Climat et environnement
Lors d’un débat, mardi, à l’Assemblée générale, des hauts responsables des Nations Unies ont encouragé les habitants de la planète à changer leur relation avec la nature alors que la Terre est menacée par la crise climatique, la pollution et la perte de biodiversité.
« Nous savons que la situation est désastreuse. J’ai vu cela dans mon propre pays, les Maldives. Tout récemment, plus d’un tiers des îles habitées ont été touchées par la houle – inattendue à cette période de l’année, affectant les vies, les moyens de subsistance, l’agriculture, le sol et les habitations. Imaginez, quand la mer se précipite sur l’île, sans avertissement, et sans nulle part où aller », a raconté le Président de l’Assemblée générale, Abdulla Shahid, à l’ouverture de ce débat intitulé « Moment pour la nature ».
« Nous savons que nous acculés à cause de notre imprudence. Nous savons que cela ne fera qu’empirer, et rapidement, alors que nous continuons à retarder les actions nécessaires », a-t-il ajouté. Mais, selon lui, il « n’est pas trop tard ». « Nous sommes encore capables de changer les choses », a dit M. Shahid. « Ensemble, nous possédons le savoir-faire et les ressources pour réaliser des transformations durables ; des transformations qui peuvent nous mener vers un monde plus résilient et plus prospère ».
Selon lui, l’Assemblée générale des Nations Unies a un rôle essentiel à jouer dans la sensibilisation, la promotion d’un consensus politique, la galvanisation de l’élan et l’orientation stratégique du système des Nations Unies en la matière. « Cette Assemblée peut faciliter les partenariats au sein de la communauté mondiale à l’échelle de l’ambition nécessaire », a-t-il souligné.
Les êtres humains ont la « clé des solutions »
Dans un message vidéo diffusé lors du débat, le Secrétaire général de l’ONU, António Guterres, a rappelé qu’une « planète saine est le fondement du bien-être humain, du développement durable et de la prospérité à long terme ». Face à la triple crise du dérèglement climatique, de la perte de biodiversité et de la pollution, les êtres humains détiennent la « clé des solutions » puisque « les activités humaines sont à l’origine de cette urgence planétaire », a-t-il affirmé. Selon le chef de l’ONU, « il est maintenant temps de transformer notre relation avec la nature et de tracer une nouvelle voie ». « Ensemble, nous pouvons et devons guider l’humanité sur la voie d’une vie en harmonie avec la planète », a-t-il déclaré.
Il juge d’abord nécessaire de « limiter la hausse de la température mondiale à 1,5 degré Celsius ». « Lors de la conférence sur le climat COP 27 en Égypte, nous avons besoin d’engagements qui permettront une réduction des émissions de gaz à effet de serre de 45% d’ici 2030 afin que nous puissions atteindre zéro émission nette d’ici le milieu du siècle », a-t-il dit. Deuxièmement, il faut « arrêter et inverser la perte de nature ». « Lors de la conférence sur la biodiversité COP 15 à Montréal, nous avons besoin d’un accord mondial audacieux qui s’attaque aux principaux moteurs de la perte de biodiversité », a-t-il dit.
Changer nos modes de consommation
Le Président du Conseil économique et social des Nations Unies (ECOSOC), Collen V. Kelapile, a également estimé qu’il fallait « faire tout ce que nous pouvons pour changer nos modes de consommation et de production ». « Nous devons émerger de l’autre côté du tunnel dans un monde qui agit de manière responsable, en répondant durablement aux besoins croissants de nos populations et en préservant la nature et notre environnement », a-t-il souligné dans un discours. « Si nous retrouvons l’équilibre avec la nature et limitons nos activités humaines, nous avons de bonnes chances de réussir. Nous le devons à nous-mêmes, et surtout aux générations futures », a-t-il ajouté.
La valeur de la nature ne doit pas être supplantée par la poursuite du profit à court terme
Les valeurs que nous attribuons à la nature sont des éléments vitaux de nos cultures, identités, économies et modes de vie, qui devraient tous se refléter dans les décisions politiques concernant notre monde naturel, selon un nouveau rapport soutenu par l’ONU publié lundi. Le nouveau rapport d’évaluation de la Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES) constate toutefois que lors de la prise de décisions politiques, l’accent est trop mis sur les bénéfices à court terme et la croissance économique qui sous-évaluent souvent la nature. Organe scientifique et politique intergouvernemental indépendant, le secrétariat de l’IPBES est assuré par le Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE). Dans le rapport approuvé samedi par les représentants des 139 États membres, les coprésidents Unai Pascual, Patricia Balvanera, Mike Christie et Brigitte Baptiste soulignent que les moyens d’intégrer la nature dans l’élaboration des politiques sont « en quantité limitée ». Priorité accordée aux valeurs marchandes Alors que les décisions économiques et politiques donnent surtout la priorité aux valeurs marchandes de la nature, comme dans la production alimentaire intensive, elles ne reflètent pas de manière adéquate la façon dont les changements dans le monde naturel affectent la qualité de vie des gens. De plus, l’élaboration des politiques néglige les nombreuses valeurs non marchandes associées aux contributions de la nature aux communautés, telles que la régulation du climat et l’identité culturelle. « Seulement 2% des plus de 1.000 études examinées consultent les parties prenantes sur les résultats de l’évaluation et seulement 1% des études impliquent les parties prenantes à chaque étape du processus d’évaluation de la nature », ont-ils expliqué. Trouver un équilibre « Vivre de, avec, dans et comme la nature » signifie fournir des ressources qui soutiennent les moyens de subsistance, les besoins et les désirs des gens, y compris la nourriture et les biens matériels, selon le communiqué de presse publié avec le rapport. Il se concentre également sur la vie non humaine, comme les droits intrinsèques des poissons d’une rivière à « prospérer indépendamment des besoins humains », et considère le monde naturel comme une « partie physique, mentale et spirituelle de soi ». « L’évaluation des valeurs fournit aux décideurs des outils et des méthodes concrets pour mieux comprendre les valeurs que les individus et les communautés ont à propos de la nature », a déclaré Mme Balvanera. Selon M. Christie, « l’évaluation est un processus explicite et intentionnel », qui dépend de « comment, pourquoi et par qui l’évaluation est conçue et appliquée ». Suivant cette logique, Mme Baptiste a ajouté que « reconnaître et respecter les visions du monde, les valeurs et les connaissances traditionnelles des peuples autochtones et des communautés locales permet aux politiques d’être plus inclusives, ce qui se traduit également par de meilleurs résultats pour les personnes et la nature ». Changement axé sur la durabilité et la justice Les auteurs ont identifié quatre « points de levier » centrés sur les valeurs pour créer les conditions nécessaires à un changement transformateur axé sur la durabilité et la justice. Cela va de la reconnaissance des diverses valeurs de la nature à l’intégration de la valorisation dans la prise de décision et la réforme des politiques, pour s’aligner sur les objectifs mondiaux de durabilité et de justice. « La biodiversité est en train de disparaître et les contributions de la nature aux populations se dégradent plus rapidement qu’à n’importe quel autre moment de l’histoire de l’humanité », a déclaré Ana María Hernández Salgar, présidente de l’IPBES. « C’est en grande partie parce que notre approche actuelle des décisions politiques et économiques ne tient pas suffisamment compte de la diversité des valeurs de la nature ».