Sauf transformation radicale des usages, les prélèvements et plus encore les consommations d’eau devraient fortement croître entre 2020 et 2050. Dans le prolongement des travaux de France Stratégie sur la prospective territorialisée de la demande en eau à l’horizon 2050, le Haut-commissariat à la Stratégie et au Plan publie une note d’analyse et un document de travail pour confronter la demande future en eau aux ressources projetées en 2050. A l’échelle de la France découpée en quarante bassins versants, les auteurs identifient les périodes de l’année au cours desquelles des tensions sur la ressource en eau de surface pourraient apparaître, avec des besoins environnementaux ou des demandes humaines en eau non satisfaits.

Un travail inédit qui documente et analyse les conflits d’usages de l’eau
Dans leurs nouvelles analyses, les auteurs mobilisent plusieurs indicateurs afin d’évaluer la tension hydrique à laquelle seront potentiellement confrontés les écosystèmes et les usages humains, d’ici à 2050, selon trois scénarios : « tendanciel », qui prolonge les tendances passées ; « politiques publiques », qui simule la mise en place de politiques publiques récemment annoncées ; et « de rupture », qui se caractérise par un usage sobre de l’eau.
A l’horizon 2050, des tensions identifiées pour les écosystèmes et pour les activités humaines
Sous l’effet combiné d’une diminution des ressources en eau et d’une augmentation de la demande tant en prélèvements – correspondant à la quantité totale extraite de l’environnement – qu’en termes de consommation – représentant l’eau évapotranspirée donc non restituée directement au milieu naturel – les auteurs anticipent une dégradation progressive de la situation hydrique sur l’ensemble du territoire hexagonal.
A l’horizon 2050, sans inflexion des tendances actuelles (scénario tendanciel), en cas de printemps-été sec, 88 % du territoire hexagonal serait en situation de tension hydrique modérée ou sévère en été s’agissant des prélèvements d’eau. Dans le scénario de rupture, 67 % du territoire hexagonal serait en situation de tension hydrique.
« Ces tensions pourraient même être aggravées par la dégradation de la qualité de l’eau, qui réduirait encore la quantité d’eau disponible pour les différents usages humains, notamment la consommation d’eau potable. Pour une ressource aussi vitale, un constat aussi grave nécessite une prise de conscience immédiate et des actions renforcées à court terme. Personne n’imagine vivre, en France, avec des restrictions massives et chroniques, entièrement subies« , alerte dans son édito Clément Beaune, Haut-commissaire à la Stratégie et au Plan.
Une nécessaire transformation des usages
Face à ces constats, les auteurs exposent différentes solutions afin de limiter les pressions sur les écosystèmes, ainsi que les conflits entre les différents usagers de l’eau.
La régulation du développement de l’irrigation par les pouvoirs publics, le soutien à des pratiques agroécologiques plus sobres en eau, ou bien encore le soutien à des actions de sobriété énergétique dans l’ensemble des activités humaines sont autant de solutions qui devront être mobilisées.
La Note d’Analyse
Concernant les besoins environnementaux, du fait du changement climatique, les écosystèmes pourraient subir à l’horizon 2050 des situations de stress chronique plusieurs années consécutives sur toute la France hexagonale, en particulier dans le sud-ouest et le sud-est. Les prélèvements humains viendront accroître cette pression sur les milieux ; un effort de sobriété s’impose.
S’agissant des usages humains, sans inflexion des tendances actuelles, 88 % du territoire hexagonal pourraient être en situation de tension modérée ou sévère en été en matière de prélèvements. Des restrictions d’usage de l’eau pour les activités agricoles, industrielles ou pour les particuliers seraient alors probables sur la quasi-totalité du territoire, comme en 2022. La tension relative aux consommations pourrait être forte dans le sud-ouest et le sud-est de la France, en raison de la part importante de l’eau consommée, du fait notamment de l’irrigation des cultures.
Enfin, la situation hydrique devrait être amenée à se dégrader entre les horizons 2020 et 2050, non seulement en été, mais aussi en hiver, dans la très grande majorité de la France hexagonale. Il faut voir là l’effet combiné d’une diminution de la ressource en eau et d’une augmentation de la demande en prélèvements et surtout en consommations. Ces constats appellent à planifier dès aujourd’hui les transformations des pratiques qui permettront de limiter les pressions sur les écosystèmes et les conflits entre les différents usages de l’eau.
Auteurs :

Adjointe au directeur

Chef de projet
et Arthur Gaillot, Conseiller scientifique
Le document de travail
Confrontation entre la ressource en eau et la demande à l’horizon 2050