«Prière de laisser cet endroit aussi propre que vous l’avez trouvé en entrant. C’est pas le plus beau slogan de développement durable, ça?» Rires dans la salle. La réplique fait mouche à tous les coups. Elle est tirée de Partie prenante, une pièce de théâtre d’entreprise qui met en scène la dirigeante d’une PME, son directeur commercial – également maire de la commune – un militant écologiste et une journaliste. L’intrigue? Pour financer ses projets de croissance en Pologne, la PME fait appel à un fonds d’investissement socialement responsable et doit donc se convertir au «DD». Un choix courageux… dont personne ne sort indemne à l’issue d’une heure de représentation.
Conçue par le cabinet ASG conseil, la pièce a déjà été jouée une vingtaine de fois dans des collectivités locales, des entreprises publiques (GDF, EDF), devant des syndicalistes ou des jeunes cadres du groupe Banque populaire. Objectif: vulgariser le développement durable, un concept encore obscur pour beaucoup, défini en 1987, par le rapport Brundtland à l’ONU, comme un «développement qui répond aux besoins des générations présentes sans compromettre la capacité des générations futures de répondre aux leurs». Précisé au Sommet mondial de la Terre, à Rio, en 1992, le concept de développement durable prône l’équilibre entre efficacité économique, progrès social et respect de l’environnement. Poussées par les ONG et par des réglementations de plus en plus exigeantes, les entreprises s’en sont saisies, élaborant des politiques, publiant des rapports, communiquant sur leur image «responsable» auprès des actionnaires, des clients, des associations. Sans toujours se soucier des salariés. Pas étonnant, dès lors, que seuls 52% de ces derniers déclaraient, en octobre 2004, avoir déjà entendu parler de développement durable et que… 17% étaient capables de le définir précisément [[Selon un sondage CSA pour La Nouvelle Vie ouvrière, l’hebdomadaire de la CGT.]]. «Les entreprises sont mal à l’aise, constate Stéphanie Savel, codirectrice d’ASG. Elles ne voient pas quoi faire de plus que respecter une législation sociale française déjà très riche. Du coup, il y a un décalage entre le discours affiché à l’extérieur et le vécu des salariés.» Jean-Paul Bouchet, secrétaire général adjoint de la CFDT cadres, qui a signé en janvier 2004 le Manifeste pour la responsabilité sociale des cadres, ajoute: «Souvent, le DD ne signifie rien d’autre que l’addition d’un certain nombre de contraintes supplémentaires, voire d’injonctions contradictoires.» Le respect de l’environnement face à l’exigence de rentabilité ou à la défense de l’emploi: les conflits d’intérêt inhérents au DD sont redoutables à arbitrer. «Mettre en phase l’entreprise avec les enjeux du développement durable, c’est gérer en permanence des logiques antagonistes», confirme Didier Livio, patron de Synergence, une société de conseil en communication. Or les outils pour y parvenir manquent. Pis: «Les chartes et autres codes éthiques induisent souvent un transfert de responsabilité de l’entreprise vers les salariés», note Sylvain Lambert, directeur au département développement durable de PricewaterhouseCoopers. Le développement durable implique en fait une véritable rupture: il s’agit ni plus ni moins que de repenser les modes de production et de consommation, et donc de management. Mais bien peu d’entreprises y semblent prêtes. Les DRH comme les syndicats sont bousculés dans leurs habitudes, les salariés se montrent sceptiques devant les beaux discours… Certaines entreprises, toutefois, tentent d’entraîner leurs troupes dans l’aventure. La suite de l’article sur le site de l’Express. Lien direct à l’article ci-dessous.