CONVENTION CITOYENNE POUR LE CLIMAT : LES 15 MESURES PHARES
Le projet de loi "sans filtre" du Réseau Action Climat
Il s’agit de 15 mesures, réparties dans les 5 titres du projet de loi et qui correspondent aux groupes de travail de la Convention :
- “Consommer” : Pour agir sur la consommation des Français et avoir un impact sur l’empreinte carbone, il s’agit d’interdire la publicité des produits les plus émetteurs de gaz à effet de serre et de mettre en place un système de consigne pour réemploi des emballages.
- "Se déplacer" : Limiter les émissions des transports en France - et la pollution de l’air - nécessite d’actionner plusieurs leviers : interdire la commercialisation de véhicules neufs très émetteurs, mettre en place un prêt garanti par l’Etat pour l’achat de véhicules peu polluants, supprimer les avantages fiscaux sur le gazole pour les poids lourds, réduire durablement le trafic aérien et développer un plan d’investissement massif pour le transport ferroviaire.
- “Se loger” : Pour réduire l’impact climatique du secteur du bâtiment et réduire la précarité énergétique, il s’agit de mettre en place progressivement une obligation de rénovation énergétique globale des logements et de limiter l’artificialisation des sols, en particulier le suréquipement commercial.
- “Se nourrir” : Réduire les émissions de l’agriculture et de l’alimentation implique de passer à un choix végétarien quotidien dans la restauration collective publique, de concevoir une nouvelle solidarité nationale alimentaire, de taxer les engrais chimiques et d’orienter les financements vers les élevages durables.
- “Travailler et produire” : La transition écologique demande aussi d’accompagner les transformations des entreprises et les reconversions professionnelles. Il sera nécessaire d’accompagner la reconversion des entreprises, la transformation des métiers et d’obliger les grandes entreprises à renforcer la transparence concernant leur empreinte carbone et à réduire significativement leurs émissions chaque année.
Dans le cadre de la Convention Citoyenne pour le Climat, 150 citoyens ont travaillé 9 mois pour élaborer 149 propositions pour accélérer l’action climatique de la France. La promesse du Président de la République en janvier 2020 de soumettre ces propositions « sans filtre » soit à référendum, soit au vote du Parlement, soit à application règlementaire directe, n’est pas tenue. En juin, trois propositions ont été formellement écartées et bien qu’aucun nouveau joker n’ait été établi jusqu’ici, notre analyse montre que d’autres manières sont utilisées par le Gouvernement pour retarder ou affaiblir l’ambition des propositions.
Le Réseau Action Climat demande de mettre fin à ces stratégies d’affaiblissement et de retardement pour que le projet de loi Climat France puisse véritablement contribuer à aligner la France sur une trajectoire de limitation du réchauffement à 1,5°C. Après la transmission “filtrée” du Gouvernement, ça sera aux Parlement de hausser l’ambition du projet de loi Climat.

Propositions de la Convention Citoyenne pour le Climat : du “sans filtre” aux cent filtres ? Décryptage du Réseau Action Climat.
150 citoyens ont travaillé 9 mois pour élaborer des propositions pour combler l’écart entre la trajectoire des émissions de gaz à effet de serre de la France et son objectif de -40 % des émissions en 2030. Nous avons encore tous en tête l’annonce du Président de la République en janvier de soumettre ces propositions « sans filtre » soit à référendum, soit au vote du parlement, soit à application réglementaire directe. Ensuite, en juillet, il en a déjà formellement écarté trois, qu’il a définies comme des « jokers ».
Aujourd’hui on constate que l’annonce s’écroule comme un château de cartes.
Certes officiellement aucun autre nouveau joker n’a été dégainé jusqu’ici, mais il y a bien d’autres manières pour amoindrir, retarder ou affaiblir l’ambition des propositions. Sans être exhaustif, le Réseau Action Climat a identifié une treintaine des 51 mesures qui sont pour le moment loin d’être à la hauteur de la demande des citoyens et figurent néanmoins dans la liste des mesures partiellement ou complètement mises en oeuvre sur le site de suivi du Gouvernement :
- « Le diable est dans les détails » : Afin de moderniser et de développer l’usage du train, les citoyens de la Convention Citoyenne pour le Climat demandent un plan d’investissement massif dans le transport ferroviaire de 1,1 milliard d’euros supplémentaires par an jusqu’en 2027. Les mesures adoptées par le Gouvernement dans le cadre du plan de relance ne répondent que très partiellement à cette attente. En effet, sur les 4,75 milliards d’euros annoncés, seuls 650 millions constituent de nouveaux crédits d’investissement. Les 4,1 milliards d’euros restants iront à SNCF Réseau non pas pour accélérer la modernisation du réseau, mais pour préserver les capacités d’investissement du contrat de performance et permettre de maintenir les travaux de régénération déjà programmés pour les deux prochaines années. Ce qui a été présenté comme un “plan de relance du ferroviaire” doit donc être présenté à plus juste titre comme un plan de soutien à SNCF Réseau, certes indispensable, mais insuffisant au regard des besoins d’investissements dans le train. Enfin, il faut souligner que les 650 millions d’euros de nouveaux crédits d’investissement couvrent uniquement les deux prochaines années, soit 325 millions d’euros par an pendant deux ans, bien loin des 1,1 milliard par an jusqu’en 2027 demandés par les citoyens …
- « Le grand bluff » : Via un amendement du Gouvernement, un « malus poids » a été voté dans la cadre des débats sur le Projet de loi de finances. Sauf qu’il ne s’applique qu’aux voitures de plus de 1800 kg… alors que la Convention citoyenne a proposé un seuil de 1400 kg. Ce malus ciblera ainsi moins de 3 % des voitures et ne permettra pas de freiner les ventes de SUV qui pèsent, en moyenne, 1350 kg.
