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Le labo de l'économie sociale et solidaire présente :

Pour une autre économie : 50 propositions pour changer de cap

Alternatives Economiques hors-série poche n°46 - Disponible à partir du 25 novembre 2010

En France, le secteur de l’Economie Sociale et Solidaire représente près de 10% du total de l’emploi salarié en France. Soit 2 millions d’emplois, c’est à dire cinq fois plus d’emplois que le secteur automobile… Et pourtant, elle ne suscite, au mieux, qu’un faible intérêt des milieux politiques et économiques traditionnels. Fort de ce constat, Claude Alphandéry, fondateur de France Active, a initié, il y a deux ans, un travail de réflexion sur l’économie sociale et solidaire en associant une centaine d’acteurs du secteur ainsi que des syndicats et des chefs d’entreprises. Cette réflexion a débouché sur le lancement, le 1er novembre 2009, du Labo de l’économie sociale et solidaire, chargé de promouvoir et de mettre en débat un ouvrage collectif intitulé Cinquante propositions pour changer de cap. Un an après, Alternatives Economiques publie le 25 novembre 2010 un hors-série Pour une autre économie.

Pourquoi ce texte et cette démarche ?

Claude Alphandéry, Lieutenant Colonel des Forces Françaises de l’intérieur en 1944, Président d’honneur de France Active, Président honoraire du CNIAE, Président d’honneur de l’AVISE et Président de l’association du projet SOL explique la démarche du Labo : « L’économie sociale et solidaire (ESS), aux racines historiques profondes et à la modernité ardente, rassemble une grande diversité d’initiatives économiques, sociales, culturelles qui ne s’identifient ni au secteur public ni au champ capitaliste. Diverses dans leurs réalités, ces initiatives partagent néanmoins des caractéristiques essentielles : une finalité d’utilité sociale s’inscrivant dans un projet économique ; une mise en œuvre du projet fondée sur une gestion éthique et une gouvernance démocratique ; une dynamique de développement s’appuyant sur un ancrage territorial et une mobilisation citoyenne. Ces principes confèrent à l’ESS une opportunité historique face à la crise d’une économie dominée par le seul profit et dont les effets dévastateurs mettent en péril l’environnement, précarisent l’emploi, jettent dans la misère et l’exclusion un grand nombre de citoyens. Pourtant les initiatives de l’ESS apparaissent encore fragmentées. Leur offre de services et d’emplois n’est pas à la mesure des besoins. Elle ne parvient pas à changer d’échelle, moins encore à devenir une force politique et à incarner un projet de transformation de la société. Pour y parvenir, nous avons engagé une vaste réflexion avec des dizaines de citoyens engagés dans l’ESS et avec les principales organisations qui les rassemblent. Nous avons bénéficié pour ce faire de l’aide financière de la Fondation Léopold Mayer du progrès de l’homme, de l’appui d’éminents chercheurs, et de concours précieux et divers notamment de la Caisse des dépôts et de France Active. Cet ouvrage collectif concrétise cette réflexion. Je l’ai initié et piloté en collaboration avec Laurent Fraisse et Tarik Ghezali. Il se divise en deux parties : Une première partie pour expliquer comment l’ESS peut et doit être un laboratoire pour un autre mode de développement. Un mode de développement qui affirme la centralité de l’homme plutôt que celle de l’Etat ou du capital. Une seconde partie plus opérationnelle présentant 60 propositions pour permettre à l’ESS de changer d’échelle et plus largement de contribuer à un changement de cap de l’économie dans son ensemble. Ce texte s’adresse à l’ensemble des acteurs de l’ESS et au-delà à tous les acteurs, politiques, économiques et civils désireux de s’appuyer sur la crise pour affirmer un nouveau mode de développement plus solidaire et plus soutenable. Il y a urgence. Le débat semble de plus en plus se résumer à l’équation sortie de crise = reprise de la croissance. Le retour d’un « business as usual » fait fi des leçons des crises financière, économique, écologique, sociale, culturelle. Ces crises nous imposent de questionner en profondeur : nos modes de production, de consommation, d’investissement ; de réinterroger le sens de la croissance, du développement ; de construire un nouveau projet de société. L’économie sociale et solidaire est un laboratoire pour y parvenir ».

