Pour un individu, être riche signifie-t-il avoir beaucoup d’argent, une grande intelligence, une grande aptitude au bonheur, de nombreux amis… ? De même, une société est-elle riche quand le produit intérieur brut (PIB) est élevé ou quand le lien social est de qualité, les individus bien éduqués et en bonne santé, l’environnement préservé… ? Ce hors-série poche d’Alternatives Économiques explique tout d’abord en quoi l’indicateur de richesse toujours dominant (le PIB) a fait son temps. Puis, il fait le tour des différentes tentatives pour le compléter ou le remplacer, existantes ou en cours de développement (indice de développement humain, indicateurs de santé sociale, indicateurs synthétiques de développement durable…). Il décrit aussi comment ces indicateurs ont été appropriés par des territoires, des entreprises, etc. Il s’interroge enfin sur les limites des indicateurs : peut-on et faut-il tout compter ?
La richesse autrement est publié à l’initiative du Forum pour d’autres indicateurs de richesse (FAIR). Ce collectif réunit des universitaires, des militants associatifs et des représentants de collectivités locales qui n’ont pas attendu le rapport Stiglitz pour s’interroger sur ce que sont les vraies richesses et comment les compter. Avec les contributions de : Dino Bendiab, Aurélien Boutaud, Luzmila Carpio Sangüeza, Isabelle Cassiers, Myriam Cau, Christophe Cesetti, Hélène Combe, Arnaud du Crest, Nathalie Durand, Jean Fabre, Orianne Faisandier, Philippe Frémeaux, Jean Gadrey, Vincent Glenn, José Gualinga, Etienne Hayem, Florence Jany-Catrice, Pierre-Jean Lorens, Grégory Marlier, Dominique Méda, Georges Menahem, Danièle Mitterrand, Rodrigue Olavaria, Bernard Perret, Philippe Piau, Michel Renault, Geoffroy de Schutter, Géraldine Thiry, Michel Veillard, Patrick Viveret, Mutthia Yoganantha. Pour en savoir plus sur FAIR cliquez ici.Éditorial
Qu’est-ce que la richesse ? Comment mesurer le progrès ? Ces questions sont désormais régulièrement posées. Et il ne se passe pas de mois sans que l’on ne nous annonce une ou plusieurs initiatives proposant d’autres indicateurs au-delà du produit intérieur brut (PIB). Ainsi, à la fin de l’année 2010, le Conseil d’analyse économique français et son homologue allemand ont fourni, à la suite du rapport Stiglitz de 2009, une liste – très contestable – d’indicateurs pour évaluer dans chaque pays « la performance économique, le bien-être et la soutenabilité ». Ce foisonnement est sans doute un succès pour ceux qui, dès les années 1990, ont montré que la focalisation sur le PIB et la croissance nous fourvoyait. Mais ces tentatives sont diverses. Certaines restent dans la logique comptable dominante, d’autres s’en écartent résolument. Il importe d’en éclairer les enjeux. Il importe aussi de valoriser les contributions des organisations de la société civile, notamment dans les territoires et pour tout ce qui concerne les entreprises ou l’économie sociale et solidaire. Avant d’élaborer d’autres indicateurs, il faut permettre à la société de délibérer sur ce qu’elle considère être ses richesses, ses biens communs. Cette étape est primordiale : il faut qualifier avant de quantifier, en se méfiant des excès de la culture du chiffre. Et il faut y associer les citoyens ou les parties prenantes : c’est la grande condition pour une appropriation collective et une légitimation. C’est pour à la fois rappeler les graves insuffisances du PIB comme indicateur de référence de nos sociétés et promouvoir le caractère nécessairement démocratique et collectif du choix d’indicateurs alternatifs que le collectif Fair (Forum pour d’autres indicateurs de richesse) s’est constitué au début de 2008, au moment de la mise en place de la commission Stiglitz. Il aurait très bien pu s’appeler « Forum citoyen pour penser la richesse autrement », car les indicateurs ne sont pas, pour ce collectif, des finalités. Ce sont seulement des outils au service d’autres politiques, pour peu que celles-ci aient préalablement fait l’objet d’un débat public. De nouvelles boussoles pour aider à changer de cap, ce qui suppose bien d’autres innovations, concernant notamment la finance et la monnaie. Ce numéro, construit comme une contribution au débat, a pour ambition de fournir des repères citoyens pour que ces questions sortent des tours d’ivoire des économistes et des statisticiens, dont le rôle, certes important, devrait se limiter à fournir au débat démocratique des analyses de bonne qualité. Un monde plus solidaire a besoin d’autres représentations des richesses et d’autres façons de les mesurer, sur un mode de pleine participation.Sommaire
Introduction : la richesse et ses indicateurs- Qu’est-ce que la richesse ? Au niveau d’un pays, la notion de richesse désigne l’ensemble des biens et des services produits par les entreprises et les administrations. Au niveau individuel, elle est synonyme d’abondance de revenus monétaires et de biens matériels. Mais il n’en a pas toujours été ainsi.
