Jeremy Narby, docteur en anthropologie de l’université de Stanford (Etats-Unis), est depuis 1989, directeur de projets amazoniens pour l’ONG suisse Nouvelle Planète. Pour la défense de leurs territoires et de leurs connaissances, il a été conduit à réaliser des études sur « comment les indiens utilisent leurs ressources rationnellement …». Dans ses conférences, il souligne comment l’Amazonie péruvienne, une région grande comme la France, est gravement atteinte par les attaques sur l’environnement du fait de l’extraction « sauvage » des hydrocarbures et de ses conséquences : déforestation, pollution des sols, contamination des eaux, empoisonnement des populations…
Après le choc du colonialisme, avec de vastes réductions de territoires, des pertes humaines considérables, puis les puissantes attaques industrielles du XIX siècle sur les populations et l’environnement pour l’exploitation du caoutchouc, mais aussi l’extraction de ressources naturelles (bois précieux, or, pétrole…), ces peuples ont à subir aujourd’hui une nouvelle vague de destruction massive de leur environnement qui menace leur survie et leur système de connaissance. – Conférence de Jeremy Narby : « Plantes et chamanismes : plongée au cœur de l’intelligence de la nature » Comment survivre aux métaux lourds ? Comment nourrir sa famille quand il n’y a plus de poisson dans la rivière ? Jeremy Narby se souvient entendre, encore début des années 80, des experts internationaux expliquer que le déboisement était nécessaire pour exploiter les ressources naturelles, que c’était là du « développement ». Avec l’argumentation sous jacente : « les indiens ne savent pas utiliser les ressources naturelles rationnellement ; il est donc économiquement justifiable de les exproprier de leur territoire ».
Anthologie du Chamanisme, Jeremy Narby – Francis Huxley – éditions Albin Michel collection Espace libre



Science, industrie et savoirs indigènes éco responsables
Amazonie brésilienne. José Claudio Ribeiro da Silva et Maria do Espirito Santo, défenseurs de la forêt Amazonienne. Assassinés le 24 mai 2011, ces deux brésiliens militaient contre la déforestation et prenaient une part active dans la lutte contre la réforme du code forestier brésilien de 1965. A l’origine, ce code contraignait les propriétaires forestiers à une préservation intacte de leur forêt à hauteur de 80%. Le 24 mai dernier, la loi a changé. Les coupables de déforestation ont été amnistiés et les surfaces préservées assouplies : l’ouverture légalisée de l’expansion agricole sur les terres forestières ! Les forêts vont devoir laisser place aux agro carburants.« Nous prenons les plantes et les remèdes des ces gens et nous n’avons même pas la politesse d’engager une conversation avec eux à propos de l’origine de leur savoir. » Jeremy Narby Au travers de son approche scientifique du chamanisme amazonien, Jeremy Narby appelle la Science académique occidentale à changer de paradigme, non pas pour parvenir à mieux piller les savoirs des peuples indigènes, selon le même vieil esprit colonial d’accaparation, mais à dialoguer avec eux, en sortant de l’arrogance des présupposés, de l’auto centrisme « scientifisme », et espérer ainsi comprendre les limites de notre propre système de connaissance. Aujourd’hui, avec une même « sauvagerie » que lors de la première conquête coloniale, on assiste à une destruction sans vergogne des biotopes de l’Amazonie. Science et Industrie, à l’affut du contrôle sur le vivant, sont prêtes à s‘emparer de savoirs faire indigènes et d’une puissante pharmacopée pour élaborer des médicaments et développer de nouvelles technologies. Au-delà de la sauvegarde d’un patrimoine culturel commun, de la conservation de la biodiversité et des savoirs botaniques, du mystère de la magie du vivant, des plantes et des animaux, de la complexité de pratiques thérapeutiques ancestrales et « néo chamaniques », il s’agit pour Jeremy Narby « d’une réconciliation avec la nature qui répond à des problématiques très quotidiennes et corporelles »
La création artistique : passerelles culturelles et alerte de l’opinion publique
Des pratiques ancestrales au néo chamanisme amazonien
Bioluminescence de la forêt dans le film AVATAR de James Cameron« J’apprenais que les plantes sont la télévision de la Forêt ! » Jeremy Narby Dans cette situation de crise environnementale majeure, avec les risques d’extinction d’un système ancestral qui assurait à sa manière une mission de salubrité publique environnementale, de nombreux « curanderos » péruviens néo chamanes souhaitent partager leur vision. Elle se retrouve dans de nombreuses expressions picturales.
C’est à présent une véritable « nouvelle vague » artistique amazonienne qui rayonne jusque dans la création Hollywoodienne, avec notamment des films à succès comme Avatar ou Blueberry du réalisateur français Yan Kounen.
En ce début de XXI siècle, un nouveau courant intellectuel occidental se penche sur ce chamanisme amazonien ancestral concomitamment à l’émergence d’un néo chamanisme. Ce dernier ne s’inscrit plus de la même manière dans la communauté. 


