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Publication du décret au journal officiel sur le reporting extra-financier

Le reporting extra-financier tourne la page des démarches de communication sur le développement durable, au profit des démarches de preuve et de transparence

Une tribune de Patrick d'Humières

Avec la publication aujourd’hui au journal officiel du décret d’application de l’article 225 de la loi Grenelle 2, les entreprises françaises vont devoir disposer d’un suivi de leur performance extra-financière qui va stimuler leur compétitivité. La France s’inscrit ainsi parmi les pays avancés en matière d’information extra-financière, qui demandent aux entreprises de plus de 500 salariés de publier un état de leur performance sociale, environnementale et sociétale, permettant aux investisseurs et aux parties prenantes de mesurer leur durabilité réelle. Pour Patrick d’Humières, Fondateur et Directeur Général de l’Institut RSE Management, « la publication aujourd’hui du décret d’application de la loi Grenelle 2 sur le reporting extra-financier tourne la page des démarches de communication sur le développement durable, au profit des démarches de preuve et de transparence ».

Le reporting extra-financier, c’est parti ! Comment en faire un outil de création de valeur économique et sociétale ? par Patrick d’Humières La publication aujourd’hui par le Gouvernement du décret d’application de l’article 225 de la loi Grenelle 2 (Décret n° 2012-557 du 24 avril 2012 disponible en ligne ici), instaurant un reporting obligatoire des informations sociales, environnementales et sociétales de la part des entreprises de plus de 500 salariés dans leur rapport de gestion, à destination de leur gouvernance, consacre un énorme changement et ouvre trois évolutions importantes dans le management des firmes. Le changement est le passage radical de la question du développement durable, d’une posture d’image et de communication, consacrée dans le passé par des rapports de DD jugés complaisants et peu informatifs, à une démarche de preuve, articulée autour de données précises qui mesurent les progrès sociaux, environnementaux et sociétaux des entreprises, au regard de référentiels normés. Le développement durable ne se déclare plus et ne se limite plus aux meilleures intentions et bonnes pratiques que l’entreprise conduit « à sa main ». Il devient un modèle mesuré au travers de variations de résultats, allant de la performance énergétique aux contributions locales, en passant par les accidents, l’absentéisme, les investissements de formation, la gestion des déchets et l’utilisation des matières non renouvelables, des sols etc… Ce cadrage, consacré par l’intégration des données DD & RSE au sein du rapport de gestion et présenté à la gouvernance de l’entreprise, ouvre trois grandes évolutions dans le management des firmes. Il fait d’abord du rapport aux enjeux collectifs de la planète une des finalités de l’entreprise, sur laquelle il devient possible de savoir ce qui est fait et comment, dans une transparence opposable et comparable, dont les parties prenantes de l’entreprise peuvent se saisir sur des bases fiables. La deuxième mutation est de conférer aux directions financières, gardiennes de l’information qui engage l’entreprise, la responsabilité d’établir ces « comptes sociétaux », aux côtés des comptes financiers, en utilisant des méthodes proches et en mettant en cohérence les données pour délivrer une représentation fidèle de la valeur sociale et sociétale de l’entreprise, aujourd’hui et demain, matérielle et immatérielle, réelle et potentielle, avec une plus juste appréciation de ses impacts globaux. La troisième évolution qui justifie l’intérêt du reporting extra-financier est de permettre à l’entreprise de passer d’une vision défensive et justificatrice, à une vision pro-active et constructive, pour orienter son modèle économique au regard des nouveaux défis sociétaux, des nouveaux usages et des nouvelles attentes de développement du monde contemporain. Le reporting est un outil de progrès interne en même temps qu’il constitue un outil de transparence accrue, base objective pour passer des accords de progrès avec les parties prenantes de l’entreprise, ce qu’on dénomme désormais « l’entreprise collaborative ». Trois questions pratiques se posent souvent pour entreprendre ce reporting extra-financier : que coûte-t-il, qui doit le faire, comment le présenter ? Il coûte peu en réalité, car sa fabrication rejoint les process d’information financière, même s’il faut investir dans un système d’information et si la vérification peut constituer une mission significative. Tout dépend de la complexité de la firme et de sa courbe d’apprentissage. En réalité, l’entreprise a intérêt à confier la réalisation à un tiers expert qui lui fera gagner beaucoup de temps, qui transfèrera son savoir et qui fiabilisera le dispositif, réduisant par là même le coût de la vérification, alors que l’expérience prouve que les acteurs internes subissent fortement cette problématique, lourde et nouvelle pour eux. Le conseil expert aidera à réaliser « la plate-forme de présentation des donnés extra-financières » qui permet d’irriguer les documents de gestion, les sites d’information internes et externes et les questionnaires des raters qui prennent beaucoup de temps aux entreprises. La maîtrise de cet outil de « dispatching » est un savoir-faire propre aux consultants qui maîtrisent le reporting intégré et qui connaissent les utilisateurs finaux. Le défi de l’entreprise est donc bien de donner de la valeur à cette information extra-financière, en ne se perdant pas dans son élaboration, mais en apprenant à la concevoir et l’utiliser pour orienter son modèle dans un sens plus durable et justifier des accords de progrès, avec ses investisseurs et ses parties prenantes diverses. Cette création de valeur extra-financière est le défi que nous aidons les entreprises à relever par notre expérience de ce levier, qui n’en est qu’à ses débuts.
Patrick d'HUMIERES
Patrick d’HUMIERES
A propos de Patrick d’HUMIERES « Il n’est pas possible d’avancer dans la croissance durable sans que les décideurs et les cadres opérationnels aient pris le temps de comprendre ce que cela signifie dans l’évolution du modèle ». Patrick d’Humières, Président et fondateur de l’Institut RSE Management , est un des pionniers de la RSE en France. Spécialiste des rapports Entreprise et Société, membre du Conseil National du développement durable, Patrick d’Humières a lancé le premier forum de l’entreprise responsable en 1990. Fondateur et premier président du collège des directeurs de développement durable, il a été mandataire entreprises au Grenelle de l’environnement. Il a aussi été auditeur de la session CSR 2009 de la Harvard Executive Business School, représentant français au forum Euro China sur la RSE (juillet 2010), et a participé aux groupes de travail du GRI, du Global Compact, de l’ISO 26000. Enfin, il est l’auteur de manuels de référence: « Les pionniers de l’entreprise responsable » (1992) et « Management du développement durable » (1994). Dernier ouvrage paru en 2010 : « Le développement durable va-t-il tuer le capitalisme ? » (Editions Maxima)

