Alors que le Congrès Apimondia réunira scientifiques, apiculteurs et industriels à Montpellier en septembre prochain, il reste difficile de rendre compte de la crise apicole « sans être pris en tenaille entre les syndicats des apiculteurs et l’industrie agrochimique », constate le journaliste Vincent Tardieu, qui vient de publier un livre passionnant et rigoureux, fruit de deux ans d’enquête. « Plus d’une fois, je me suis senti pris en otage, manipulé. Avec le détestable sentiment de servir de porte-voix à chacune des parties… » avouait-il à Weronika Zarachowicz, qui signait un dossier édifiant sur la disparition des abeilles dans les colonnes de Télérama cet été.
Pour expliquer la mortalité accrue des abeilles, plusieurs grandes familles de suspects ont bel et bien été cernées comme les pesticides, la dégradation de l’environnement, les pratiques agricoles, les maladies, virus ou parasites avec en tête le redoutable Varroa destructor, un acarien qui suce l’hémolymphe des abeilles – l’équivalent du sang – , suivi de plus en plus près du Vespa velutina, un frelon asiatique fraîchement débarqué sur le sol français et qui ne cesse de faire de nouvelles victimes. Mais pas seulement, souligne Weronika Zarachowicz dans Télérama : Évoquée à mi-voix également, l’intensification des pratiques apicoles modernes, sous la houlette d’apiculteurs professionnels devenus techniciens. Certes, on est loin de la situation américaine, où l’on pratique la transhumance des abeilles sur des milliers de kilomètres dans des camions réfrigérés et où on les gave de sirops et de protéines pour compenser leurs carences alimentaires. « Mais l’apiculture commerciale française a changé, résume Jean-Claude Bévillard, de France Nature Environnement, depuis les méthodes de nourrissement jusqu’au recours croissant aux importations de certaines races de reines meilleures pondeuses, plus compétitives. Les résultats sont là : la durée de vie moyenne d’une reine ne cesse de diminuer, et on assiste à un appauvrissement génétique accéléré, qui pourrait lui aussi contribuer à fragiliser les abeilles face aux maladies comme aux pesticides… » Le journaliste Vincent Tardieu y voit même l’un des enseignements essentiels de la crise apicole : nous avons créé un système peu durable dans une partie des exploitations, à l’image des temps agricoles contemporains. « Lequel engendre une série de stress biologiques, par des échanges de reproducteurs de reines sans contrôle suffisant, par des migrations de colonies – aux États-Unis – dans un environnement trop pauvre en ressources et souvent pollué. Je crains que l’apiculture commerciale n’ait atteint ses limites. C’est certes dérisoire comparé aux autres filières d’élevage animal. Mais tout est relatif : la charge est trop lourde pour ce frêle « bétail » et son système « colonial », pour cet insecte si rétif à la vie domestique ! »L’étrange silence des abeilles, une enquête de Vincent Tardieu

L’étrange silence des abeilles : enquête sur un déclin inquiétant
Les abeilles meurent aussi en ville, pour la même raison qu’en campagne, raison dont j’aimerais bien m’entretenir avec Vincent Tardieu, si vous pouvez me mette en contact avec lui.
Le député Martial Saddier, l’UNAF, le SNPM entre autres sont au courant mais se taisent. Le silence des abeilles est amplifié par le silence des mouches et des criquets qui disparaissent eux aussi pour la même raison.