Dans cette tribune, Jean-Baptiste Boyer, co Président d’Énergie Partagée, revient sur les enjeux majeurs du forum EnerGaïa 2025 et l’importance de dépasser la logique d’acceptabilité pour aller vers une véritable appropriation territoriale des projets d’énergies renouvelables. Il aborde les limites des mécanismes de partage de la valeur purement financiers, la nécessité d’impliquer citoyens et collectivités dans l’investissement et la gouvernance, les bénéfices économiques, sociaux et écologiques des projets d’énergie citoyenne et l’urgence de changer d’échelle pour atteindre les objectifs de transition énergétique.

Le Forum 100% EnR – Parc des Expositions de Montpellier – France
Le Forum EnerGaïa, porté par la Région Occitanie, offre des solutions environnementales pour les territoires, les villes et les industries engagés dans la transition énergétique. La 18e édition du Forum, qui s’est tenue du 10 et 11 décembre 2025 au Parc des Expositions de Montpellier a accueilli 22 500 participants. Une fréquentation record, en phase avec l’augmentation du nombre d’exposants, qui a plus que doublé ces trois dernières années et qui confirme la dynamique remarquable des acteurs de la transition énergétique.

Dans un contexte de crise climatique et de crise de la biodiversité, la « transition énergétique » se caractérise aujourd’hui par trois grands phénomènes : l’électrification des usages, la maîtrise de la demande en énergie et le développement massif des énergies renouvelables, pour permettre de remplacer les énergies fossiles encore présentes à plus de 40 % dans notre mix énergétique.
Tous les scénarios1 prospectifs s’accordent sur ces points et le caractère indispensable du déploiement des énergies renouvelables pour faire notre part en termes de lutte contre la crise écologique.

L’important est donc davantage de savoir comment permettre le développement massif des énergies renouvelables. C’est à cet endroit que le partage de la valeur apparaît comme une solution facilitatrice. Derrière ce terme peuvent se cacher des mises en œuvre très différentes, allant de la distribution de chèques énergie à des prix d’électricité réduits pour les riverains des projets à la participation des acteurs locaux à l’investissement et à la gouvernance des projets.
Si tous ces mécanismes ont en commun la volonté d’accroître les retombées locales des projets d’énergies renouvelables, il est évident qu’ils ne se valent pas. Lorsque des mesures de partage de la valeur sont mises en œuvre, elles sont, la plupart du temps, purement financières, ce qui place les personnes concernées dans une relation strictement commerciale vis-à-vis du projet.
De fait, il s’agit d’actions visant à une simple acceptation et la véritable question : quel est le prix de la paix ? Dans le pire des cas, ces rétributions sont parfois présentées comme une forme de compensation d’un dommage subi, installant l’idée que la proximité des énergies renouvelables est néfaste pour les riverains. Pourtant, la perception des éoliennes est très positive en France, en particulier pour les personnes résidant à moins de 10 km d’un parc éolien2.

Comment alors penser que ces mécanismes peuvent permettre de passer de 15 % d’énergies renouvelables dans notre mix énergétique actuel à plus de 70 %3 en 2050 ?
Si travailler l’acceptabilité est une première approche, la question de l’appropriation des projets paraît beaucoup plus pertinente au regard des enjeux. Il est possible de faire le parallèle avec les statuts de locataire ou de propriétaire. Dans le premier cas, il est bien évidemment possible d’apporter quelques modifications à la marge mais les paramètres sont figés, la réflexion se cantonne au fait de savoir si le loyer est juste ou non. Dans le second, il est possible de décider de très nombreux paramètres.

Partout en France, près de 450 projets de ce type existent déjà. Les citoyens et les collectivités créent des installations d’énergies renouvelables labellisées ou participent à leur investissement et à leur gouvernance. On y décide à plusieurs les choix d’implantation au regard des différents impacts et retombées. Mais on peut également y choisir ce qui sera fait de l’énergie produite.

Les énergies renouvelables sont un moteur de développement pour les territoires. Maîtrisées et financées par les collectivités territoriales et les habitants, les installations citoyennes d’énergie renouvelable maximisent les retombées économiques locales.
Ces projets citoyens rapportent au moins deux fois plus aux territoires d’implantation que des projets privés classiques.

Ces retombées économiques supplémentaires sont en outre réalisées sans compromis avec l’exemplarité écologique. Avec la participation des collectivités, il est également possible d’inscrire une installation de production d’énergie renouvelable dans son territoire, en priorisant notamment les zones d’implantation potentielles les unes par rapport aux autres plutôt qu’en répondant au coup par coup aux sollicitations des développeurs sur un projet précis. Cet exercice de planification permet de faire le lien avec les consommations du territoire.
Si les projets d’énergies renouvelables sont trop souvent perçus comme de simples opportunités financières sous couvert d’écologie, la participation des acteurs du territoire à la gouvernance des projets permet de replacer l’installation de production comme un moyen de subvenir à nos besoins énergétiques, en laissant de côté les énergies fossiles.
Créer ou rejoindre un projet d’énergie citoyenne est un bon moyen de passer à l’action. Engagez-vous !
- ADEME, negaWatt, The Shift project : Comprendre 2050 ; Réseau et Transport d’Électricité ↩︎
- Sondage Harris Interactive : les français et l’éolien ↩︎
- Considéré dans les différents scénarios ADEME par exemple ↩︎


