Malgré des événements météorologiques catastrophiques et l’émergence d’une crise énergétique due à la guerre en Ukraine, les émissions de gaz à effet de serre ont continué d’augmenter en 2022. Mais l’ONU a maintenu l’urgence climatique en tête des priorités mondiales, parvenant à des accords majeurs sur le financement de l’adaptation au changement climatique – COP 27 – et sur la préservation des écosystèmes naturels terrestres et marins – COP 15. Retour sur une année de travail obstiné de l’ONU en faveur d’ accords internationaux sur le climat et la biodiversité.
À la fin de 2021, lors de la clôture de la Conférence des Nations Unies sur le climat (COP26) à Glasgow, aucun des participants n’aurait pu imaginer qu’une guerre en Ukraine plongerait l’économie mondiale dans la tourmente, et conduirait de nombreux pays à suspendre leurs engagements en faveur d’une économie à faible émission de carbone, alors qu’ils s’efforçaient de réduire leur dépendance à l’égard du pétrole et du gaz russes et de s’approvisionner ailleurs en combustibles fossiles. Dans le même temps, de nombreuses études ont souligné le réchauffement continu de la Terre et l’échec de l’humanité à réduire les émissions de carbone et à s’attaquer à la menace existentielle nées de l’urgence climatique. Néanmoins, l’ONU a continué de mener son action lente et laborieuse en faveur d’ accords internationaux sur le climat, tout en maintenant une pression constante sur les grandes économies afin qu’elles redoublent d’efforts pour réduire leur utilisation de combustibles fossiles et soutenir les pays en développement, dont les citoyens sont les plus touchés par les sécheresses, les inondations et les conditions météorologiques extrêmes résultant du changement climatique d’origine humaine.Vagues de chaleur, sécheresses et inondations record
L’Organisation météorologique mondiale (OMM) a publié une série de rapports sévères tout au long de l’année dont une étude datant de janvier, annonçant que 2021 figurait parmi les sept années les plus chaudes jamais enregistrées. En été, lorsque des vagues de chaleur record ont été signalées dans plusieurs pays européens, l’agence a averti que nous devions d’ores et déjà nous habituer à d’autres pics semblables au cours des prochaines années ; cela, au moment où l’Afrique s’attend à une aggravation de la crise alimentaire, particulièrement dans la Corne de l’Afrique, et au déplacement forcé de millions de personnes et que quatre pays sur cinq sur le continent ne seront vraisemblablement pas en mesure de gérer durablement leurs ressources en eau d’ici à 2030. Alors que certaines régions souffraient d’un manque d’eau, d’autres ont été frappées par des inondations catastrophiques. Au Pakistan, une urgence nationale a été déclarée en août, à la suite de fortes inondations et de glissements de terrain causés par les pluies de mousson qui, au plus fort de la crise, ont recouvert environ un tiers du pays. Des dizaines de millions de personnes ont été déplacées. Des inondations sans précédent au Tchad ont touché plus de 340.000 personnes en août et, en octobre, le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) a déclaré que quelque 3,4 millions de personnes en Afrique de l’Ouest et du Centre avaient besoin d’aide, durant les pires inondations depuis une décennie.Une dépendance « délirante » aux énergies fossiles
Dans son Bulletin sur les émissions à effet de serre d’octobre, l’OMM a détaillé les niveaux records des trois principaux gaz – dioxyde de carbone, protoxyde d’azote et méthane – dont les concentrations ont connu la plus forte augmentation d’une année sur l’autre en 40 ans, et identifié l’activité humaine comme l’un des principaux facteurs du changement climatique. Pourtant, malgré toutes les preuves d’une nécessité urgente d’une transition vers une économie à faible émission de carbone, les principales économies du monde ont réagi à la crise énergétique causée par la guerre en Ukraine en rouvrant d’anciennes centrales électriques et en recherchant de nouveaux fournisseurs de pétrole et de gaz. Le Secrétaire général de l’ONU, António Guterres, a dénoncé leur réaction, la qualifiant de délirante, lors d’un sommet sur le climat en juin, affirmant que s’ils avaient investi dans les énergies renouvelables dans le passé, ces pays auraient évité l’instabilité des prix des marchés des combustibles fossiles. Lors d’un événement sur l’énergie organisé à Washington le même mois, M. Guterres a comparé le comportement de l’industrie des combustibles fossiles aux activités des grandes compagnies de tabac au milieu du XXe siècle : « comme les intérêts du tabac, les intérêts des combustibles fossiles et leurs complices financiers ne doivent pas échapper à leurs responsabilités », a-t-il déclaré. « Quant à l’argument qui conduirait à écarter l’action climatique pour donner priorité aux problèmes intérieurs, il sonne creux ».Un environnement propre et sain, un droit humain universel
