Face au dérèglement climatique, le verdict du GIEC est sans appel : il y a urgence à transformer en profondeur notre alimentation et notre modèle agricole conventionnel. Mais comment les agriculteur·rice·s peuvent-ils investir dans des modes de production plus respectueux de l’environnement lorsque l’instabilité financière et la précarité sont devenues la norme ? Le commerce équitable fait aujourd’hui la preuve de sa capacité à être un accélérateur de transitions écologique et sociale des modes de production, comme des modes de consommation. À la suite des 2nd Assises Nationales, Commerce Équitable France adresse 8 recommandations aux décideurs politiques et économiques pour accompagner le changement d’échelle du secteur.
En France, le secteur agricole et alimentaire est responsable de 30% des émissions de gaz à effet de serre. Selon le rapport du GIEC, les pays de l’OCDE doivent prioriser la promotion de systèmes agricoles capables de protéger les écosystèmes (agroforesterie, agriculture biologique, rotation des cultures…). Si les solutions existent[[D’après l’Iddri et leur scénario prospectif TYFA (Ten Years for Agroecology), l’Europe a la capacité de relever ce défi : il démontre qu’une Europe 100 % agroécologique à horizon 2050 est possible et qu’elle permettrait de répondre à la fois aux défis écologiques du climat et de la biodiversité tout en garantissant la sécurité alimentaire des Européens.]], elles ne sont pas moins complexes à mettre en œuvre. En effet, le monde agricole alerte régulièrement l’opinion publique sur le désarroi des producteurs qui dénoncent, à juste titre, l’impasse économique dans laquelle se trouve un trop grand nombre d’entre eux. Depuis quelques années, la croissance[[Depuis 2016, la vente de produits issus d’un commerce équitable origine France pour des produits du quotidien (lait, pain, fruits et légumes…) ont triplé pour atteindre 434 millions d’euros en 2018.]] du commerce équitable origine France témoigne du succès grandissant, tant chez les producteurs que chez les consommateurs, d’un modèle économique éprouvé et fonctionnel, qui permet de lever les freins au changement. Si la garantie de prix rémunérateurs et stables permet aux producteurs de vivre décemment de leur métier, cette sécurité économique est également déterminante pour leur permettre d’investir dans la transition écologique de leurs modes de production. Une étude réalisée en 2019 par Le Basic démontre comment les organisations de producteurs de lait et de légumineuses, insérés dans des filières de commerce équitable françaises, investissent dans des modes de production plus résilients. Le Commerce équitable Origine France – La vente de produits issus d’un commerce équitable origine FranceSynthèse de l’étude inédite du BASIC sur les effets du commerce équitable sur la rémunération des agriculteurs français et la transition agroécologique. – Commerce Équitable France publie une étude inédite du BASIC sur les effets du commerce équitable sur la rémunération des agriculteurs français et la transition agroécologique. Si le commerce équitable est d’abord une démarche de terrain construite par des acteurs engagés, les pouvoirs publics doivent aujourd’hui prendre part au changement d’échelle du mouvement avec des mesures ambitieuses au service de la transition écologique et sociale. C’est tout l’enjeu des 8 recommandations formulées par Commerce Equitable France (synthèse ci-après) qui doivent permettre d’accompagner l’essor des actions de tous les acteurs de la chaîne alimentaire, des producteurs aux consommateurs, en passant par les transformateurs et les distributeurs.
Synthèse des recommandations
– 1. Renforcer le cadre juridique de commerce équitable. Si la loi sur l’économie sociale et solidaire (art.94 de la loi ESS de 2014) a donné une reconnaissance légale au commerce équitable basée sur 6 engagements, elle n’impose pas aux entreprises se réclamant de pratiques de commerce équitable d’avoir recours à des labels. Sans l’obligation d’apposer un label, il est impossible, pour les consommateurs comme pour les pouvoirs publics, de s’assurer de la mise en œuvre effective des engagements exigeants du commerce équitable. – 2. Mettre en place une stratégie nationale d’éducation à la consommation responsable et équitable. La France doit se doter d’une stratégie ambitieuse et concertée d’éducation à la consommation responsable et équitable et renforcer les soutiens et les collaborations avec les acteurs de l’éducation à la consommation responsable. – 3. Mettre en place une TVA réduite pour tous les produits labelisés de commerce équitable permettant d’encourager les entreprises à proposer des produits issus du commerce équitable et ainsi d’envoyer des signaux positifs aux consommateurs. – 4. Engager les acteurs de la distribution à ne pas pratiquer de sur-marges pour les produits équitables et bio. Face à la crise sociale actuelle, il y a urgence à démocratiser l’accès des produits à haute valeur sociale et environnementale comme ceux issus du commerce équitable et de l’agriculture biologique en pratiquant une politique de marge adaptée. – 5. Adopter une Politique Agricole Commune qui rémunère les Services Environnementaux effectués par les producteurs. Les primes PAC bénéficient en priorité à de grandes fermes qui pratiquent une agriculture intensive aboutissant à des prix artificiellement bas sur certains produits. Une PAC volontariste et ambitieuse doit permettre de rémunérer le travail de tous les agriculteurs inscrit dans une transition forte de leurs modes de production. – 6. Favoriser la montée en gamme de la restauration collective avec plus de commerce équitable dans les cantines. Les pratiques d‘approvisionnement des collectivités ont un rôle majeur à jouer pour structurer des filières durables et équitables et offrir une alimentation de qualité à leurs convives. – 7. Mettre en place d’un crédit d’impôt pour accompagner les entreprises qui investissent dans la transition écologique. Les coûts induits pas la transformation des modes de production pour devenir une entreprise plus respectueuse du commerce équitable constitue un frein au changement qui doit être lever. – 8. Mettre en place un avoir fiscale pour couvrir les frais de labellisation équitable. Aujourd’hui ce sont les acteurs économiques les plus vertueux qui doivent payer des sommes considérables pour attester de la véracité de leurs bonnes pratiques. Cette démarche de labélisation pèse aussi sur la compétitivité prix des produits.Livret 8 propositions pour changer d’échelle
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