Les Sites Naturels de Compensation, Restauration et Renaturation (SNCRR), nés de la Loi Industrie-Verte en 2023, viennent renouveler les Sites Naturels de Compensation (SNC) issus de la Loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages en 2016. Cette publication du CDC Biodiersité analyse le positionnement de ce dispositif, à l’intersection des besoins des territoires, des attentes des entreprises et des engagements nationaux, européens et internationaux en matière de restauration des écosystèmes dégradés.
Les objectifs des Sites Naturels de Compensation, Restauration et Renaturation (SNCRR)
- ✓ Être au service d’une démarche de planification écologique globale et anticipée ;
- ✓ Lutter contre la faiblesse constatée et étudiée de la compensation à la demande ;
- ✓ Assurer une plus-value environnementale au profit des territoires grâce à une efficacité écologique accrue ;
- ✓ Massifier l’action en faveur du vivant grâce à l’ouverture de ces sites aux financements volontaires.
Le dispositif
Le dispositif des Sites Naturels de Compensation, Restauration et Renaturation (SNCRR) permet de :
- ✓ Proposer une offre de compensation ;
- ✓ Proposer une offre d’actions de restauration volontaire ;
- ✓ Réaliser des opérations additionnelles pouvant donner lieu à l’attribution de crédits carbone au titre du label « bas carbone ».
Les enjeux de ce Dossier
- ✓ Proposer des clés de compréhension pour favoriser l’appropriation du dispositif par l’ensemble des parties-prenantes qu’il implique ;
- ✓ Démontrer l’intérêt de cet outil pour les acteurs économiques, la biodiversité et les besoins des territoires afin que ces projets se multiplient.
Édito
de
Marianne Louradour
Présidente de CDC Biodiversité
Avec une chute moyenne de 69% des populations de mammifères, d’oiseaux, d’amphibiens, de reptiles et de poissons entre 1970 et 2018 à l’échelle globale, la mise en œuvre d’actions de préservation, de restauration et de renaturation des écosystèmes apparait aujourd’hui comme une urgence vitale pour le maintien des équilibres biophysiques mais aussi socio-économiques.
À titre d’exemple, chaque année en France la valeur des productions alimentaires qui peuvent être attribuées aux seuls insectes pollinisateurs représente entre 2,3 et 5,3 milliards d’euros (Commissariat Général au Développement Durable, 2016).
L’adoption au consensus en 2022 du Global Biodiversity Framework (GBF), semble témoigner d’une prise de conscience générale sur ce sujet. Parmi les différentes cibles retenues à horizon 2030, certaines font preuve d’un haut degré d’ambition tel que la restauration d’au moins 30% des zones dégradées d’écosystèmes terrestres, d’eau douces, côtiers et marins d’ici 2030.
Hiérarchie des normes oblige, la troisième Stratégie Nationale pour la Biodiversité 2030 publiée par le gouvernement français en novembre 2023 s’inscrit dans la continuité de cet accord sans pour autant être un texte opposable du point de vue juridique.
C’est la mesure 38 de cette stratégie visant à renforcer les moyens innovants de financement en faveur de la biodiversité qui a retenu l’attention des équipes de la Mission économie de la biodiversité. Traduite réglementairement et de manière anticipée par l’article 15 de la loi n° 2023-973 du 23 octobre 2023 relative à l’industrie verte, elle définit les contours d’un nouveau véhicule permettant l’atteinte des objectifs de préservation de la biodiversité : celui des Sites Naturels de Compensation de Restauration et de Renaturation (SNCRR).
Ce dispositif a vocation à renforcer les Sites Naturels de Compensation (SNC) en permettant notamment de diversifier les sources de revenu pour l’opérateur grâce à l’élargissement de la gamme de produits qu’il peut émettre, et donc en faciliter la sécurisation économique de l’opération.
Sa transcription dans une loi liée à la réindustrialisation du pays traduit une volonté politique de conciliation entre la relocalisation des activités du secteur secondaire et l’atteinte des objectifs
environnementaux que la France s’est fixée, il s’inscrit dans le contexte de politiques publiques récentes comme celle du ZAN (Loi Climat et Résilience, 2021) et ranime l’importance de l’atténuation et de la neutralisation des incidences liées à l’aménagement (objectif d’absence de perte nette à l’échelle des projets).
Plus largement, ce nouveau véhicule entre aussi en résonance avec les enjeux d’accroissement des flux financiers privés en faveur de la biodiversité.
S’il permet toujours de répondre aux obligations réglementaires françaises de compensation écologique dans le cadre du respect de la Séquence ERC, l’ouverture à la commercialisation d’unités de restauration écologique volontaires – hors du seul cadre réglementaire de la compensation écologique – permise par les SNCRR répond aux enjeux que posait le GBF dans sa cible 19 :
mobiliser de nouvelles ressources financières, pour atteindre 200 milliards de dollars par an, issues en partie de flux financiers privés.
Elles pourront également donner lieu à la reconnaissance de réductions d’émissions au titre du label bas-carbone. À ce titre, ce véhicule pourrait aussi être le récipiendaire de stratégies d’acteurs privés souhaitant travailler et explorer la structuration de stratégies de No Net Loss1 à l’échelle de leurs entités sans qu’elles y soient encore contraintes à ce jour.
Enfin, à l’heure où j’écris cet édito, le projet de Règlement européen restauration a été définitivement adopté par le Conseil de l’Union européenne. L’ensemble des équipes de CDC Biodiversité se joignent à moi pour s’en féliciter. Là encore les SNCRRs tout en proposant de créer des synergies et des leviers entre opérations réglementaires et engagement volontaire des acteurs privés semblent
s’inscrire pleinement dans la réponse aux besoins prégnants de restauration des espaces dégradés.
La potentielle démultiplication des capacités d’action pour le vivant qu’ils pourraient permettre apporte une réponse non négligeable pour satisfaire au futur Règlement européen, tout en agissant dès maintenant.
CDC Biodiversité accompagne les enjeux de conciliation du développement économique avec un haut niveau d’ambition écologique depuis plus de 15 ans. Elle en a fait sa raison d’être. Grâce à l’expérience de terrain de la société et des équipes, et grâce au travail de la Mission Économie de la Biodiversité, nous sommes aujourd’hui en mesure de vous présenter des premières analyses de
ce nouveau dispositif.
Nous livrons ces réflexions dans le but de favoriser l’appropriation du dispositif par le plus grand nombre de parties prenantes possible, mais aussi de susciter des interrogations sur les bonnes pratiques permettant le succès du dispositif.
Il reste beaucoup à faire, cette publication amorce aussi une réflexion structurelle sur la place de ce nouveau dispositif au sein de la séquence éviter-réduire-compenser, mais aussi au sein des stratégies de contributions volontaires des acteurs.
Bonne lecture !
- Aucune Perte Nette de Biodiversité ↩︎