La croissance des marchés de droits à émettre du C02 pourrait à terme provoquer l’explosion de la plus grosse bulle financière jamais créée, affirme les Amis de la Terre aux Etats-Unis
Les Amis de la Terre Etats-Unis viennent de publier un nouveau rapport mettant en évidence les risques majeurs des marchés carbone : si elle n’est pas structurée correctement, la législation américaine en cours de discussion sur les changements climatiques pourrait mener à la création du plus gros marché mondial de produits dérivés. Très peu régulé, ce marché carbone pourrait déboucher sur des échecs équivalents à la crise actuelle des subprimes. Le rapport Subprimes carbone ? Repenser le nouveau plus grand marché de dérivés du monde, révèle que les régulations financières existantes, tout comme celles contenues dans les propositions américaines de « cap and trade », sont inadaptées pour contrôler les marchés carbone, créant ainsi un vide législatif énorme. « Les changements climatiques ont atteint un point critique, et il est impératif que le Congrès américain agisse rapidement pour mettre des solutions en place. Mais il est impératif de proposer des solutions solides, les moins risquées possibles », précise Michelle Chan, analyste politique senior aux Amis de la Terre Etats-Unis et auteur du rapport. « Si nous ne sommes pas vigilants, nous pourrions créer un marché massif de dérivés, très peu réglementé qui non seulement poserait des risques financiers, mais minerait également les efforts pour sauver le climat ». Le rapport décrit comment les leçons tirées de la crise financière actuelle s’appliquent également aux marchés du carbone, qui pourraient devenir le marchés de dérivés le plus important du monde. Il met particulièrement en garde contre le risque de « subprimes carbone », des crédits carbone risqués basés sur des projets aux compensations incomplètes (projets destinés à séquestrer ou réduire les gaz à effet de serre). Ces crédits subprimes carbone pourraient à terme ne pas réduire les gaz à effet de serre et, comme les prêts hypothécaires subprimes, ils pourraient voir leur valeur s’effondrer, alors qu’ils sont d’ores et déjà titrisés et revendus sur les marchés secondaires. Le rapport recommande donc que les législateurs incluent les marchés carbone dans les débats actuels concernant la réforme financière, et il met en garde contre la création rapide de marchés carbone sans régulation adaptée. « Il existe heureusement des façons de minimiser les risques environnementaux et financiers des marchés carbone, comme l’interdiction des mécanismes de compensation et la création d’un prix stable pour le carbone », ajoute Yann Louvel des Amis de la Terre. « Nous devons également éviter de mettre tous nos œufs dans le même panier. Bien que de nombreux Etats parlent des marchés carbone comme de la solution unique pour réduire les gaz à effet de serre, d’autres voies existent, comme la fiscalité. Tant que des règles très strictes n’encadrent pas les marchés financiers et empêchent la spéculation, leur faire confiance pour le carbone relèverait de l’aveuglement politique : en matière climatique, nous n’avons pas droit à l’erreur ». – Consulter le site des Amis de la Terre aux Etats-Unis – Télécharger le rapport en anglais Pour aller plus loin sur ce sujet, je vous conseille la lecture de l’article Une crise des subprimes carbone dans Politis N°1050 (semaine du 30 avril au 6 mai 2009. Patrick Piro constate ainsi qu’en 2008, « il s’est échangé dans l’Union européenne pour 25 milliards de quotas d’émissions. C’est peu pour le moment, mais ce marché croît ». Ainsi que le livre d’Aurélien Bernier : le Climat otage de la finance aux éditions Mille et Une Nuits.