Le 11 mai, la majorité à l’Assemblé nationale votait une proposition de loi visant à interdire l’exploration et l’exploitation des gaz et huiles de schiste par la technique de la fracturation hydraulique en laissant toutefois la porte ouverte à des expérimentations en la matière. En effet, et pour reprendre les mots du Premier Ministre François Fillon « pas question de fermer la porte à des progrès technologiques qui permettraient demain d’accéder à de nouvelles ressources énergétiques ». Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l’écologie et du développement durable estimait de son côté que « cette proposition de loi est d’une importance majeure. Il s’agit de mettre en oeuvre le principe de précaution, qui a valeur constitutionnelle. […] Il y a un accord quasi général, comme à l’Assemblée nationale, pour considérer qu’il n’est pas aujourd’hui souhaitable d’explorer et d’exploiter les gaz de schiste. […] J’espère que l’unanimité se fera ».
C’est maintenant au tour du Sénat d’élargir la brèche. Mercredi dernier en effet, lors d’une réunion en commission, plusieurs amendements déposés par le centriste Claude Biwer (Meuse) ont été adoptés pour autoriser le recours à la fracturation hydraulique « à des fins scientifiques ». Pour les ONG, cette proposition de loi fait fi des conséquences catastrophiques de cette technique ainsi que de la crise climatique qui ne pourra que s’accentuer du fait de l’exploitation de ces nouvelles sources d’énergies fossiles. Cette proposition de loi soutenue par le gouvernement n’a pas été examinée jusqu’à son terme au Sénat le 1er juin dernier. Le groupe socialiste estime dans un communiqué de presse que « la faible présence des sénateurs de la majorité dans l’hémicycle a abouti à une caricature de débat. Sur l’ensemble des amendements discutés lors de l’examen de ce texte, la procédure de scrutin public a permis un moment à la majorité sénatoriale de masquer l’absence de ses membres dans l’hémicycle. Mais les conditions propices à un débat serein et constructif n’étant pas réunies, celui-ci a du être interrompu ». Dans un communiqué de presse, Agir pour l’environnement, AITEC, Amis de la Terre, ATTAC France, Comité de Liaison Energies Renouvelables, France Libertés, FSU, Greenpeace, Hespul, Réseau Action Climat, Solidaires, Une Seule Planète, WWF appellent dès lors les sénateurs à corriger le tir et interdire purement et simplement l’exploration et l’exploitation des gaz et huiles de schiste ainsi que l’utilisation de techniques d’extraction préjudiciables à l’environnement. En effet : – La fracturation hydraulique a des conséquences néfastes avérées : utilisation excessive des ressources en eau, contamination des nappes phréatiques et des sols par le cocktail chimique du liquide de fracturation, fragilisation de la roche en profondeur… Appelant à « ne pas céder à une vision catastrophiste » les sénateurs semblent oublier les nombreux accidents déjà survenus aux États-Unis ou au Canada à cause de cette technique, qui auraient dû les contraindre à appliquer pleinement le principe de précaution par une interdiction stricte de la fracturation hydraulique et de toutes autres techniques altérant l’intégrité de la roche. – Le problème entourant l’exploitation de ces nouvelles ressources ne peut se résumer à une « simple » question de technique. La crise climatique à laquelle nous faisons face impose de se tourner sans plus attendre vers la maitrise de notre consommation d’énergie et le développement massif des énergies renouvelables. Selon le Potsdam Institute for Climate Impact Research, si l’on veut éviter le pire et contenir le réchauffement global moyen bien en deçà de 2°C d’ici la fin du siècle, moins d’un quart des réserves prouvées en fossiles (pétrole, gaz et charbon) peuvent être utilisées d’ici à 2050 ! L’exploitation de ces ressources représenterait par ailleurs un frein puissant au développement des énergies renouvelables. Selon Fatih Birol, économiste en chef de l’Agence internationale de l’énergie, le boum du gaz de schiste a déjà causé une baisse de 50% des investissements dans les énergies renouvelables comme le solaire et l’éolien aux États-Unis ! Il est donc capital de stopper la fuite en avant vers les énergies fossiles au moment où un nouveau rapport du GIEC montre qu’il est possible et nécessaire que la majorité de l’énergie produite en 2050 soit d’origine renouvelable. En l’état, cette proposition de loi ignore les avertissements et propositions de nos collectifs citoyens et associations et traduit l’absence de volonté de la majorité de nos élus à enclencher la nécessaire transition énergétique. Agir pour l’environnement, AITEC, Amis de la Terre, ATTAC France, Comité de Liaison Energies Renouvelables, France Libertés, FSU, Greenpeace, Hespul, Réseau Action Climat, Solidaires, Une Seule Planète, WWF appellent l’ensemble des citoyennes et citoyens, associations, ONG et syndicats à poursuivre et étendre la mobilisation pour l’interdiction ferme et définitive de l’exploration et de l’exploitation des gaz et huiles de schiste, aussi bien en France qu’à l’étranger par les filiales d’entreprises françaises.