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Une étude révolutionnaire révèle les stocks de carbone des 10 milliards d’arbres des régions sèches d’Afrique subsaharienne

147561_638132816535639894.png En plus de stocker du carbone, les arbres en zones sèches fournissent de nombreux services écosystémiques indispensables à l’environnement et aux populations locales. Très dispersés, leur étude à grande échelle est compliquée. C’est pourquoi une collaboration pilotée par la Nasa et l’université de Copenhague, impliquant INRAE, le CEA et le CNRS, a mis au point une méthode de suivi combinant images satellitaires de très haute résolution et intelligence artificielle. Cette innovation a permis d’estimer les caractéristiques de plus 9,9 milliards d’arbres situés en Afrique subsaharienne, ainsi que leur quantité de carbone stockée, évaluée à 0,84 milliard de tonnes. En comparaison, le carbone stocké par les forêts françaises est estimé à 2,4 milliards de tonnes. Les chercheurs montrent que cette valeur ainsi que la densité des arbres dispersés sont sous-estimés dans la plupart des modèles de végétation utilisés dans les simulations du climat. Publiée dans Nature au moment du One Forest Summit au Gabon, cette étude met à disposition une base de données sur ces arbres, contenant des informations essentielles pour les acteurs travaillant à la restauration des forêts, ainsi que pour les agriculteurs qui peuvent estimer les stocks de carbone de leurs terres.
Une étude révolutionnaire révèle les stocks de carbone des 10 milliards d’arbres des régions sèches d’Afrique subsaharienne
Une étude révolutionnaire révèle les stocks de carbone des 10 milliards d’arbres des régions sèches d’Afrique subsaharienne
Les arbres situés en zones sèches stockent du carbone, fournissent des services écosystémiques précieux et soutiennent les moyens de subsistance des populations locales en fournissant du bois, une protection contre l’érosion et la dégradation du sol, de l’ombre, et en contribuant à la biodiversité… Connaître leur distribution, leurs stocks de carbone, leur densité est essentiel pour la protection écologique, l’atténuation du changement climatique et la restauration des écosystèmes des zones sèches. Mais ces informations sont mal connues car ces arbres poussent de manière isolée et ont une densité et une taille très variable. Les techniques de surveillance des écosystèmes forestiers à l’échelle globale actuellement utilisées ne disposent pas d’une résolution suffisante pour reconnaître directement ces arbres sur les images. Par conséquence, s’il existe des études à un niveau très local pour les zones arides, à plus grande échelle les informations sont dérivées de cartes mondiales, qui n’ont pas été bien validées pour ces zones.

Une méthodologie innovante combinant imagerie à haute résolution spatiale et intelligence artificielle

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Afin de pouvoir analyser chaque arbre individuellement, les scientifiques ont donc dû développer une méthode combinant intelligence artificielle (IA) associée au calcul haute performance, imagerie à haute résolution spatiale (50 cm) et données de terrain. Ces données de terrain ont permis de calibrer les paramètres de structure des arbres (hauteur, surface de la couronne, biomasse, etc.). Les chercheurs ont ainsi analysé plus de 300 000 images satellites d’Afrique subsaharienne (région semi-aride au nord de l’équateur) et identifié plus de 9,9 milliards d’arbres. Ils ont alors attribué, pour chaque arbre, le stock de carbone associé à chacune de ses composantes (bois, feuilles, racines), ainsi que sa densité, sa couverture, sa taille et sa masse.


<blockquote>Selon <strong>Pierre Hiernaux, chercheur français travaillant pour la Nasa</strong> et consultant pour Pastorialisme Conseil, qui a apporté les données sur les arbres nécessaires à l’étude, « <em>la haute résolution spatiale (50 cm) combinée à l’IA et aux mesures sur le terrain, utilisée dans cette étude, est la clé de l’amélioration des inventaires d’arbres dans les zones sèches. La disponibilité sans cesse croissante d’images satellitaires à très haute résolution rendra possible l’évaluation des réservoirs de carbone et de leur dynamique au niveau de chaque arbre à une échelle globale</em>. »</blockquote>


<h2>La densité et les stocks de carbone des arbres en zone-aride est sous-estimée</h2>


