Le Liberia a connu une guerre civile meurtrière qui a duré de 1989 à 2003, mobilisé environ 21 000 enfants-soldats et fait 250 000 morts. Un enfant libérien sur 10 aurait été enrôlé dans l’effort de Guerre. En 2006, l’ancien président du Liberia, Charles Taylor, est inculpé par le Tribunal spécial de Sierra Léone, mandaté par le Conseil de Sécurité des Nations unies, de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre parmi lesquels l’enrôlement d’enfants-soldats. Le Liberia ne connaît la paix que depuis août 2003. C’est donc dans un pays en pleine reconstruction, aux cicatrices encore fraiches et toujours encadré par 15 000 soldats des forces de l’ONU, que s’est déroulé le tournage de JOHNNY MAD DOG. Sur place, l’équipe du film a notamment bénéficié du soutien du Ministère Français des Affaires Etrangères, de l’ONU de la présidente du Libéria, Ellen Johnson Sirleaf. Sans compter la volonté d’implication et de témoignage de la population sans laquelle rien n’aurait été possible. Mu par un désir de réalisme et d’authenticité, la quasi-totalité du casting est constituée d’anciens enfants-soldats, ayant combattu aussi bien du côté des forces de Charles Taylor que du LURD, et d’enfants des rues recrutés dans les ghettos de Monrovia. C’est leur propre vécu, associé au long travail de formation d’acteurs mêlé d’improvisation, qui donne au film sa force brute quasi documentaire. Ce n’est pas un hasard puisque son réalisateur, Jean Stéphane Sauvaire, s’était fait connaître en 2003 avec CARLITOS MEDELLIN, long métrage documentaire sur les “enfants tueurs” des rues de Medellin dans une Colombie étouffée par les trafics d’armes et de drogues. Le film est sélectionné dans de nombreux festivals autour du monde et obtient en 2004 le Prix du Meilleur Film pour les Droits de l’Enfant. Adapté du roman d’Emmanuel Dongala [[Chimiste, romancier et dramaturge congolais, EMMANUEL DONGALA a passé son enfance au Congo-Brazzaville et fait des études aux Etats-Unis et en France. A la fin des Années 90, son pays plonge dans la guerre civile et bascule dans le chaos, l’obligeant à partir en exil aux Etats-Unis. Il est aujourd’hui professeur de chimie à Simon’s Rock College dans le Massachussetts et professeur de littérature francophone à Brad College. Ses romans ont été traduits dans une douzaine de langues et ses pièces de théâtre montées aussi bien en Afrique qu’en Europe. “Johnny Chien Méchant”, dont est tiré ce film, est basé sur son expérience de la guerre civile et de ses différentes rencontres avec des enfants-soldats.]], JOHNNY MAD DOG est son premier long métrage de fiction. Ce film a déjà reçu plusieurs prix et surtout une critique internationale unanime. Un grand film à voir absolument dès le 26 novembre au cinéma.
