Alors que des millions de personnes dans le monde continuent de souffrir de la faim, les dirigeants de cinq organisations internationales humanitaires, financières et commerciales ont appelé à une mobilisation urgente pour éviter l’aggravation de la crise alimentaire et nutritionnelle mondiale.
Les dirigeants de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), du Fonds monétaire international (FMI), du Groupe de la Banque mondiale (GBM), du Programme alimentaire mondial (PAM) et de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) ont appelé, dans un communiqué conjoint, à secourir les « points chauds de la faim » et à faciliter le commerce, entre autres mesures.
Ils ont conseillé aux pays d’assurer un équilibre entre les interventions urgentes à court terme et les efforts de résilience à plus long terme.
Des disponibilités alimentaires bientôt au plus bas
Selon leur communiqué, l’inflation alimentaire reste élevée à la suite des chocs de la pandémie de COVID-19, de l’urgence climatique, de la guerre en Ukraine, des perturbations de la chaîne d’approvisionnement et de la hausse des taux d’intérêt. Près de 350 millions de personnes dans 79 pays souffrent d’insécurité alimentaire aiguë et la sous-alimentation est en augmentation. La situation devrait s’aggraver, car les disponibilités alimentaires mondiales vont tomber à leur niveau le plus bas en trois ans. Les besoins sont particulièrement criants dans 24 pays identifiés comme des points chauds de la faim, dont 16 en Afrique.Inquiétude pour les points chauds de la faim
« Nous appelons les gouvernements et les donateurs à soutenir les efforts déployés au niveau des pays pour répondre aux besoins dans les points chauds, partager des informations et renforcer la préparation aux crises », ont déclaré les dirigeants.Ils ont souligné que le PAM et la FAO avaient besoin de fonds d’urgence pour venir en aide immédiatement aux plus vulnérables. Le PAM et ses partenaires ont atteint un nombre record de personnes l’année dernière. L’agence onusienne a fourni une aide alimentaire et nutritionnelle à plus de 140 millions de personnes grâce à un montant record de 14 milliards de dollars de contributions. La FAO a également investi 1 milliard de dollars pour soutenir plus de 40 millions de personnes dans les zones rurales avec des interventions agricoles, tandis que la Banque mondiale a fourni un programme de 30 milliards de dollars pour la sécurité alimentaire couvrant une période de 15 mois jusqu’en juillet. Des fonds doivent également être mobilisés afin que que le Fonds fiduciaire pour la réduction de la pauvreté et pour la croissance (FFRPC) du FMI puisse fournir des financements concessionnels aux pays les plus pauvres. Par ailleurs, son nouveau guichet ‘Choc alimentaire’ a jusqu’à présent soutenu l’Ukraine, le Malawi, la Guinée et Haïti. Les donateurs et les gouvernements devraient également apporter leur appui à l’Alliance mondiale pour la sécurité alimentaire, qui promeut une meilleure préparation aux crises.
Faciliter les échanges commerciaux
Les dirigeants des cinq organisations ont appelé à faciliter les échanges commerciaux, à améliorer le fonctionnement des marchés et à renforcer le rôle du secteur privé.« Les pays devraient minimiser les distorsions commerciales, renforcer la fourniture de biens publics et permettre au secteur privé de contribuer de manière significative à l’amélioration des résultats en matière de sécurité alimentaire », ont-ils préconisé.En outre, ils ont exhorté les gouvernements à éviter les politiques telles que les restrictions à l’exportation, qui peuvent avoir un impact sur les populations pauvres des pays à faible revenu qui importent des denrées alimentaires, tout en plaidant pour un soutien aux mesures de facilitation des échanges qui améliorent la disponibilité des aliments et des engrais.
Le rôle crucial des biens et services publics
Bien que les pays aient levé certaines interdictions d’exportation sur le blé et le riz, ils ont averti que de nouvelles restrictions et interdictions, en particulier sur les légumes, entravent la disponibilité dans le monde entier.« La sécurité alimentaire mondiale peut être renforcée si les gouvernements soutiennent à la fois les producteurs et les consommateurs de denrées alimentaires de manière intelligente et ciblée, par exemple en renforçant la fourniture de biens et services publics de manière à améliorer durablement la productivité agricole », ont-ils déclaré.La Banque mondiale dispose d’une plate-forme de 6 milliards de dollars qui aide les agriculteurs à accéder aux engrais et autres fournitures essentielles, tout en aidant les entreprises privées à faire des investissements à plus long terme, précise le communiqué.
Réformer des subventions nuisibles
Les pays devraient également réformer et réaffecter les subventions préjudiciables à des programmes plus ciblés et plus efficaces en faveur de la sécurité alimentaire mondiale et de systèmes alimentaires durables.« A l’échelle mondiale, la réponse à l’inflation par la protection sociale prend le plus souvent la forme de subventions, dont la moitié sont non ciblées, inefficaces et coûteuses pour des gouvernements déjà sous pression », ont déclaré les dirigeants. « Il faudrait intensifier le soutien aux pays pour renforcer et déployer des stratégies de protection sociale globales, réalisables et adaptées aux chocs ».
Soutenir l’agriculture durable
Ils ont en outre souligné la nécessité de réexaminer et de réformer le soutien à l’agriculture. Alors que cette aide représentait environ 639 milliards de dollars par an entre 2016 et 2018, et qu’elle a augmenté depuis lors, les agriculteurs n’ont reçu que 35 cents pour chaque dollar dépensé.« Une grande partie de ce soutien encourage l’utilisation inefficace des ressources, fausse les marchés mondiaux ou sape la durabilité environnementale, la santé publique et la productivité agricole », ont-ils déclaré.Le financement devrait plutôt servir à renforcer la résilience et la durabilité du système agroalimentaire, notamment par l’adoption de bonnes pratiques agricoles, par la recherche et l’innovation, et par l’amélioration des infrastructures.
« Des mesures sont déjà en cours pour relever les défis structurels sous-jacents en matière de protection sociale et sur les marchés des denrées alimentaires et des engrais, mais une action plus concertée dans ces trois domaines clés est nécessaire pour éviter une crise prolongée », ont-ils noté.