Alors que le Gouvernement annonce le report du Black Friday d’une semaine et la réouverture des commerces de proximité, les Amis de la Terre rappellent que le décalage d’une semaine de cette journée de promotions agressives, dont la publicité est pourtant déjà interdite par la loi, ne changera rien pour les commerces au bord de la faillite. Alors que la Commission européenne vient d’accuser Amazon d’abus de position dominante en France, les Amis de la Terre dénoncent la collusion du Gouvernement avec le géant de Seattle depuis l’exclusion des entrepôts de e-commerce du moratoire sur les zones commerciales, l’autorisation de 13 projets d’Amazon en 1 an et la division par 2 de leurs impôts locaux.
Le Black Friday: problématique en temps normal et partiellement interdit !
Le Black friday a toujours été dénoncé par les commerces de petite taille qui n’ont pas les marges pour afficher les promotions agressives des grandes surfaces et des géants du web. D’avantage captifs d’une clientèle locale, il serait beaucoup plus risqué pour eux d’augmenter artificiellement les prix quelques jours, voire quelques heures avant le black friday pour pouvoir afficher des rabais de -70%… Amazon, Zalando, H&M ont déjà été condamnées pour promotion abusives par la DGGCRF en 2017(1). L’UFC Que choisir vient de mettre en demeure plusieurs sites de e-commerce de retirer leur publicité pour le Black Friday (2)… Car faire de la publicité pour des journées de promotion en dehors des soldes est désormais interdit par la Loi économie circulaire! La décision du Gouvernement de reporter d’une semaine seulement le Black Friday et la réouverture sous condition des petits commerces pour rééquilibrer la concurrence a donc de quoi faire grincer des dents.Les aides insuffisantes de l’Etat aux commerces de proximité
Rappelons que les aides de 10 000 euros pour les commerces fermés sont insuffisantes pour prévenir les faillites. Les loyers du premier confinement n’ont pas été annulés, pour la seconde fermeture les bailleurs sont simplement incités via crédits d’impôts à renoncer à leurs loyers…(3). Les prêts garantis par l’Etat coûtent des taux d’intérêts à partir d’octobre 2020. Les commerces sont donc surendettés (4) et continuent de perdre du chiffre d’affaires au profit de la vente en ligne, dont le taux de pénétration a bondi cette année. Dans le textile l’e-commerce est passé de 15 à 23% des ventes (5). Le manque d’ambition politique du Gouvernement aura un coût social extrêmement grave: 150 000 à 300 000 emplois seraient menacés à très court terme (6)!Derrière les discours, le soutien du Gouvernement à Amazon
Ces dernières semaines, les ministres ont pu tenir des propos durs voire des appels au boycott d’Amazon. Ces discours qui n’engagent à rien, cachent, en réalité, une politique extrêmement favorable aux géants du e-commerce :- exclusion des entrepôts de e-commerce du moratoire sur les zones commerciales, contrairement à ce que demandait la Convention Citoyenne pour le Climat
- autorisation préfectorale de 13 projets Amazon depuis un peu plus d’un an (7)
- réduction par deux de leurs impôts locaux à partir de 2021(8)
Notes
- (1) Le Parisien, Fausses promotions : lourdes amendes pour les stars de l’e-commerce, 23/02/2017
- (2) L’Union, Black Friday: l’UFC-Que Choisir dénonce des «arnaques et fausses promos» de six grandes enseignes, 20/11/2020
- (3) L’internaute, Loyers commerciaux : ce qu’il faut savoir sur l’aide, 18/11/2020
- (4) LCP, Ca vous regarde, Succès d’Amazon: tous coupables ?
- (5) Le Parisien, Habillement : les ventes en ligne, bouée de sauvetage pour le secteur textile, septembre 2020.
- (6) Procos et EY Parthenon, Commerce spécialisé : une chance pour la France, juin 2020.
- (7) Depuis l’autorisation du méga entrepôt Brétigny, l’Etat a ainsi autorisé les entrepôts centre de tri et agences de livraison de Senlis, Annecy, Noisy-le-Grand, Avion, Carquefou, St-Etienne-du-Rouvray, qui sont désormais ouverts. L’Etat a également autorisé les sites de Fournès/Pont du Gard, de Lyon St Exupéry, de Metz, et 2 projets à Belfort, qui font actuellement l’objet de recours. Le préfet du Haut Rhin s’apprêtait également à autoriser le projet d’Ensisheim avant qu’Amazon n’y renonce.
- (8) La doctrine de Bercy les considérant comme des sites industriels et non commerciaux les entrepôts de e-commerce vont donc bénéficier de la réduction de 50% de la CVEA, de la CFE et de la TFPE, alors que le Gouvernement refuse toujours de les assujettir à la TASCOM.
- (9) Fevad, Classement FEVAD 2020 des sites e-commerce en nombre de clients, septembre 2020 ; LSA Conso, La part de marché d’Amazon.fr a décru au T4 2018, selon Fox Intelligence, janvier 2019
- (10) Allianz & Euler hermes, The View : Retail Sector in the US : Towards destructive destruction, juillet 2020
- (11) CDN – Market Place Pulse, Market Places Year in Review, 2019. 211 859 vendeurs tiers seraient actifs sur Amazon.fr. D’après les chiffres annoncés par Amazon en 2019, le nombre d’emploi induit par les PME françaises vendant sur sa market place était de “+ 10 000”. Même en considérant qu’il ne s’agit que de sociétés unipersonnelles, elles ne représentent que 4,7% de ce montant total.
- (12) Commission européenne, Communiqué de presse : Pratiques anticoncurrentielles: la Commission adresse une communication des griefs à Amazon, 11/11/20