La décision prise en juillet par l’Assemblée générale des Nations Unies de déclarer que l’accès à un environnement propre et sain est un droit humain universel a été saluée comme une étape importante, confortée par un texte similaire adopté par le Conseil des droits de l’homme en 2021. M. Guterres a déclaré dans un communiqué que ce développement historique contribuerait à réduire les injustices environnementales, à combler les lacunes en matière de protection et à autonomiser les personnes, en particulier celles qui se trouvent dans des situations vulnérables, comme les défenseurs des droits humains environnementaux, les enfants, les jeunes, les femmes et les peuples autochtones. L’importance de cette initiative a été soulignée en octobre par Ian Fry, le premier Rapporteur spécial des Nations Unies sur la protection des droits de l’homme dans le contexte du changement climatique. M. Fry a déclaré à ONU Info que la résolution commençait déjà à produire ses effets, notant que l’Union européenne discute de la manière de l’intégrer dans la législation et les constitutions nationales.Accords révolutionnaires lors des conférences de l’ONU sur le climat
L’année a été ponctuée par trois sommets importants des Nations Unies liés au climat – la Conférence sur les océans en juin, la Conférence sur le climat COP27 en novembre et la Conférence sur la biodiversité COP15 en décembre, des rencontres décisionnaires importantes qui ont démontré que l’organisation ne se limite pas à dénoncer la situation climatique désastreuse et à appeler au changement. À chaque événement, des progrès ont été réalisés tant en ce qui concerne la promotion des engagements internationaux visant à protéger l’environnement que de l’atténuation des dommages et des destructions causés par l’activité humaine. La Conférence sur les océans a donné lieu à des discussions et des échanges de nouvelles idées sur des questions cruciales. Les dirigeants mondiaux ont reconnu être profondément alarmés par le sort des océans et ont renouvelé leur engagement à prendre des mesures urgentes, à coopérer à tous niveaux et à atteindre pleinement les objectifs dès que possible. Plus de 6.000 participants, dont 24 chefs d’État et de gouvernement, et plus de 2.000 représentants de la société civile ont assisté à la Conférence, réclamant des actions urgentes et concrètes pour faire face à la crise des océans. Ils ont souligné que des actions scientifiques et novatrices, ainsi que la coopération internationale, sont essentielles pour apporter les solutions nécessaires.Financement des « pertes et dommages » pour les pays en développement
La COP27, la Conférence des Nations Unies sur le climat, qui s’est tenue en Égypte en novembre, semblait vouée à se terminer sans accord, et les pourparlers se sont poursuivies bien au-delà de la fin officielle du sommet. Néanmoins, les négociateurs ont réussi non seulement à se mettre d’accord sur la formulation d’un document final, mais aussi à établir un mécanisme de financement pour indemniser les pays vulnérables pour les pertes et dommages causés par les catastrophes induites par le climat. Du fait que ces pays plaidaient depuis des décennies en faveur d’une telle disposition, son inclusion dans l’accord a été saluée comme une avancée majeure. Les détails sur le fonctionnement du mécanisme et sur les bénéficiaires seront mis au point dans les mois à venir. Cependant, peu de progrès ont été réalisés sur d’autres questions clés, en particulier sur l’élimination progressive des combustibles fossiles, et des engagements plus explicites quant à la nécessité de limiter le réchauffement climatique à 1,5 degré Celsius.Une protection accrue de la biodiversité promise à Montréal
Après deux ans de retards et de reports résultant de la pandémie de COVID-19, la quinzième Conférence des Nations Unies sur la biodiversité, la COP15, a finalement eu lieu à Montréal en décembre dernier, et s’est conclue par un accord visant à protéger 30% des terres, des zones côtières et des eaux intérieures de la planète d’ici la fin de la décennie. Inger Andersen, Directrice du Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE), a décrit ce résultat comme une « première étape dans la réinitialisation de notre relation avec le monde naturel ». La biodiversité mondiale est en péril, alors qu’ environ un million d’espèces sont menacées d’extinction. Les experts de l’ONU s’accordent à dire que la crise va s’aggraver, avec des conséquences catastrophiques pour l’humanité, si nous n’optons pas pour une approche plus durable dans nos rapport avec la nature. L’accord, officiellement nommé le Cadre mondial Kunming-Montréal pour la biodiversité, comprend des engagements impressionnants, qui doivent maintenant se traduire en actions. Les modalités de mise en œuvre ont représenté un point d’achoppement majeur lors des précédentes conférences sur la biodiversité, mais l’espoir demeure qu’une plate-forme lancée à la COP15 pour aider les pays à accélérer cette mise en œuvre, permettra de faire une réalité de ce plan.