 

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1 COMMENTAIRE

  1. RSE et pratiques de Reporting RSE pour les entreprises concernées par l’article 225 de la loi Grenelle 2
    Tennaxia publie aujourd’hui son étude portant sur la mise en œuvre des démarches RSE et les pratiques de reporting RSE pour les entreprises cotées (SBF 120 et CAC Mid & Small) et non cotées. L’article 225 de la loi dite Grenelle 2 impose aux entreprises, selon certains seuils et statuts, de publier des informations extra-financières et de confier à un organisme tiers indépendant leur vérification

    Depuis l’avènement de la loi NRE, de nombreuses études ont été consacrées au reporting extra-financier des entreprises du CAC 40. Avec l’entrée en vigueur de l’article 225 de la loi Grenelle 2, plusieurs études ont été consacrées aux entreprises du SBF 120 et à des échantillons composés d’entreprise du CAC 40 et d’ETI cotées. Tennaxia a souhaité adresser prioritairement les entreprises non cotées et entreprises cotées du CAC Mid & Small afin de dégager de nouvelles tendances. Si 33 entreprises ont répondu à l’étude adressée à 75 sociétés, 22 questionnaires ont été totalement exploitables, dont 59% de cotées (38% du SBF 120 et 62% CAC M&S).

    La mise en œuvre des démarches RSE

    Le retour d’expérience des entreprises cotées, précédemment assujetties à la Loi NRE, leur confère globalement une plus grande maturité en matière de RSE que celles non cotées. Les fondamentaux des démarches RSE – comme la définition des enjeux, traduits par des engagements opérationnels assortis de KPI’s et étayés par des plan d’actions pilotés par des indicateurs – sont plus fréquemment appliqués. Le Grenelle de l’environnement a été un facteur déclenchant de la mise en œuvre des démarches RSE pour plus de 70% du panel et dans cette veine, les directions développement durable montent en puissance avec 27% du panel membres de Comité de direction, et 37% reportant directement à la direction générale.

    Au final, il ressort que si 90% des entreprises de l’échantillon ont bien identifié les enjeux de leur Responsabilité Sociétale d’Entreprise, seulement 55% les pilotent au moyen d’indicateurs clés de performance. La mise en place de comités RSE reste encore marginale avec seulement 36% des entreprises utilisant cet organe transversal d’intégration de la RSE dans l’ensemble de l’entreprise. En revanche, l’étude met en perspective une RSE proactive qui s’installe progressivement dans la stratégie des entreprises ; la performance globale et la compétitivité récoltent davantage de suffrages que la conformité réglementaire, le management du risque et l’amélioration de l’image comme facteur de mise en œuvre des politiques RSE.

