La dernière programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) de l’île de La Réunion opère un véritable tournant vert, en établissant de nouvelles priorités d’actions qui visent à atteindre une maîtrise de l’énergie. Au programme : beaucoup moins de fossiles et bien plus de biomasse, de photovoltaïque, d’énergie de récupération.
Un décret, paru jeudi 21 avril, rebat les cartes de la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) de La Réunion, adoptée en 2017. Cette nouvelle mouture couvre deux périodes de cinq ans – de 2019 à 2023, puis de 2024 à 2028. Le texte détermine les priorités concernant « toutes les énergies du point de vue de la maîtrise de la demande, de la diversification des sources d’énergie, de la sécurité d’approvisionnement, du développement du stockage de l’énergie et des réseaux », développe le décret.
Dans le détail, la PPE encadre la mise en œuvre de la transition énergétique de l’île. Une synthèse de la préfecture de la région Réunion en énonce les points saillants : « les autorisations d’exploiter les centrales de production électrique » ; l’« optimisation de l’intégration des énergies renouvelables (EnR) sur le réseau » ; « le lancement d’appels d’offres photovoltaïques par la Commission de Régulation de l’Énergie, si les objectifs de développement de la filière fixés par la PPE ne sont pas atteints » ; la présentation d’un « plan stratégique [d’investissement] pour les exploitants produisant plus du tiers de la production électrique régionale » ; le « déploiement des bornes ouvertes au public pour la recharge des véhicules électriques.
Halte au fossile, bienvenue à la biomasse
La majorité des importations énergétiques de la Réunion sont des combustibles fossiles. L’une des priorités de cette nouvelle PPE est d’abandonner en grande partie le recours à ces énergies fossiles (charbon et du fioul lourd en tête) dès 2023. Comment ? En misant sur la conversion à la biomasse des centrales thermiques au charbon (Albioma) et au fioul (EDF PEI).
A l’avenir, les deux centrales d’Albioma carbureront majoritairement grâce à l’importation de pellets de bois (biomasse solide) pour remplacer le charbon. La centrale fioul EDF PEI sera, quant à elle, convertie à la biomasse liquide, issue d’huiles végétales (colza, tournesol, mais pas d’huile de palme, ni de soja), voire d’huiles organiques issues d’huiles de cuisson usagées et de graisses animales.
Sécurisation des approvisionnements
Nombre de ces ressources seront importées. Et la préfecture de La Réunion de rappeler que leur impact sur la biodiversité et la forêt est maîtrisé, compte tenu de l’exigence de conformité aux critères de durabilité de la biomasse issue du droit européen, et plus particulièrement de la directive RED II.
« Sur la zone d’approvisionnement identifiée, lorsqu’une tonne de bois est récoltée, il en pousse 1,9 tonne sur la même période. Les projets de combustion de biomasse inscrits à la PPE permettent également une forte réduction des émissions nettes de gaz à effet de serre par rapport à la situation actuelle (- 84 % pour la biomasse solide et – 65 % pour la biomasse liquide) », développe cette même synthèse.
Cap sur les EnR et la récupération
D’autres EnR que la biomasse seront mobilisées. La PPE fixe des objectifs ambitieux pour le développement du photovoltaïque qu’elle qualifie d’« ENR mature », et dont les « coûts de production [sont] en forte baisse ». L’objectif visé est de + 250 à +310 MW à l’horizon 2028 (190 MW actuellement). L’éolien terrestre vise +75 MW pour 2028 et inclut le renouvellement des centrales de Sainte-Rose et Sainte-Suzanne.
La PPE incite également à pousser d’autres projets moins significatifs sur l’île, comme la petite hydroélectricité, la géothermie, l’éolien offshore, ou encore l’énergie marine. Il est également prévu d’accélérer sur les combustibles solides de récupération afin d’atteindre une production de 130 kt/an. Soit 7 % de la production électrique annuelle de La Réunion.
Maîtriser la demande d’énergie
Comme le dit l’adage : la meilleure énergie, c’est celle qu’on ne consomme pas. C’est pourquoi la PPE accorde une attention toute particulière à la question de la maîtrise de la demande en électricité (MDE). La programmation fixe un objectif de réduction de 8 % de consommation d’électricité en 2028. Ce qui correspond, peu ou prou, « à 438 GWh évités en 2028 ». Soit la consommation annuelle de 300 000 habitants.
A ce titre, il existe, depuis janvier 2019, un dispositif de financement des actions MDE nommé cadre territorial de compensation. Lequel « est spécifique aux ZNI (Zones non interconnectées au réseau métropolitain continental, ndlr) et chaque territoire concerné, dont La Réunion, élabore son propre cadre territorial de compensation », détaille la synthèse.
Cette MDE passera par tout un panel d’actions d’économies d’énergie mis en place pour le consommateur final. Citons : l’amélioration du bâti, la production d’eau chaude sanitaire par le solaire ou des technologies électriques performantes, ou encore le remplacement d’équipements existants par des matériels plus efficaces.
Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) La Réunion 2019-2028 Synthèse