Covoiturage, location de logements entre particuliers, troc, échanges, dons, espaces de travail partagés, ouverture de recycleries et de Fab Labs, l’économie du partage ne cesse de se développer en France depuis 2010. Fondée sur les échanges de biens, de services ou de connaissances entre particuliers, son succès grandissant révolutionne notre comportement de citoyen et de consommateur. Cette nouvelle note de La Fabrique Ecologique est ouverte au débat collaboratif
SYNTHESE
Cette note analyse d’abord de manière détaillée la très grande dynamique d’initiatives et d’innovations de l’économie du partage. De nouveaux lieux apparaissent (recycleries, Fab Labs, coworking), de nouvelles pratiques émergent ou se renouvellent (échange, troc, dons, vente en direct du producteur…) et de nouveaux modes de transport se développent et se réinventent (covoiturage, vélos partagés,…). De nouvelles activités voient le jour et impactent le monde économique, le marché traditionnel en est transformé et doit faire face à une nouvelle concurrence qui utilise les capacités dormantes des territoires (objets sous-utilisés, espaces non-occupés,…). L’individu n’est plus uniquement consommateur mais peut devenir lui aussi acteur et producteur de biens ou de services. L’économie du partage révèle ainsi une implication citoyenne accrue et la volonté de recréer du lien social. Elle peut être source d’externalités positives pour l’environnement, notamment grâce au développement de logiques de réutilisation des ressources, d’éco-conception et d’économie circulaire. Elle est amenée ainsi à jouer un rôle majeur pour la réappropriation des territoires par les citoyens. Face à la complexité de l’économie du partage, qui repose sur de nombreux modèles (plateformes internet, relations de proximité), l’enjeu pour les décideurs locaux est d’inscrire les initiatives des citoyens et des acteurs économiques locaux dans des dynamiques d’enrichissement mutuel. Pour permettre aux responsables locaux et aux élus de jouer ce rôle de facilitateur, cette note détaille des leviers d’actions potentiels sur la base de trois grands axes de politiques publiques : voir, faire savoir et promouvoir l’émergence des initiatives sur les territoires. – 1) Il s’agit dans un premier temps de cartographier les acteurs collaboratifs du territoire pour favoriser le partage entre toutes les organisations et les citoyens. L’objectif est de recenser les initiatives existantes afin d’appréhender le potentiel d’une dynamique de partage sur un territoire. Un centre de recherche ou une Chaire pourrait ainsi être créé afin de soutenir la connaissance des acteurs et initiatives existantes. – 2) La deuxième proposition consiste à co-construire et promouvoir les dynamiques collaboratives autour d’événements de grande ampleur. Organiser des événements récurrents tels que des Disco Soupe ou la mise en place d’un festival d’envergure peuvent favoriser l’engagement citoyen, mobiliser les énergies et engager le dialogue. – 3) Il est enfin proposé de créer une charte « Villes en partage ». La mise en place d’un label pourrait être envisagée ainsi que celle d’un comité de régulation composé des différents acteurs du partage dont la mission principale serait de veiller au bon respect de la charte. La France a la chance d’être un des pays pionniers pour l’économie du partage. Elle doit développer et valoriser cet atout, qui représente un important potentiel économique, social et environnemental, mais aussi adapter des politiques publiques afin d’encadrer ce phénomène. Cette évolution doit s’opérer sur une base locale et collaborative. Cette note est issue des travaux d’un groupe de réflexion réuni dans le cadre de La Fabrique Ecologique entre janvier et septembre 2014.Signataires