Bande annonce et extraits du film
Un enfant-soldat est toute personne, garçon ou fille, âgée de moins de 18 ans recrutée ou utilisée par un groupe ou une force armée, quelle que soit la fonction qu’elle y exerce. Ils ne se limitent pas aux seuls combattants et incluent également les enfants qui occupent les fonctions de mineur ou démineur, éclaireur, espion, porteur, coursier, garde, sentinelle, cuisinier, esclave sexuel et domestique, etc. qu’ils aient été recrutés de manière volontaire ou forcée. (Principes du Cap – Avril 1997) Extrait 1 : Extrait 2 : Synopsis : Afrique, de nos jours. Johnny, quinze ans, enfant-soldat armé jusqu’aux dents, est habité par le “chien méchant” qu’il veut devenir. Avec son commando, No Good Advice, Small Devil et Young Major, il vole, pille et abat tout ce qui croise sa route. Des adolescents abreuvés d’imageries hollywoodiennes et d’information travestie qui jouent à la guerre… Laokolé, treize ans, poussant son père infirme dans une brouette, tâchant de s’inventer l’avenir que sa scolarité brillante lui promettait, s’efforce de fuir sa ville livrée aux milices d’enfants soldats, avec son petit frère Fofo, huit ans. Tandis que Johnny avance, Laokolé fuit… Des enfances abrégées, une Afrique ravagée par des guerres absurdes, un peuple qui tente malgré tout de survivre et de sauvegarder sa part d’humanité. JOHNNY MAD DOG de Jean-Stéphane Sauvaire d’après le roman d’Emmanuel Dongala “Johnny Chien Méchant” – Durée : 1h33 – France / Libéria / Belgique – 2008 – Avec Christopher Minie et Daisy Victoria Vandy – Produit par Mathieu Kassovitz et Benoît Jaubert – Production : MNP Entreprise – Distribution : TFM DistributionLes enfants-soldats dans le monde
– La situation en chiffres : Si les enfants-soldats ont toujours existé, depuis les écuyers du moyen âge jusqu’aux jeunesses hitlériennes du IIIème Reich, leur nombre s’est considérablement accru ces deux dernières décennies. A l’origine de ce constat, la nature des conflits modernes, l’allongement de leur durée ainsi que la multiplication des armes légères, faciles à transporter et à utiliser. La combinaison de ces facteurs a modifié la démographie des forces combattantes en favorisant la participation des femmes et des enfants. Aujourd’hui, l’Organisation des Nations unies estime à 300 000 le nombre d’enfants-soldats en activité dans une douzaine de pays (Afghanistan, Colombie, RDC, Ouganda, Tchad, Birmanie, Philippines, Sri Lanka,…). Avec ses 120 000 enfants-soldats “recensés”, l’Afrique est au coeur du problème. 30% de ces enfants sont des filles qu’elles soient utilisées comme combattantes, espionnes, esclaves sexuels ou domestiques. La moyenne d’âge de ces enfants est estimée à 14 ans. – Qui sont-ils ? La majorité des enfants-soldats sont enlevés et enrôlés de force. Certains cependant rejoignent volontairement les rangs des groupes armés pour des raisons idéologiques, par besoin de protection, par désir de vengeance, ou tout simplement poussés par la pauvreté (ils soulagent ainsi leurs proches d’une bouche à nourrir, tout en assurant eux-mêmes leur subsistance). Pour les forces armées, cette manne de combattants bon marché, dociles, malléables et facilement remplaçables est une aubaine. Démunis de moyens de subsistance, ils sont dans la quasi impossibilité de fuir et n’ont d’autre échappatoire que la cause pour la quelle ils combattent. Facilement endoctrinables et gavés de drogues, il deviennent de véritables machines de guerre. – Une difficile réinsertion : La démobilisation et la réinsertion sociale des enfant soldats est une entreprise longue et difficile. A sa sortie du conflit, l’enfant souffre de nombreuses séquelles physiques et psychologiques : mutilations, dépendance à la drogue, contamination par le VIH, traumatismes divers, violence, dépression, troubles du comportement… accompagnées d’un fort sentiment de culpabilité parfois profondément enfoui. Par ailleurs, n’ayant connu que la vie en temps de guerre, accoutumés au pouvoir que la violence leur confère sur les autres, aux pillages et à la vie sans lendemain, il leur est difficile de se réintégrer socialement, de trouver un travail ou de retourner à l’école. Enfin, le retour dans l’entourage familial est extrêmement délicat. Parfois forcés lors de leur recrutement d’abattre leurs proches pour leur empêcher toute velléité de fuite, ils sont considérés dans leurs villages et leur communauté comme des tueurs sans pitié et violemment rejetés à leur retour. Pourtant leur retour à la vie reste possible à condition d’être soutenus et accompagnés par des programmes spécifiques de réinsertion et de réadaptation. Boris Cyrulnik, psychiatre de l’enfance, initiateur et spécialiste du concept de résilience, nous dit : “On peut faire comprendre à l’enfant qu’il lui est possible de récupérer. C’est ce travail qui déterminera si l’enfant prendra le chemin de la résilience ou bien si, au contraire, il s’engagera sur la voie du désespoir, de la violence”.La mobilisation internationale