- À quoi servent les indicateurs ?
- Un enjeu démocratique majeur
- Le PIB au cœur des Trente Glorieuses
- Les limites du PIB. Si le PIB demeure un indicateur économique pertinent pour juger de l’accroissement de la production dans un pays, il présente de nombreuses limites intrinsèques qui en font un indicateur inadapté pour juger de l’état de bien-être ou de progrès d’une société.
- Sous la richesse, la monnaie : Entretien avec Patrick Viveret
- « Le progrès ne consiste pas à produire toujours plus » : Entretien avec Dominique Méda
- L’émergence d’un mouvement en France
- Désigner les richesses essentielles
- « Il existe aujourd’hui une fenêtre d’opportunité » : Entretien avec Geoffroy de Schutter
- Le rapport Stiglitz vu par Fair : La commission Stiglitz pour la mesure des performances économiques et du progrès social a présenté son rapport le 14 septembre 2009. Le communiqué publié à l’époque par Fair pointe à la fois l’intérêt et les limites de ses conclusions.
- Quand les indicateurs font leur cinéma : Entretien avec Vincent Glenn
- Un foisonnement excessif ?
- Croissance, développement humain : le découplage
- Il était une fois l’IDH. Depuis vingt ans, le Programme des Nations unies pour le développement publie son Rapport mondial sur le développement humain. Il y rend compte chaque année de l’évolution de l’humanité au regard d’autres critères que la seule progression du PIB, via un indicateur phare : l’indicateur de développement humain.
- Les inégalités et la santé sociale des nations à la loupe
- Des empreintes pour l’environnement
- Développement durable : indicateurs synthétiques et tableaux de bord
- « Nous avons besoin d’indicateurs de conduite du changement » : Entretien avec Arnaud du Crest
- D’autres initiatives à l’étranger
- Quand les régions françaises s’en mêlent
- L’Italie veut mesurer la qualité du développement de ses territoires
- « De véritables outils d’aide à la décision » : Entretien avec Myriam Cau
- Le PIB fait-il le bonheur ?
- Quand l’objectif et le subjectif se marient
- Pour un rapport global sur la performance de l’entreprise
- Comptes des organisations et comptes globaux
- « Une autre comptabilité d’entreprise est nécessaire » : Entretien avec Michel Veillard
- Actifs immatériels et richesse
- Le Social Return On Investment (SROI)
- Du côté de l’utilité sociale
- Le cas des organisations sportives
- Ne pas tout monétariser
- De la mesure du bien-être économique
- La famille des PIB verts
- Le rôle de la monnaie et des monnaies
- Economie et monnaies au service de la vie : Entretien avec Dino Bendiab
- Pourquoi faire participer les citoyens ?
- Quelle échelle et quelles méthodes ?
- Une conférence citoyenne dans le Nord-Pas-de-Calais
- Un chantier démocratique en Pays de la Loire
- Indicateurs, choix de société et démocratie. La recherche d’autres indicateurs de richesse au-delà du PIB peut porter une nouvelle représentation du monde. Mais tous les indicateurs alternatifs existants n’expriment pas les mêmes valeurs.
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Alternatives Économiques Poche n°48 – Mars 2011 – Prix : 9,50 € – Acheter ce numéro en cliquant ici.