SC-CF continue à développer et à renforcer ses façons d’agir à tous les niveaux :
- à l’échelle locale : par exemple pour demander de développer des services de proximité, des transports en commun, anticiper les impacts des canicules, etc),
- à l’échelle nationale et internationale : notamment à travers les COP auxquelles ils participent depuis 10 ans et les études menées avec leurs partenaires internationaux.
Questions Cdurable à Daphné Chamard-Teirlinck,
Responsable Transition Écologique Juste
du Secours Catholique – Caritas France
Questions Cdurable !
ou c’est pas durable ?
Au delà des communiqués, qui ne présentent souvent que le « meilleur », et du développement durable, qui ne fait que tenter de réduire les impacts négatifs d‘une croissance volumique, nous nous intéressons aujourd’hui, 20 ans après la création de Cdurable.info, aux questions essentielles. Alors Cdurable ou pas ? 9 questions qui nous invitent à Comprendre pourquoi Agir & Coopérer avec le vivant, Cdurable !

Daphné Chamard-Teirlinck, la Responsable du département Transition Écologique Juste au Secours Catholique-Caritas France, reprend cet engagement marquant, les enjeux autour de cette transition écologique et sociale vis-à-vis des plus vulnérables et les actions nécessaires pour poursuivre cette impulsion. Elle a accepté de répondre aux neufs questions Cdurable, essentielles comme les neufs besoins fondamentaux des êtres vivants dont les humains que nous sommes …
1 – Quelle est la nature de ma relation avec le vivant ?
Je me sens profondément reliée au vivant. Pas au-dessus, pas à côté, mais pleinement dans ce tout complexe et fragile. Cette conscience me pousse à adopter une posture d’humilité : il ne s’agit pas de « gérer » ou « exploiter » ce qui m’entoure, mais d’en prendre soin, avec responsabilité. C’est une relation faite de respect, d’écoute et de réciprocité.
2 – Quels sont mes besoins et choix d’alimentation ?
Je suis en chemin. J’essaie, autant que possible, de privilégier une alimentation végétarienne, faite maison, avec des produits achetés au marché. C’est un équilibre à construire chaque jour, en fonction du temps, du budget, de l’accès. Il y a encore du progrès à faire, mais cette démarche me semble essentielle : manger autrement, c’est aussi habiter autrement le monde.
3 – Quel est mon type d’habitat actuel et idéal ?
J’habite dans un appartement récent en ville, avec pas mal d’espaces verts autour (enfin pour l’Île-de-France !). Le chauffage est assuré par géothermie, ce qui réduit considérablement ma facture énergétique. Je mesure la chance que j’ai : tout le monde ne bénéficie pas de ce confort, ni de ce type d’infrastructure.
Mon habitat idéal serait plus proche des éléments, avec une présence plus directe de la nature au quotidien.
4 – Quelle activité physique favorise mon bien-être et ma santé ?
Le vélo fait partie de mon quotidien : c’est mon mode de transport, mais aussi un moyen de m’aérer, de penser à autre chose, de respirer. Et pour apaiser l’esprit, je pratique le yoga. Cette combinaison m’aide à garder un équilibre entre mouvement et ancrage.
5 – Quels savoirs m’ont permis de comprendre comment agir ?
J’ai commencé par reposer les bases : comprendre les faits scientifiques, les ordres de grandeur, les implications. L’appropriation de la méthodologie Bilan Carbone a été un point de départ. Les vulgarisations des rapports du GIEC m’ont permis de mieux saisir les enjeux. Le donut de Kate Raworth m’a aussi profondément marquée : ce cadre économique propose de penser la prospérité humaine entre deux limites — un plancher social à ne pas franchir (droits, santé, éducation, logement…) et un plafond écologique à ne pas dépasser (climat, biodiversité, ressources…).
Le Donut de Kate Raworth est une boussole précieuse pour penser une société au service de l’humain et du vivant.
Je m’appuie aussi sur des études concrètes, comme par exemple les travaux du Réseau Action Climat sur les impacts concrets des dérèglements climatiques dans les territoires. Et je crois profondément aux savoirs issus de l’expérience : celles et ceux qui vivent dans la galère ont des choses à dire sur les ressources, les arbitrages, la débrouille. Il faut les écouter.
6 – Quel est le sens que je donne à mon travail ?
En tant que responsable de la transition écologique juste, mon travail consiste à penser et porter une écologie qui ne laisse personne de côté. J’agis à la croisée de deux urgences : sociale et écologique. Ce qui me fait tenir, c’est de sentir que je participe à un projet plus grand que moi, dans une dynamique profondément collective. L’énergie vient du groupe : chacun apporte une histoire, un angle, un engagement. On avance ensemble, parfois lentement, mais avec cohérence et détermination.
7 – Quelle énergie j’utilise pour mes usages et besoins ?
Je ne possède pas de voiture : je me déplace principalement à pied, à vélo, et en transports en commun. C’est une démarche qui correspond à mes convictions, mais aussi à mon mode de vie urbain. La marche fait pleinement partie de mon quotidien, tant professionnel que personnel. C’est une manière douce de se déplacer, qui ancre dans le réel, permet de penser et d’observer. Le vélo est un atout précieux en complément, à la fois rapide et libérateur.

8 – Quelle est mon implication personnelle pour l’intérêt général ?
Je suis engagée dans l’association de parents d’élèves et dans des démarches citoyennes à l’échelle de ma ville. Ce sont des espaces concrets où l’on peut peser sur les choix collectifs, porter les préoccupations de terrain, faire avancer les choses pas à pas.
Dans mon métier, je vois combien l’action locale, lorsqu’elle est nourrie de ce que vivent vraiment les gens, peut transformer les politiques publiques. Il ne s’agit pas seulement de représenter, mais de construire avec. Cette proximité me semble essentielle à toute transformation durable. Mais pour que cette action locale advienne, il faut bien souvent un soutien national voire international, c’est bien l’articulation de l’ensemble des échelles qui me semble passionnant.
9 – Quels sont mes liens de coopération et ma participation au bien commun ?
Je crois au croisement des savoirs : ceux des sciences, ceux des pratiques de terrain, et ceux nés de l’expérience de vie. C’est en les mettant en dialogue qu’on construit des réponses justes, solides, durables.
C’est aussi l’approche portée par le Secours Catholique, dans lequel je suis engagée : une organisation qui place au cœur de son action les personnes les plus pauvres, non comme des « bénéficiaires », mais comme actrices à part entière de la transition. La valeur ajoutée du Secours Catholique, c’est cette capacité à faire entendre les voix invisibilisées, à construire une écologie à partir des marges, et à porter une exigence de justice qui transforme les politiques autant que les imaginaires.
10 – Carte blanche : quel est le message essentiel que vous souhaitez faire passer à nos visiteurs ?
Allez à la rencontre de celles et ceux qui semblent loin de ces sujets.
Derrière les apparences, on découvre un vrai sens de l’engagement, un besoin de lien, une quête de beauté, une soif de re-connexion. Ce sont les plus précaires qui ont le plus besoin que la transition écologique advienne — et pourtant, ce sont ceux qu’on en tient le plus éloignés. Réparer cette injustice, c’est une urgence politique et humaine.