- « Poker face » : Les citoyens demandent de « Sortir progressivement des avantages fiscaux sur le gazole, en échange de compensations fortes pour les transporteurs ». Sauf que les carottes sont renforcées sans même évoquer le bâton… Dans le Projet de loi de finances pour 2021, aucun amendement n’a repris la proposition de la Convention Citoyenne pour le Climat de sortir progressivement des avantages fiscaux pour les transporteurs routiers, qui se chiffrent chaque année à 1,4 milliard d’euros. Par contre, il y a deux mesures pour accorder des financements au secteur pour soutenir l’achat de poids lourds électriques et à hydrogène, à travers la mise en place de primes à l’acquisition ou à la conversion et la prolongation d’un dispositif de suramortissement.
- « Effet d’annonce » : Le plan de relance prévoit une ligne de financement pour adapter la restauration collective aux changements de la loi Egalim : seulement il s’agit de 50 millions d’euros sur 2 ans pour les cantines maternelles et élémentaires de 1500 communes… Très insuffisant par rapport aux besoins identifiés de 330 millions par an pour toute la restauration collective (crèches, maternelles, primaires, collèges, lycées, universités, hôpitaux, EHPAD), et ce, pendant 3 ans. Lors de l’examen du Projet de loi de finances 2021, les amendements visant à intégrer cette demande ont tous été rejetés.
- « Retour vers le futur » : La réduction de la TVA sur les billets de train de 10 % à 5,5 % est une des mesures de la Convention Citoyenne débattues lors du projet de loi de finances 2021. Plusieurs députés ont déposé des amendements dans ce sens qui ont été rejetés. La proposition a été adoptée mais pour le moment seulement au Sénat en première lecture et avec un avis défavorable du gouvernement. Bizarrement la proposition s’affiche dans la catégorie “déjà mises en œuvre” sur le site de suivi du Gouvernement.
Le Réseau Action Climat demande de mettre fin à ces stratégies d’affaiblissement et de retardement. Pour que le Projet de loi sur les propositions de la Convention Citoyenne pour le Climat puisse avoir une portée écologique à la hauteur de la commande politique initiale, il faut arrêter de jouer ce jeu d’illusionniste.
Le climat n’a pas de joker et personne ne pourra passer son tour face aux impacts des changements climatiques.
Qui plus est, il s’avère qu’il faudra aller bien au-delà d’une réduction des émissions de -40% en 2030 pour être aligné avec une trajectoire compatible avec l’accord de Paris sur le climat. Par rapport à ce qu’il faut faire, les propositions des citoyens sont donc un strict minimum. D’autres tentatives de réduire la voilure ne sont simplement plus acceptables.
Commentaires
Les commentaires du Réseau Action Climat concernant une trentaine parmi les 51 mesures que le Gouvernement considère comme partiellement ou complètement mises en œuvre.
– Les 51 mesures
Le décryptage
A propos du Réseau Action Climat

Le Réseau Action Climat fédère les associations impliquées dans la lutte contre le dérèglement climatique et pour une transition écologique, solidaire et équitable.
L’association
Le Réseau Action Climat, fédération d’associations nationales et locales, lutte contre les causes des changements climatiques, de l’échelle internationale à l’échelle locale.
Le Réseau Action Climat est le représentant français d’un réseau mondial et européen d’ONG, qui regroupe près de 1300 membres à travers la planète. Avec pour objectif de parler d’une seule voix pour peser davantage sur les décideurs, le Réseau Action Climat couvre de par son travail l’ensemble des secteurs responsables du dérèglement climatique : les transports, la production d’énergie, l’agriculture et l’alimentation, l’habitat, etc. Il travaille principalement à l’élaboration de mesures alternatives et ambitieuses pour lutter contre les changements climatiques et ses impacts et veille à ce que ses propositions ne portent pas atteinte à l’environnement, à la sécurité et aux droits humains.
Il reste au contraire convaincu que la lutte contre les changements climatiques est une formidable option de sortie de crise et est porteuse de cobénéfices en termes de création d’emplois, de préservation de la santé et de plus de justice sociale et de solidarité. Et c’est dans ce sens qu’il porte auprès des pouvoirs publics des mesures à la fois bonnes pour le climat mais également sources de multiples cobénéfices pour la société dans son ensemble.