Un changement de cap civilisationnel

Dans sa préface au hors-série Pour une autre économie, le philosophe Edgar Morin plaide pour une économie plurielle, capable de refouler progressivement l’aire économique déterminée par le seul profit. « L’économie sociale et solidaire s’inscrit dans la voie d’une économie plurielle. Plutôt que de croire à la fin imminente du capitalisme ou à son inéluctable perpétuation, l’économie plurielle signifie qu’il y a possibilité de refouler progressivement et systématiquement l’aire économique déterminée par le seul profit. Cela implique non seulement l’extension du champ de l’économie sociale, mais aussi un ensemble d’évolutions dans tous les domaines, et la revitalisation de la notion capitale de solidarité surtout dans un contexte de désintégration des solidarités traditionnelles. Déjà, dans l’entreprise capitalistique, les idées d’éthique d’entreprise, d’entreprise citoyenne, de commerce équitable peuvent apporter des régulations et limiter l’impératif du profit. Mais c’est surtout au-delà, dans le domaine de la consommation et de la vie quotidienne, que s’imposent des réformes diverses mais convergentes. Ainsi s’agit-il de susciter les résistances aux intoxications consuméristes. Il est temps de promouvoir l’alimentation de saison et de proximité qui favorise l’agriculture maraîchère et fermière, de substituer au règne du jetable celui des objets durables et des métiers de réparation, de favoriser le besoin d’objets artisanaux singuliers plutôt que d’objets industriels. Il s’agit de prendre à nouveau conscience que l’amour est plus important que l’argent et de retrouver la part de gratuité et de responsabilité qui permettent l’épanouissement des relations humaines. Il s’agit en somme de remplacer l’hégémonie de la quantité par celle de la qualité. Certes les plus démunis n’ont pas les moyens d’accéder aux produits bios et fermiers, mais cela signifie que l’économie sociale doit être accompagnée de mesures politiques pour lutter contre les misères croissantes en favorisant le développement de métiers de solidarité et de convivialité et en suscitant des grands travaux « verts ». L’économie sociale doit se développer parallèlement à une grande politique d’humanisation des villes et de revitalisation des campagnes. Si de nombreuses initiatives locales ont déjà surgi, elles restent isolées, inconnues les unes des autres. Il s’agit de les faire converger pour montrer, comme l’annonce ce présent ouvrage, qu’il est à la fois possible et nécessaire de changer de cap. Disons plus : changer de cap signifie changer de voie de développement. Le développement, formule techno-économique générale, s’est appliqué sur tous les continents sans tenir compte des singularités propres à chaque nation ou culture, des savoirs, savoir-faire, arts de vie, valeurs des multiples cultures y compris les plus petites. Cette formule a produit, non seulement de nouvelles classes moyennes jouissant des avantages et des intoxications de l’occidentalisation, mais aussi de gigantesques misères dont témoignent les énormes bidonvilles ceinturant les métropoles d’Asie, d’Afrique, d’Amérique latine. Nous autres, Occidentaux, ne faisons pas que bénéficier d’un développement présenté comme la panacée universelle, mais souffrons des carences humaines, psychiques et éthiques qu’a apportées le développement. La misère morale s’est substituée à la misère matérielle, et la misère matérielle, loin de disparaître, s’accroît dans le déchaînement de l’économie du profit vouée à tout rationaliser, rentabiliser, hyper-spécialiser, chronométrer, c’est-à-dire déshumaniser. Le travail même, désormais soumis aux impératifs managériaux et gestionnaires, produit de plus en plus de souffrances dont témoigne le taux de suicides croissant dans les entreprises managérisées. La logique d’efficacité, de prédictibilité, de calculabilité, hyperspecialisée et chronométrée gangrène aujourd’hui toutes les activités humaines, y compris l’administration. La mécanisation prend les commandes du monde urbain et même du monde rural, avec l’agriculture et l’élevage industrialisés. Elle envahit la vie quotidienne, l’éducation, la consommation, les règles, les loisirs, les services. Pour changer de cap, il faut associer mondialisation et démondialisation (par le retour aux économies de proximité) croissances et décroissances, développement et enveloppement (par le retour vers nos plus profondes nécessités intérieures). Mondialisation, occidentalisation, développement sont les trois faces d’un dynamisme incontrôlé. La science, la technique, l’économie, le profit sont les moteurs de ce dynamisme qui comporte ce que les anciens Grecs appelaient l’ubris – la démesure. Dans cette course effrénée, de nouveaux périls pour toute l’humanité sont apparus avec la prolifération des armes nucléaires, la dégradation de la biosphère, des conflits de mille fanatismes et aveuglements, etc. La crise économique actuelle, que Keynes aurait appelé «crise de l’économie » c’est-à-dire crise du système fondé sur les lois du seul marché, s’inscrit dans un ensemble de crises. Crise de la relation entre les humains et la nature, dont témoignent les multiples dégradations de la biosphère, dont le réchauffement climatique. Crise des sociétés traditionnelles qui tendent à se désintégrer sous le dynamisme de l’occidentalisation ou à se refermer avec hostilité. Crise de la modernité elle-même, qui, dans les pays occidentaux n’a pas réalisé les promesses d’une vie meilleure et harmonieuse, mais créé un nouveau mal-être, malgré l’idée, formulée par Condorcet et devenue un dogme universel jusqu’à la fin du XXe siècle, que le progrès est une loi irrésistible de l’histoire humaine. L’ensemble de toutes ces crises constitue la crise de l’humanité qui n’arrive pas à devenir humanité. Ainsi le développement de l’économie sociale et solidaire s’inscrit-il dans une perspective incluant toute l’humanité. Ce qui n’empêche nullement de commencer dans un cadre national qui, si nous étions fidèles à la tradition née en 1789, devrait être exemplaire. La voie de l’économie sociale et solidaire peut et doit confluer avec d’autres voies, toutes également réformatrices, qui, si elles se développent et se conjuguent pourront constituer LA voie de salut pour l’humanité ».