    Si l’usage des référentiels internationaux de RSE fait partie intégrante du paysage, force est de constater que le Pacte Mondial (référentiel d’engagement) présent chez un tiers des répondants, devance le référentiel de mise en œuvre qu’est le référentiel ISO 26000 (22%) et la GRI G3.1 (17%). On notera à deux jours du lancement officiel de la GRI G4 à Paris (dont Tennaxia est partenaire), qu’une entreprise sur envisage de suivre les principes de Reporting de la GRI G4.

    La prise en compte des parties prenantes, pratique fondamentale de l’ISO 26000, principe de la GRI, l’une des propositions du rapport Brovelli, constitue clairement une piste d’amélioration à prioriser avec son corolaire, le test de pertinence. Ainsi, 48% des entreprises de l’échantillon n’ont pas identifié leurs parties prenantes quand 5% ont réalisé un test de pertinence.

    Les pratiques de reporting

    Le reporting RSE s’inscrit naturellement dans la démarche RSE pour une majorité d’entreprises de l’échantillon ; la pression réglementaire exercée sur l’entreprise n’est plus le principal levier de la mise en œuvre du reporting extra-financier. Les entreprises ont de plus en plus conscience de son rôle dans l’exposition de leur performance globale.
    57% des entreprises déclarent orienter le contenu de leur reporting en fonction des principaux impacts de leur activité (résultat à tempérer au regard de la très faible utilisation du test de pertinence). Si l’environnement est traité à part égal avec le social, le sociétal est quant à lui très en retrait.

    Si 62% des entreprises de l’échantillon ont mis en place une procédure de collecte et de validation des données, seulement 38% ont formé leurs collaborateurs au processus de reporting.

    Le tableur Excel reste majoritairement utilisé (59%) avec ses limites quant à la qualité des données, la traçabilité des échanges et la matérialité des informations. Rappelons que l’arrêté ministériel du 13 mai 2013 publié au JO le 14 juin 2013, prévoit que les OTI doivent s’enquérir des procédures de contrôle interne et de gestion des risques, doivent examiner par échantillonnage les processus de collecte, de compilation, de traitement et de contrôle des informations et doivent réaliser des tests de détails.

    18% des entreprises de l’étude utilisent un logiciel spécifique de reporting extra-financier.
    On relève également que les données sont majoritairement collectées aux niveaux du siège et des filiales avec un déficit potentiel de granularité des données et informations collectées ; l’usage massif du tableur Excel et ses carences en matière de fréquence de campagne explique potentiellement cela. La RSE comme le management de la qualité, induit la mise en œuvre de démarches d’amélioration continue et donc de mesure à la maille opérationnelle la plus pertinente pour l’entreprise. Il s’agit là d’une piste d’amélioration pour les entreprises que l’on peut corréler au déficit de KPI’s précédemment relevé.

    Quant au contrôle et à la vérification, les directions de l’audit et du contrôle sont mobilisées pour seulement une moitié des entreprises répondantes, et les entreprises s’étant volontairement soumises à la vérification (absence d’arrêté pour la majorité des exercices commençant à partir du 31/12/2011) ont sollicité à part quasi égale leur CAC ou un organisme de certification agréé COFRAC.

    En guise de conclusion, seulement un quart des entreprises de l’échantillon envisage d’évoluer vers le rapport intégré alors même que l’IIRC s’apprête à publier les lignes directrices pour un rapport intégré et que de nombreuses voix se sont prononcées en faveur de ce type de rapport.
    Plusieurs supports et canaux de publication sont utilisés afin d’adresser au mieux des parties prenantes… restant à mieux maîtrisées (52% des entreprises cartographient leurs parties prenantes).

    Si l’on constate une évolution quant à l’usage des canaux de diffusion du rapport RSE, avec une montée en puissance du numérique, le rapport RSE 2.0 est pour le moment au point mort, malgré la percée significative des réseaux sociaux et au-delà… leur usage.

    Finalement, le reporting RSE est un support polymorphe de la RSE. Majoritairement évalué comme un support majeur de la communication corporate, il est aussi outil de gestion de la performance, du management du risque et de la mobilisation interne. Curieusement, il n’est qu’encore faiblement perçu comme une plateforme de dialogue avec les parties prenantes.

    A propos de Tennaxia

    Tennaxia, leader des solutions mixtes « conseil + logiciels » en Santé, Sécurité, Environnement et en Responsabilité Sociétale des Entreprises est présent depuis 2001 auprès des industriels responsables, avec plus de 2500 sites utilisateurs dans plus de 60 pays pour piloter leur performance durable. L’entreprise de 45 personnes, créée à Laval et dirigée par ses fondateurs, accueille dans son capital des personnalités reconnues du monde de l’entreprise, telles que Bernard Bourigeaud (fondateur d’Atos). Ses clients sont principalement des grands groupes parmi lesquels Arkema, Pierre Fabre, Renault, Bosch …

    Bertrand Desmier
    Directeur du Pôle Conseil RSE