Revenus agricoles, haires, jachères, ecophyto… : voici une analyse rapide et, quand c’est pertinent, une « remise en contexte » des principaux arguments avancés par la FNSEA et la Coordination Rurale à la veille du Salon de l’Agriculture. Pour chaque thème, des liens permettent d’aller plus loin vers des documents de référence. C’est le debunk de France Nature Environnement
Crise agricole : que retenir ?
Crise agricole : de graves reculs environnementaux qui ne résoudront pas le problème
Revenus, normes, plan Ecophyto, contrôles, accords de libre-échange… La récente crise agricole a permis de mettre en lumière les nombreux points de tension qui secouent la profession. À la suite des annonces du gouvernement et à l’approche du Salon international de l’agriculture, France Nature Environnement fait le point sur les vrais problèmes et les fausses solutions qui ont été avancées jusqu’à présent.
Revenus agricoles et partage de la valeur
Les revendications des agriculteurs sur leur revenu sont légitimes : 18% des membres de ménages agricoles vivaient sous le seuil de pauvreté (contre 13% des membres des ménages ayant des revenus d’activité) (INSEE 2021)
Les problèmes réels de rémunération proviennent notamment d’une répartition injuste de lavaleur entre producteurs et grande distribution. En 2022, les éleveurs ont perçu 4% de moins sur le prix d’un 1L de lait demi-écrémé qu’en 2021, au profit de la grande distribution (+188%) et de l’industrie agro-alimentaire (+64%).
Le modèle agro-industriel actuel et les politiques agricoles et commerciales qui l’accompagnent, entretenues par les gouvernements successifs et la FNSEA (le syndicat majoritaire), broient les agriculteurs et les écosystèmes dont ils dépendent. Cela les rend vulnérables aux crises économiques et géopolitiques : ces 3 dernières années, les coûts de production ont augmenté de 30% à cause des prix de l’énergie, engrais de synthèse, pesticides. Cela concerne principalement l’agriculture industrielle. (INSEE)
Pour jouer sur la compétitivité prix des denrées alimentaires envoyées sur les marchés mondiaux, l’agro-industrie profite d’un rapport de force inégalitaire pour baisser les prix des productions agricoles, allant même jusqu’à payer les agriculteurs en dessous des prix de revient (ex : lait) .
Quelles sont les raisons de fond de la crise agricole ?
Un article rédigé pour la Fondation Terre Solidaire par Aurélien Dufour, étudiant à l’Ecole de journalisme de Cannes
Quelles solutions pour assurer un revenu décent aux agriculteurs ?
La transparence sur les marges des industries agro-alimentaires et de la grandedistribution, et l’encadrement des marges, notamment sur les produits issus de l’agriculture biologique, où la grande distribution augmente ses marges
Une application stricte et contrôlée de la loi EGALIM
Un plan de soutien à l’agriculture biologique, de 300 millions d’euros
Un accompagnement de la transition agroécologique, qui rend les agriculteurs.trices moins dépendants des importations, et donc plus résilients face aux chocs économiques, environnementaux et géopolitiques.
Pour aller plus loin :
Filière laitière : mieux répartir la valeur pour assurer un élevage durable en France (FNH, 2023).
FNH – Fondation pour la Nature et l’Homme
L’heure des comptes pour les supermarchés (RAC, 2023)
RAC – Réseau Action Climat
Simplification des normes
Les principales “normes” mentionnées en environnement ne concernent que l’agriculture industrielle utilisatrice de pesticides (autorisations ICPE ou IOTA, donc seulement les plus grosses exploitations).
Les simplifications qui sont demandées par les agriculteurs.trices sur le terrain sont plutôt sur le volet administratif, pas sur le volet environnemental.
Pour aller plus loin :
Crise agricole : que retenir ?
50 mesures de simplifications nécessaires pour faciliter le redressement des fermes fragilisées (Solidarité Paysans, 2024)
Solidarité Paysans
Mise à l’arrêt du plan Écophyto
C’est un scandale sanitaire, une régression grave pour la santé des citoyen·nes. Gabriel Attal semble oublier que si France Nature Environnement essaye de faire baisser l’utilisation des produits phytosanitaires, c’est parce qu’ils sont cancérogènes (y compris et surtout pour les agriculteur.ices) et une des causes majeures de l’effondrement des populations d’insectes et d’oiseaux.