50 propositions pour changer de cap

En novembre 2009, nous avions relayé sur CDURABLE.Info la première version du document comportant les 50 propositions du Labo : – Télécharger la synthèse des travaux Cinquante propositions pour changer de cap au format PDF. – Télécharger l’intégrale des travaux Cinquante propositions pour changer de cap au format PDF. Le texte en question fût ensuite édité début 2010 sous la forme d’un rapport que le Labo a souhaité aujourd’hui faire évoluer vers une forme plus accessible. Ceci, afin de toucher les relais d’opinions – acteurs de l’ESS, élus politiques sensibles à la cause ESS, journalistes, syndicalistes, étudiants, etc. – susceptibles d’informer, de sensibiliser et de convaincre l’opinion. En partenariat avec Alternatives Economiques Le Labo a donc décidé d’éditer cette publication pensée comme une véritable boîte à outil argumentaire pour celles et ceux qui ont à cœur de plaider pour des pratiques et des valeurs de l’ESS.
Alternatives Economiques hors-série poche n°46 - Disponible à partir du 25 novembre 2010
Alternatives Economiques hors-série poche n°46 – Disponible à partir du 25 novembre 2010
Les 50 propositions que vous allez découvrir dans ce hors-série d’Alternatives Economiques ont pour origine une longue tradition sociale et sont liées au rôle qu’exerce aujourd’hui l’ESS dans une économie en grave déséquilibre ; elles sont liées aussi aux enjeux d’une sortie de la crise par une révision profonde de nos façons de produire, d’échanger, de consommer, d’investir. Ce sont des propositions qui ne peuvent être considérées séparément ; elles s’enchaînent et ne prennent tout leur sens qu’en réunissant deux conditions : une éducation permanente mettant en lumière le lien entre l’épanouissement personnel et l’action collective pour une société respectant l’Homme et l’environnement. C’est ainsi qu’il faut comprendre les 12 chapitres de propositions qui vous sont présentées dans ce document disponible à partir du 25 novembre prochain que vous pouvez commander au prix unitaire de 9,50 € sur le site d’Alternatives Economiques en cliquant ici. En acquérant cet ouvrage de poche, vous contribuez au financement du Labo. – Pour un New Deal d’intérêt général : Les initiatives et entreprises de l’ESS ne se revendiquent pas seulement comme des entreprises différentes sur un marché fût-il d’intérêt général. En raison de la finalité sociale de leur production et de la lucrativité limitée de leur activité, elles se veulent aussi soucieuses du bien commun et font régulièrement des propositions en ce sens. – Pour un Etat investisseur social : Le plan de relance a ciblé des secteurs (automobile, bâtiment) dans lesquels l’ESS est peu ou pas présente. Il est justifié au nom d’un investissement dans des infrastructures à même d’améliorer l’emploi dans l’immédiat et la compétitivité à long terme de l’économie. – Créer des emplois de qualité : La montée historique du chômage est la manifestation la plus visible de la crise en France. N’est-il pas temps d’envisager un autre scénario, celui d’une création d’emplois de qualité sans attendre le retour de la croissance ? Passer à une politique de la qualité de vie suppose de ne pas attendre de l’accroissement du PIB comme la solution à la crise de l’emploi mais d’investir dans des activités à plus fort contenu en travail. Un tel scénario conduit à soutenir massivement et à inciter fiscalement à la reconversion écologique des secteurs agricole, du bâtiment, des transports et de l’énergie qui ont un très fort potentiel de création d’emploi. – Développer les coopérations sur les territoires entre acteurs d’une économie plurielle et solidaire : La contribution de l’ESS au développement local ne saurait se limiter, ni à la croissance du nombre des coopératives, mutuelles et associations sur les territoires, ni à l’appui à la création d’entreprises