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Comparison of different aboveground carbon-density maps.
Les stocks de carbone des arbres individuels varient entre 63 kg en moyenne par arbre dans la zone aride à 98 kg dans la zone subhumide (zone dotée d’un climat intermédiaire entre semi-aride et humide). Le carbone de la totalité des arbres identifiés dans ces zones d’Afrique subsaharienne est donc de 0,84 milliard de tonnes. Pour comparaison, les stocks de la forêt en France métropolitaine représentent 2,4 milliards de tonnes. Si ce chiffre peut paraître faible, les comparaisons avec des simulations numériques de modèles de végétation ont révélé que la densité et les stocks de carbone des arbres isolés en zone aride sont sous-estimés par la plupart des modèles utilisés dans les simulations du climat.
Pour Jean-Pierre Wigneron, chercheur INRAE de l’unité Interactions sol plantes atmosphère et coauteur de l’étude, « cette étude est exceptionnelle car elle est pionnière dans un type d’approche qui va révolutionner le suivi des arbres et des forêts à l’échelle de notre planète : à court terme il va devenir possible de cartographier les arbres de la planète depuis le centre de l’Amazonie jusqu’à nos cours d’école. Beaucoup de champs d’applications vont devenir beaucoup plus efficaces et précis : suivi des stocks de carbone, biodiversité, monitoring des coupes, protection vis-à-vis des dégradations forestières illégales, etc., en quasi temps réel. »
La base de données de ces près de 10 milliards d’arbres est désormais mise à disposition publiquement. Elle comprend pour chaque arbre la masse de bois, la masse de feuillage, la masse de racines et le stock de carbone. Ces informations sont essentielles pour les scientifiques, les décideurs, les agronomes et forestiers travaillant à la restauration des terres arides, mais aussi pour les agriculteurs, qui peuvent utiliser ces données pour estimer et valoriser les stocks de carbone des arbres des terres qu’ils exploitent. En particulier, l’inclusion de ces données dans les modèles dynamiques de végétation pourrait améliorer les résultats des modélisations futures, conduisant à des prévisions plus réalistes de l’impact du changement climatique sur les zones sèches. L’étape suivante consistera à ajouter une dimension temporelle à la cartographie, qui pourrait être possible au moins à un pas de temps décennal à l’échelle de l’arbre. Cela facilitera la prise en compte de l’impact des sécheresses, de la restauration et des politiques à différentes échelles, jusqu’au niveau des arbres individuels.
« Cette étude ouvre une nouvelle dimension dans le suivi des forêts… et de nombreuses autres vont suivre. C’est réellement unique dans le domaine de la télédétection ! Dans ces études à venir, la combinaison de la télédétection à très haute résolution et de l’IA assurera la cartographie des forêts dans de nombreuses régions du monde (Europe, Afrique, etc.), avec une précision inégalée et une résolution de 1 à 10 mètres », affirme Philippe Ciais, chercheur CEA au laboratoire des Sciences du climat et de l’environnement, qui a participé à cette étude.
Celle-ci fait notamment l’objet d’un atelier sur l’usage de la télédétection pour mieux connaître et protéger les forêts au One Forest Summit.
RÉFÉRENCE Tucker C. et al. (2023). Sub-continental-scale carbon stocks of individual trees in African drylands. Nature.

À propos d’INRAE

INRAE, l’institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement, est un acteur majeur de la recherche et de l’innovation créé le 1* janvier 2020. Institut de recherche finalisé issu de la fusion entre l’Inra et Irstea, INRAE rassemble une communauté de 12 000 personnes, avec 272 unités de recherche, service et expérimentales implantées dans 18 centres sur toute la France. L’institut se positionne parmi les tout premiers organismes de recherche au monde en sciences agricoles et alimentaires, en sciences du végétal et de l’animal, et en écologie-environnement. Il est le premier organisme de recherche mondial spécialisé sur l’ensemble « agriculture-alimentation-environnement ». INRAE a pour ambition d’être un acteur clé des transitions nécessaires pour répondre aux grands enjeux mondiaux. Face à l’augmentation de la population, au changement climatique, a la raréfaction des ressources et au déclin de la biodiversité, l’institut a un rôle majeur pour construire des solutions et accompagner la nécessaire accélération des transitions agricoles, alimentaires et environnementales.
  • www.inrae.fr

À propos du CEA

Le CEA éclaire la décision publique et apporte des solutions scientifiques et technologiques concrètes aux forces vives (entreprises et collectivités) dans les domaines majeurs pour la société : transitions énergétique et numérique, santé du futur, défense et sécurité globale. Le CEA exerce ses activités de recherche fondamentale dans les domaines des biotechnologies et de la santé, des sciences de la matière et de l’Univers, de la physique et des nanosciences. Il place au cœur de ses objectifs la production et la publication de connaissances et de savoir-faire au meilleur niveau mondial. En 2021, près de 3 900 publications scientifiques, dont les trois quarts issues de collaborations internationales, ont été signées par les chercheurs du CEA. Ces connaissances constituent également des sources indispensables pour les autres missions du CEA.
  • www.cea.fr

À propos du CNRS

Le Centre national de la recherche scientifique est une instit tution publique de recherche parmi les plus reconnues et renommées au monde. Depuis plus de 80 ans, il répond à une exigence d’excellence au niveau de ses recrutements et développe des recherches pluri- et interdisciplinaires sur tout le territoire, en Europe et à l’international. Orienté vers le bien commun, il contribue au progrès scientifique, économique, social et culturel de la France. Le CNRS, c’est avant tout 32 000 femmes et hommes et 200 métiers. Ses 1 000 laboratoires, pour la plupart communs avec des universités, des écoles et d’autres organismes de recherche, représentent plus de 120 000 personnes; ils font progresser les connaissances en explorant le vivant, la matière, l’Univers et le fonctionnement des sociétés humaines. Le lien étroit qu’il tisse entre ses activités de recherche et leur transfert vers la société fait de lui aujourd’hui un acteur clé de l’innovation. Le partenariat avec les entreprises est le socle de sa politique de valorisation. Il se décline notamment via près de 200 structures communes avec des acteurs industriels et par la création d’une centaine de start-up chaque année, témoignant du potentiel économique de ses travaux de recherche. Le CNRS rend accessible les travaux et les données de la recherche; ce partage du savoir vise différents publics: communautés scientifiques, médias, décideurs, acteurs économiques et grand public.
  • www.cnrs.fr

 

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