Pour aller plus loin :
Impacts des produits phytopharmaceutiques sur la biodiversité et les services écosystémiques (INRAE, 2022)
Schéma général de la contamination de l’environnement par produits phytopharmaceutiques sur la biodiversité et les services écosystémiques
INRAE
Expertise collective Pesticides et Santé, présomption forte de liens entre exposition aux pesticides et six pathologies pour les professionnels, et présomption forte de liens entre exposition in utero ou pendant l’enfance et certains cancers. (Inserm, 2021)
INSERM
Réglementation des haies
Depuis 1950, la France a perdu 70% de son bocage. Malgré les politiques de plantation mises en place, la tendance s’accélère avec 23 500 km de linéaire qui disparaissent chaque année.
Les annonces de la FNSEA et du gouvernement mentionnant 14 réglementations qui pèseraient sur les agriculteurs est trompeuse : c’est la même chose que de dire qu’à une intersection routière, on est face à un feu rouge, un stop, un passage à niveaux et un cédez-le-passage ! Il y a différentes règles qui s’appliquent dans des cas précis (par exemple, si on est dans une aire de captage d’eau, en zone Natura2000, à proximité d’un site classé…) mais qui ne se superposent jamais toutes ensemble.
Zones humides
50% de la surface des zones humides en France a disparu entre 1960 et 1990. Depuis les années 2000, cette disparition se poursuit à un rythme moins élevé mais qui reste préoccupant. Les zones humides offrent un système naturel efficace de régulation des périodes de sécheresse, les détruire revient à augmenter les besoins en irrigation.
Curage des cours d’eau
Le curage massif est une fausse bonne idée. En effet, un gros curage permet à l’eau de passer et de s’évacuer plus vite, mais l’eau arrive plus vite en aval et risque d’accentuer les inondations.
Contrôles par les services de l’État et de l’Office français de la biodiversité (OFB)
Les agent·es de l’OFB sont déjà sous le contrôle des préfets et agissent dans le cadre des plans de contrôle administratif discutés sous leur autorité. Sur le volet judiciaire, ils sont sous l’autorité du procureur de la République et il n’est pas possible de les mettre sous l’autorité du préfet.
Accords de libre-échange
Les accords de libre-échange créent une concurrence entre les agriculteurs et agricultrices du monde entier, dans une logique de marché et de compétitivité prix qui entraîne les prix vers le bas et donc met une pression sur le revenu agricole.
De plus, ces accords permettent l’arrivée sur les marchés français et européen de denrées produites avec des pratiques interdites ici, comme avec des pesticides non autorisés. C’est pourquoi il est nécessaire de revoir les accords de libre-échange, de refuser le Mercosur, et de mettre en place des mesures miroirs.
Jachères
La Politique Agricole Commune européenne (PAC) prévoit une obligation de surfaces d’intérêt écologique pour avoir droit au paiement vert de son premier pilier, dont font partie les jachères. Remettre en cause les jachères n’est pas pertinent car :
Pour aller plus loin :
Crise alimentaire et guerre en Ukraine:11 questions pour démêler le vrai du faux (FNH, 2022)
FNH
Souveraineté alimentaire
La souveraineté alimentaire est “le droit des peuples à une alimentation saine et culturellement appropriée produite avec des méthodes durables, et le droit des peuples de définir leurs propres systèmes agricoles et alimentaires » (Via Campesina, 1996). Le gouvernement récupère cette notion sous un angle uniquement économique, en cherchant la “compétitivité de la Ferme France” au détriment des conditions de vie des agriculteurs, de la préservation de l’environnement et de la capacité des pays tiers à maintenir leur paysannerie. Quelques éléments essentiels à la souveraineté alimentaire :
La préservation des capacités productives dans la durée, et donc la préservation des ressources, de la biodiversité et de la vie des sols et des écosystèmes, soit la transition agroécologique et le soutien à l’agriculture biologique
L’arrêt des dépendances aux intrants, pesticides et engrais, à l’alimentation animale importée, à l’énergie. C’est l’agriculture industrielle productiviste qui en est le plus dépendante. Cela rend les agriculteurs vulnérables aux crises économiques et géopolitiques.
Un objectif d’autonomie alimentaire du pays par la création de filières locales, notamment sur les protéines végétales, l’arboriculture ou le maraîchage (filières dans lesquelles la France dépend des importations). Cela repose sur la transition de l’élevage, pour mieux allouer les terres, qui servent massivement à l’alimentation animale.
La participation des citoyen·nes et des paysan·nes à la définition du système alimentaire
Un revenu décent aux paysan·nes
La production alimentaire doit être la priorité de la production agricole.
Les échanges internationaux, nécessaires, ne doivent pas se faire au détriment des marchés agricoles d’autres pays, notamment de ceux qui ont des paysannes et paysans
Directeur de la Publication Cdurable.info depuis 2005.
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