sociales et d’initiatives solidaires fussent-elles innovantes. – Changer la gouvernance des entreprises : La crise est une opportunité pour changer de vision sur l’entreprise, sur son rôle et sa finalité. L’entreprise ne peut pas (plus) être un simple instrument de génération de profit, dont l’usage est décidé exclusivement par les actionnaires. Elle est une institution, une entité socio-économique complexe et essentielle, encastrée dans la collectivité, chargée de produire des biens et services utiles à la société. – Evaluer les impacts sociaux et environnementaux : La crise amène à reconsidérer le partage de la valeur entre les différentes parties prenantes de l’entreprise (en particulier les salariés), mais aussi à valoriser d’autres modes de gouvernance, d’innovation, d’encadrement des salaires et d’affectation des bénéfices, comme ceux pratiqués au sein de l’ESS. Il y a en fait un besoin impératif d’affirmer un nouveau paradigme d’entreprise. – Développer une finance solidaire et responsable : L’ESS demeure un secteur méconnu des financiers classiques. L’absence d’objectif lucratif et le caractère « mixte » des entreprises ESS en termes d’objet (social, écologique et économique) et/ou de ressources expliquent les difficultés rencontrées par ces entreprises pour financer leur développement. L’ESS peut néanmoins compter sur des investisseurs spécialisés comme la Sifa, l’Ides, Garrigue, Autonomie et Solidarité, etc. – Faire émerger une nouvelle génération d’entrepreneurs sociaux et solidaires : Un des freins majeurs du développement de l’ESS réside dans le manque d’entrepreneurs ESS qualifiés et compétents, pour développer des entreprises ESS déjà existantes, qui ont un potentiel de croissance ; pour redresser des entreprises ESS en difficulté, sur des marchés très concurrentiels et au contexte difficile (désengagement de l’Etat…) : maisons de retraite associatives, tourisme social, etc. ; pour concrétiser des « projets dormants » d’entreprises ESS sur les territoires ; pour dupliquer sur d’autres territoires des initiatives ESS innovantes, ayant fait leur preuve ; pour assurer le renouvellement à la tête d’entreprises ESS dont les dirigeants historiques partent en retraite. – Développer l’innovation sociale : L’innovation sociale consiste à élaborer des réponses nouvelles à des besoins sociaux ou écologiques peu ou mal satisfaits, en faisant coopérer tous les acteurs concernés, publics, privés, civils. – Développer et démocratiser la consommation responsable : S’il n’y a pas de définition unique de la consommation responsable, on peut néanmoins la caractériser par différents critères : orienter ses choix de consommation en fonction de critères sociaux et écologiques ; consommer en favorisant l’équité sur les filières, entre producteurs, distributeurs et consommateurs ; consommer en favorisant une diversité d’offres et en cherchant à préserver une biodiversité économique ; consommer en étant dans une position active d’analyse du produit (composition, origine, filière…) ; consommer mieux plutôt que consommer plus. – Favoriser la vigilance et la participation citoyennes dans le débat économique et social : Le retour du balancier entre marché et Etat se fait sans prise en compte de l’expertise citoyenne et des initiatives économiques de la société civile. D’où l’appel à une vigilance citoyenne sur les décisions économiques des pouvoirs publics et des entreprises plus que jamais légitime et nécessaire, en cette période de crise historique et systémique. – Mettre en place de nouveaux indicateurs de richesse au niveau territorial, national et européen : L’urgence de la sortie de crise se résume parfois à une relance de la croissance à tout prix reléguant au second plan le nécessaire changement de paradigme qu’implique une politique de civilisation.

 

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