– Anne-Sophie Novel, docteur en économie, journaliste et auteure spécialisée sur l’économie collaborative, présidente du groupe de travail. – Marine Albarede, chef de projet, FING (Fondation internet nouvelle génération). – Gwendal Briand, cofondateur de Collporterre, association qui accompagne les pratiques collaboratives sur les territoires. – Marjorie Carré, responsable du développement, Forum d’Action Modernités, rapporteur du groupe de travail. – Cécile Désaunay, directrice d’études et chargée de veille, Futuribles. – Damien Demailly, coordinateur du programme Nouvelle Prospérité, Institut du développement durable et des relations internationales. – Camille Duday, étudiante en énergie et écologie territoriale, rapporteur du groupe de travail. – Emile Hooge, consultant en innovation de service et stratégie territoriale, nova7. – Régis Olagne, directeur de clientèle en charge du Développement Durable, BVA. – Maria Concetta Sangrigoli, architecte, cofondatrice de l’agence Oikos paysagistes et urbanistes. – Marie Noéline Viguié, designer de temps collaboratifs, cofondatrice de nod-A, de museomix et du Petit Fablab de Paris. Conformément aux règles de La Fabrique Ecologique, seuls les signataires de la note sont engagés par son contenu. Leurs déclarations d’intérêts sont disponibles sur demande écrite adressée à l’association. Personnes rencontrées dans le cadre de ces travaux – Michel Briand, ancien élu en charge de l’ESS à Brest Métropole Océane et numérique à la Ville de Brest, membre du Conseil National du Numérique. – Bernard Brunet, militant écologique et coopératif à Pamiers en Ariège. – Armel Le Coz, cofondateur du collectif et blog démocratieouverte.org. – April Rinne, directrice stratégie de Collaborative Lab. Relecture – Joël de Rosnay, Docteur ès Sciences, Président exécutif de Biotics International. – Marie-Louise Gourdon, Maire adjointe à la Culture, Mouans-Sartoux. – Hugues Sibille, Vice-président du Crédit Coopératif. Cette note a été discutée par le comité de lecture de La Fabrique Ecologique, composé de Guillaume Duval, Géraud Guibert, Marc-Olivier Padis, Guillaume Sainteny et Lucile Schmid. Elle a enfin été validée par le Conseil d’administration de La Fabrique Ecologique du 14 octobre 2014. Conformément aux règles de La Fabrique Ecologique, cette publication sera mise en ligne jusqu’à la fin du mois de janvier 2015 sur le site de l’association (www.lafabriqueecologique.fr) afin de recueillir l’avis et les propositions des internautes. Sa version définitive sera publiée en avril 2015.SOMMAIRE
– I. Les signes de la transformation en coursA. Des collectivités aux stratégies motrices
1. En France, quelques initiatives en pointe
2. Barcelone et les Fab Labs
3. Séoul, un gouvernement fortement proactif
B. Des collectivités aux stratégies de conciliation
1. San Francisco et le Sharing Economy Working Group
2. Sydney, une approche bienveillante de la location entre particuliers
3. Amsterdam s’adapte à l’arrivée d’Airbnb
4. Paris contrôle la nature des logements loués sur Airbnb
C. Des stratégies de blocage
D. Cette diversité de stratégies répond à une diversité des pratiques
– II. Le partage comme outil de redynamisation des territoires
A. Des pratiques qui entrent dans les habitudes des Français
1. L’économie du partage : une cible large pour des pratiques ponctuelles
2. Des pratiques diversement développées selon le type de partage et la nature des biens ou services concernés
3. Des changements de nature pérenne sur lesquelles l’engagement des entreprises traditionnelles et des élus est souhaité
B. De quoi renforcer le lien social et la capacité d’agir
1. Une confiance retrouvée
2. De nouvelles solidarités
3. Un levier d’empowerment des individus
C. De quoi améliorer le respect de l’environnement
1. Favoriser l’éco-conception des produits
2. Optimiser les modes de transport partagés
3. Capitaliser sur le bâti existant
4. Maximiser la contribution environnementale du partage
D. De quoi justifier la mobilisation des collectivités territoriales
1. Une économie qui revalorise le travail et favorise la contribution de tous à l’économie
2. Une économie qui permet de mieux utiliser des capacités dormantes en fluidifiant les échanges de pair-à-pair
3. Une économie qui doit éviter l’écueil de la Big Society et ne pas générer de nouvelles inégalités
– III. Promouvoir le partage dans la ville et les territoires
A. Proposition 1 – Cartographier les acteurs collaboratifs du territoire pour favoriser le partage entre toutes les organisations et les citoyens
B. Proposition 2 – Co-construire et promouvoir les dynamiques collaboratives autour d’évènements de grande ampleur.
C. Proposition 3 – Créer une charte « villes en partage » pour encourager l’économie collaborative.
Conclusion
Annexes
Glossaire
Pour aller plus loin
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