Le début des années 90 marque le début de la prise de conscience internationale du phénomène. Sur le plan légal, depuis la Convention des Nations Unies sur les Droits de l’Enfant de 1989 (elle même basée sur les Conventions de Genève de 1949), un grand nombre de traités et résolutions internationaux ont vu le jour pour encadrer la protection de l’enfant-soldat. Parmi eux : – Le Traité de Rome, à l’origine de la création du Tribunal Pénal International en 1998, range parmi les crimes contre l’humanité le recrutement ou l’utilisation d’enfants de moins de 15 ans dans les conflits armés. – Le Protocole facultatif de la Convention des Nations Unies sur les Droits de l’Enfant relève à 18 ans – au lieu de 15 – l’âge minimum pour l’enrôlement obligatoire et la participation des enfants dans les conflits armés. Au 1er octobre 2008, 123 Etats-Parties se sont engagés à le respecter. – La conférence internationale “Libérons les enfants de la guerre” en février 2007 réunit les représentants de 58 États. Elle est à l’origine des Principes de Paris, qui établissent un ensemble de principes liés à la protection des enfants, à leur libération des groupes armés et à leur réintégration dans la vie civile. Malgré ce bataillon de textes juridiques et de mécanismes de protection, on constate un grand décalage entre la protection légale des enfants et les engagements réellement pris sur le terrain. En pratique, les violations des protocoles par des États les ayant ratifiés sont loin d’être rares et l’action de la communauté internationale, à l’exception de la Cour Pénale Internationale, s’est jusqu’à présent essentiellement limitée à une condamnation verbale. Parallèlement à ces initiatives étatiques, de nombreuses ONGs et associations internationales œuvrent à faire connaître le phénomène et participent sur le terrain au difficile travail de démobilisation et de réinsertion de ces enfants.La fondation Johnny Mad Dog
La fondation Johnny Mad Dog est née avec la volonté d’apporter un encadrement et un suivi aux enfants acteurs du film. Une quinzaine d’enfants, entre douze et dix sept ans, ont été pris en charge pendant un an pour être formés au métier d’acteur, de juin 2006 à mai 2007, date de fin du tournage. Depuis, la fondation a mis en place un programme pédagogique à Monrovia, géré par un éducateur, axé autour de leur éducation et leur santé, avec pour mission de les aider dans leur vie quotidienne et de développer avec eux, à plus long terme, leurs projets personnels. Sa volonté est d’élargir son action aux jeunes libériens victimes de 14 ans de guerre civile en développant des programmes éducatifs et culturels comme moyen de réinsertion. E-mail : contact@jmdfoundation.org – Site : www.jmdfoundation.orgAssociations et ONG partenaires du film
– Enfants du Monde – Droits de l’Homme : Enfants du Monde – Droits de l’Homme a pour mandat “la reconnaissance de l’enfant en tant que personne sujet de droit”. Elle agit pour la protection des enfants en danger et la promotion des droits de l’enfant dans le monde. Sa logique d’intervention se base sur la Convention Internationale des Droits de l’Enfant. Pour en savoir plus : www.emdh.org – Terre des Hommes : Terre des Hommes soutient dans leurs actions des partenaires locaux en Afrique, en Amérique latine et en Asie pour promouvoir un développement plus respectueux des droits économiques sociaux et culturels. Elle mène actuellement une campagne contre l’utilisation des enfants-soldats. Pour en savoir plus : www.terredeshommes.asso.fr – L’Appel : L’Appel mène, en partenariat avec des organisations du Sud, des actions en faveur des enfants du monde. Son objectif est, avant toute chose, d’aider les peuples à agir par eux mêmes. Pour en savoir plus : www.lappel.org – Défense des Enfants International : Défense des Enfants International a contribué, dès 1979, à l’écriture du projet de la Convention Internationale sur les Droits de l’Enfant. Elle veille, depuis 1989, à son respect par les Etats, élus, responsables politiques et administratifs, institutions et organismes divers. Pour en savoir plus : www.dei-france.org