Pour préparer une « économie post-pétrole », le ministre délégué à l’Industrie a donné jeudi le coup d’envoi de l’expérimentation de véhicules « flex-fuel ». Des voitures hybrides capables de rouler à l’E85, un biocarburant composé à 85% d’éthanol.
Le ministre délégué à l’industrie l’espère : «Qu’à l’horizon 2010 chaque consommateur ait le choix à la pompe entre du carburant fossile ou du renouvelable». Rattraper le retard. Le ministre délégué à l’Industrie, François Loos en est convaincu : «Les voitures à l’éthanol, c’est possible aussi en France et pas seulement au Brésil ou en Suède». Jeudi, il a joint l’acte à la parole en reliant Vitry à Châlons-en-Champagne à bord d’une Ford Focus «flex-fuel». Un véhicule équipé d’un moteur hybride fonctionnant indifféremment au super sans plomb ou à l’E85, un biocarburant composé de 85 % éthanol (issus de la betterave à sucre, du blé, du maïs ou de la canne à sucre), et 15 % de carburant fossile. «Avec le flex-fuel, c’est l’économie de demain que nous préparons. Une économie post-industrielle, une économie post-pétrole», a insisté François Loos. C’est pourquoi il vient d’autoriser, à titre expérimental, l’utilisation de l’E85, jusque-là interdit en France pour des raisons fiscales. D’autres initiatives suivront. En particulier celle du pôle de compétitivité «Industries et Agro Ressources» de Champagne-Ardenne et de Picardie qui prévoit d’expérimenter de 100 à 1.000 véhicules «flex-fuel». «Notre objectif est simple : nous voulons que d’ici la fin de la décennie, le marché offre des voitures qui puissent rouler indifféremment avec du pétrole ou avec du biocarburant presque pur», a dit le ministre, rappelant une exigence de Dominique de Villepin : « Qu’à l’horizon 2010 chaque consommateur ait le choix à la pompe entre du carburant fossile ou du renouvelable». Et le ministre délégué d’inviter les constructeurs automobiles français à adapter leur gamme de voitures en conséquence. Appel aux pétroliers Le géant américain Ford, salué par le ministre comme un «acteur majeur», est le seul à commercialiser en France ce type de voitures. «Par sa politique de développement durable, il fera, je l’espère, des émules parmi d’autres constructeurs français», a souhaité François Loos. Il a également rendu hommage à Siplec, filiale pétrolière des Centres Leclerc, un «pionnier qui a soutenu activement» le développement des biocarburants en France. Une pierre lancée dans le jardin des pétroliers, jusqu’ici réticents à fournir l’essence à basse volatilité nécessaire pour fabriquer l’E85 et les autres mélanges biocarburants-essence. Le mois dernier, Siplec a dû importer ce type de carburant, les raffineurs français refusant de lui en fournir pour une opération pilote de biocarburants à la pompe. «C’est d’abord le fruit d’une large collaboration de plusieurs acteurs. On ne peut pas rouler à l’E85 sans voiture adaptée, sans carburant et logistique correspondante et sans matière première agricole», a dit François Loos. Il a donc convoqué une table ronde le 7 juin, réunissant constructeurs automobiles, secteurs pétrolier et agricole et consommateurs. L’objectif sera de «répondre aux diverses questions techniques, réglementaires, fiscales qui doivent être traitées pour permettre la montée en puissance de ce système». «La lutte contre le pétrole cher passe par la réduction de notre dépendance envers les énergies fossiles, en particulier la diversification de nos sources d’énergies, notamment dans les transports», a ajouté François Loos. A ses yeux, les biocarburants sont «un des moyens d’améliorer notre indépendance énergétique, tout en assurant une protection de l’environnement». Le gouvernement a porté le taux d’incorporation des biocarburants dans l’essence à 10% en 2015, soit deux fois plus que le niveau exigé par Bruxelles. La France produit par an plus de 1,6 million d’hectolitres d’alcool et d’éthanol issus de l’agriculture. L’éthanol, un biocarburant encore rare dans les moteurs français