Alors que se tient aujourd’hui le sommet de l’ONU sur le climat qui réunit une centaine de chefs d’Etat et de gouvernement, les Amis de la Terre publient une étude accablante : Institutions financières internationales et climat : la grande hypocrisie. L’ONG révèle que si les dirigeants mondiaux multiplient les déclarations annonçant leur volonté de lutter contre les changements climatiques, ils continuent à financer massivement les énergies fossiles et les industries les plus émettrices de CO2 à travers les institutions financières internationales (IFIs) dont ils sont les actionnaires. Le rapport épingle les activités de deux des plus grosses IFIs, la Banque mondiale et la Banque européenne d’investissement (BEI). Les Amis de la Terre demandent à la France, qui a un poids crucial au sein de ces institutions, de prendre des mesures pour mettre en cohérence les actions des IFIs et ses promesses en matière de lutte contre les changements climatiques.
Alors que le réchauffement de la planète est principalement du à la combustion de sources d’énergies fossiles, la Banque mondiale a doublé ses financements aux fossiles en 2008, et a augmenté son soutien au seul charbon de 256% entre 2007 et 2008, tandis que les énergies renouvelables ne représentaient que 16% de ses investissements énergétiques. Même tendance pour la Banque européenne d’investissement (BEI), la Banque de l’Union européenne, qui, ces cinq dernières années, a investi quatre fois plus d’argent dans les énergies fossiles que dans le solaire, l’éolien et le bois-biomasse réunis, et accordé des millions d’euros de prêts à l’aviation et au transport routier. Pour Anne-Sophie Simpere, chargée de campagne Finance publique aux Amis de la Terre : « Les politiques d’investissement de la Banque mondiale et la BEI sont décidées par les mêmes Etats dont les dirigeants enchaînent les déclarations pour la lutte contre les changements climatiques. Comment peuvent-ils prétendre enrayer la crise climatique en soutenant des investissements massifs dans les énergies fossiles, la route ou l’aviation ? Ce double discours est inacceptable : les promesses de réduction d’émissions de CO2 ne seront jamais tenues en continuant à extraire et brûler les sources d’énergie fossiles pour alimenter notre surconsommation. » Entre 1997 et 2007, la Banque mondiale a financé des projets fossiles qui émettront 26 milliards de tonnes de CO2 au cours de leur durée de vie, soit 47 fois les émissions annuelles de la France. Anne Bringault, directrice des Amis de la Terre, poursuit : « Pour éviter que l’élévation des températures moyennes mondiales ne dépasse les 2°C, les émissions des pays industrialisés doivent être réduites de 80 à 95 % d’ici 2050 et de 25 à 40 % d’ici 2020, selon le GIEC. Cela va nécessiter des investissements importants pour refondre en profondeur nos systèmes de production et de consommation vers des modèles sobres, notamment en carbone. Il est scandaleux que, dans ce contexte, des institutions publiques aussi puissantes et influentes que la Banque mondiale et la BEI financent au contraire l’aggravation de la crise climatique. » L’OCDE, le Parlement européen , le Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE) et l’Organisation internationale du travail (OIT) ont déjà demandé la fin des financements publics aux énergies fossiles, et la réorientation de ces fonds vers des alternatives durables, sans que leurs rapports ne soient suivis d’effet. Les Amis de la Terre soulignent que la France est un acteur influent au sein de la Banque mondiale et la BEI. Il lui demandent donc d’exiger que ces institutions publient les émissions de gaz à effet de serre induites par les projets qu’elle financent, adoptent des objectifs contraignants de réduction de ces émissions et arrêtent tout soutien aux énergies fossiles et à l’aviation.Rapport « Institutions financières internationales et climat : la grande hypocrisie »
Sommaire Synthèse I. Contexte L’urgence climatique : on ne négocie pas avec le climat, on agit ! Le rôle des institutions financières internationales face aux changements climatiques Banque mondiale et Banque européenne d’investissement, dangers climatiques ? 2. Banque mondiale : un fossile climatique Une politique énergétique archaïque Des investissements massifs dans les énergies fossiles Les renouvelables à la traîne Pour la Banque mondiale, le charbon est une énergie « propre » Une communication sophistiquée mais biaisée 3. La Banque européenne d’investissement réchauffe le climat Transports : un penchant inquiétant pour la route et l’aérien Energie et industrie : l’addiction au carbone Prêts globaux : la grande inconnue 4. Recommandations des Amis de la Terre à la France – Télécharger le Rapport « Institutions financières internationales et climat : la grande hypocrisie »Nouveau rapport : dérivés du carbone, attention danger !
Un nouveau rapport des Amis de la Terre Etats-Unis révèle que les projets actuels de création d’un marché du carbone mondial sont extrêmement risqués et ne s’accompagnent pas de la régulation financière nécessaire. Alors que la crise financière n’est pas terminée, ses leçons n’ont toujours pas été tirées et le G20 propose aujourd’hui de mettre la charrue avant les bœufs en créant un nouveau marché géant de produits dérivés climatiques avant même d’avoir régulé celui des produits dérivés conventionnels. Alors que les dirigeants des pays du G20 sont réunis à Pittsburgh, les Amis de la Terre Etats-Unis viennent de publier un rapport dénonçant la complexité, la volatilité et les risques de spéculation excessive du marché carbone envisagé aux Etats-Unis. Le rapport, intitulé « Simpler, Smaller and More Stable » (Plus simple, plus petit et plus stable), révèle que les propositions actuelles pour réguler les produits dérivés sont nécessaires, mais loin d’être suffisantes pour assurer l’intégrité environnementale et financière de ces nouveaux marchés. C’est pourtant vers un marché du carbone mondial que propose d’aller le G20 dans le document préparatoire au sommet sur les marchés carbone et la finance privée rédigé par le groupe d’experts sur le financement des changements climatiques. « Il est irresponsable de demander un marché international des produits dérivés climatiques quand nous n’avons rien aujourd’hui qui ressemble de près ou de loin à une autorité de contrôle internationale pour réguler les produits dérivés conventionnels », dénonce Yann Louvel, chargé de campagne Finance privée aux Amis de la Terre. Sébastien Godinot, coordinateur des campagnes aux Amis de la Terre, poursuit : « La proposition de loi américaine actuellement en négociation tout comme le paquet énergie-climat et les propositions du G20 visent à construire un marché difficile à réguler par nature en promouvant la compensation sous toutes ses formes. Les crédits carbone issus des différents mécanismes de compensation seront échangés comme produits dérivés de gré à gré, avec une opacité très forte. Ce sont pourtant ces derniers qui ont joué un rôle significatif dans la crise financière et qui font partie des instruments financiers les plus difficiles à réguler ». Les propositions actuelles se basent sur l’idée fausse que le carbone sera une nouvelle marchandise, alors qu’il est une externalité négative. Les mécanismes de vérification et de régulation sont absolument essentiels pour éviter de potentielles manipulations. La taille de ce nouveau marché attirera en effet les spéculateurs et l’innovation financière effrénée qui pourraient mettent en péril sa gouvernance. Yann Louvel conclut : « Non seulement ces produits posent un problème de régulation mais ils ouvrent aussi toute grande la voie aux subprime carbon : des produits dérivés qui sont supposés déboucher sur des réductions d’émissions de GES mais qui sont fictifs et pourraient voir leur valeur s’effondrer. Un des impératifs pour réduire les risques est de rejeter les mécanismes de compensation Nord-Sud ».