Le Think tank Coe-Rexecode (Centre d’observation économique et de Recherche pour l’Expansion de l’économie et le Développement des Entreprises) évalue l’impact de l’introduction d’une taxe carbone en France pour les secteurs industriels dans une étude publiée cette semaine. Selon Coe-Rexecode, « ses modalités d’application et le profil énergétique de chaque secteur, le coût supporté par les entreprises pourrait varier très fortement. Une taxe mal calibrée pourrait être un facteur de désindustrialisation ». Faux rétorque la Fondation Nicolas Hulot qui estime que cette étude offre une « interprétation trop rapide et caricaturale qui ne prend pas en compte l’utilisation positive des recettes et l’impact très bénéfique de la transition énergétique sur l’emploi ».
Le gouvernement a prévu l’introduction en janvier 2016 d’une « fiscalité environnementale » destinée à financer le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) à hauteur de 3 milliards d’euros. L’étude sur « l’opportunité et le coût potentiel d’une fiscalité environnementale » (2012) de Coe-Rexecode « montre que, sous certaines conditions, l’effet de la taxe carbone peut être positif pour l’environnement, l’emploi et la croissance. Cependant, certaines industries pourraient être davantage affectées, en particulier celles dont la production dépend fortement des combustibles fossiles ». « Nous évaluons donc le coût de l’introduction d’une taxe carbone domestique en France au niveau des secteurs industriels selon plusieurs scénarios (hors redistribution éventuelle de ses fruits). Les exemples ci-dessous montrent que les effets sectoriels varient fortement selon le taux et l’assiette de la taxe retenus » : Exemple 1 Taux de 20 euros par tonne de CO2 et exclusion des installations déjà soumises au marché européen de quotas : – Impact sur le PIB : -0.33% à long terme (- 0,08% à 1 an) – Secteur industriel le plus touché : industrie chimique (coût équivalent à 0,2% de la production ou 1,6% de l’excédent brut d’exploitation). – Secteur économique le plus affecté : les transports (baisse de production de 1,6%) – Secteurs exemptés : secteurs très intensifs en énergie (ciment, papier) soumis au marché de quotas. Exemple 2 Taux de 20 euros par tonne de CO2 sans exclusion : – Impact sur le PIB : -0,45% à long terme (- 0.10% à 1 an) – Secteurs industriels les plus touchés : métallurgie (baisse de production de 0,55%), fabrication de produits métalliques (-0,51%). – Secteurs économiques les plus affectés : transports (baisse de production de 1,7%) et énergie (-0,71%). Coe-Rexecode estime ainsi que « Les inégalités et déséquilibres introduits par la taxe carbone pour les entreprises des différents secteurs industriels pourraient être extrêmes si les installations soumises aux ETS étaient incluses dans le champ de la taxe. Les modalités d’application de la taxe carbone seront donc cruciales pour en limiter l’effet négatif sur l’activité économique et la compétitivité des entreprises ». Pour en savoir plus télécharger : – Document de travail N.39 – Impact sur les secteurs industriels de l’introduction d’une taxe carbone en France (avril 2013) (pdf) – Document de travail N.39 – Annexe statistique (avril 2013) (pdf)Réaction de la Fondation Nicolas Hulot
Non, la fiscalité écologique n’accélérera pas la désindustrialisation de la France ! La Fondation Nicolas Hulot (FNH) réagit à la parution de l’étude du Think tank Coe-Rexecode sur la fiscalité carbone. Selon FNH, « son interprétation trop rapide et caricaturale ne prend pas en compte l’utilisation positive des recettes et l’impact très bénéfique de la transition énergétique sur l’emploi ». « Arrêtons de faire peur avec la transition énergétique et la fiscalité écologique ! La fiscalité écologique peut être mise en place en préservant la compétitivité des entreprises. Laisser croire le contraire est volontairement caricatural. Coe-Rexecode a choisi de communiquer sur des chiffres catastrophiques car issus de scénarios qui ne prennent pas en compte l’utilisation positive des recettes pour l’économie. Notamment, dans l’hypothèse ou la fiscalité carbone serait mise en place pour financer le Crédit d’Impot Comptétitivité Emploi (CICE), il faudrait en intégrer les effets positifs dans la modélisation. L’étude de Coe-Rexecode montre d’ailleurs que le choix des mesures de redistribution joue un rôle positif pour tous les secteurs et met en débat quelques pistes comme des mesures sectorielles pour aider les industries les plus exposées. C’est là-dessus qu’il faut débattre, pas sur des messages caricaturaux comme ceux indiqués dans la synthèse de l’étude : « une taxe carbone entrainerait une hausse des coûts de production, des effets récessifs et inflationnistes et une accélération de la désindustrialisation ». Par ailleurs, l’étude de Coe-Rexecode ne prend pas en compte l’impact macro-économique très positif que créera la transition énergétique par le développement des nouvelles filières, notamment dans le bâtiment durable et les énergies renouvelables. Le CNRS a montré très récemment que l’on pouvait l’estimer à une création nette d’emplois de 220 000 ETP en 2020 et 610 000 ETP en 2030. Un effet expansif oublié dans l’étude Coe-Rexecode et pourtant essentiel pour notre économie et nos entreprises ! »