Après une semaine de discussions et d’événements à Lisbonne, au Portugal, la Conférence des Nations Unies sur les océans s’est terminée vendredi, les gouvernements et les chefs d’État s’étant mis d’accord sur une nouvelle déclaration politique pour sauver nos océans.
Reconnaissant dans cette déclaration « l’échec collectif » passé, les dirigeants mondiaux ont appelé à une plus grande ambition pour s’assurer que l’on s’attaque à l’état désastreux des océans, et ont admis être « profondément alarmés par l’urgence mondiale à laquelle les océans sont confrontés ».
Lors de la clôture, le Secrétaire général adjoint des Nations Unies aux affaires juridiques, Miguel de Serpa Soares, a félicité les co-organisateurs – le Portugal et le Kenya – pour le succès de la conférence.
La conférence « nous a donné l’occasion de débattre de questions cruciales et de générer de nouvelles idées. Elle a également mis en évidence le travail qu’il reste à accomplir et la nécessité d’intensifier les efforts en faveur de la reconstitution des océans », a déclaré M. Serpa Soares, ajoutant qu’il est essentiel d’inverser maintenant la tendance.
Plus de 6.000 participants, dont 24 chefs d’État et de gouvernement, et plus de 2.000 représentants de la société civile ont assisté à la conférence, plaidant pour des actions urgentes et concrètes pour faire face à la crise des océans.
Échec collectif
Reconnaissant un « échec collectif dans la réalisation des objectifs liés aux océans » à ce jour, les dirigeants ont renouvelé leur engagement à prendre des mesures urgentes et à coopérer à tous les niveaux, afin d’atteindre pleinement les objectifs dès que possible. Parmi les défis auxquels l’océan est confronté figurent l’érosion côtière, l’élévation du niveau de la mer, le réchauffement et l’acidification des eaux, la pollution marine, la surexploitation des stocks de poissons et la diminution de la biodiversité marine. Reconnaissant que le changement climatique est « l’un des plus grands défis de notre temps » et qu’il est nécessaire « d’agir de manière décisive et urgente pour améliorer la santé, la productivité, l’utilisation durable et la résilience des océans et de ses écosystèmes », les hauts responsables politiques réunis à Lisbonne ont souligné que des actions scientifiques et innovantes, ainsi que la coopération internationale, sont essentielles pour apporter les solutions nécessaires. Appelant à un changement transformateur, les dirigeants ont souligné la nécessité de s’attaquer aux effets cumulatifs du réchauffement de la planète sur les océans, notamment la dégradation des écosystèmes et l’extinction des espèces.Réaffirmer les engagements
Réaffirmant que l’océan est fondamental pour la vie sur notre planète et pour notre avenir, les signataires ont souligné l’importance particulière de la mise en œuvre de l’Accord de Paris de 2015, et du Pacte de Glasgow pour le climat de novembre dernier pour contribuer à assurer la santé, la productivité, l’utilisation durable et la résilience de l’océan. « Nous nous engageons à stopper et à inverser le déclin de la santé des écosystèmes et de la biodiversité de l’océan, et à protéger et restaurer sa résilience et son intégrité écologique », dit la déclaration de Lisbonne. « Nous appelons à un cadre mondial pour la biodiversité post-2020 ambitieux, équilibré, pratique, efficace, robuste et transformateur ». Des environnements marins résilients et sains sont les fondements de la régulation du climat et du développement durable, avec le potentiel de produire de la nourriture et de l’énergie pour des milliards de personnes. Lors de la conférence, plus de 100 États membres se sont engagés volontairement à préserver ou à protéger au moins 30% de l’océan mondial dans des aires marines protégées et d’autres mesures efficaces de préservation par zone, d’ici à 2030. « Je suis impressionné par les nouveaux engagements » pris par les pays, a déclaré M. Serpa Soares lors de la cérémonie de clôture, ajoutant que « les engagements doivent être mis en œuvre à un rythme soutenu et contrôlés ». En voici quelques exemples :- Protéger 30%, ou même davantage, des zones maritimes nationales d’ici à 2030
- Atteindre la neutralité carbone d’ici 2040
- Réduire la pollution plastique
- Augmenter l’utilisation des énergies renouvelables
- Allouer des milliards de dollars à la recherche sur l’acidification des océans, aux projets de résilience climatique et au suivi, au contrôle et à la surveillance.
Au-delà de 2030
La Décennie des Nations unies pour l’océanologie au service du développement durable (2021-2030) a pour objectif de mettre en place la science dont nous avons besoin, pour l’océan que nous voulons. La Commission océanographique intergouvernementale (COI) de l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO), qui a pour mission de générer et d’utiliser des connaissances pour l’action de transformation nécessaire à l’obtention d’un océan sain, sûr et résilient pour le développement durable d’ici à 2030 et au-delà, est le moteur du développement de la décennie d’action. Pour cela, le cadre de la Décennie est conçu pour permettre une gestion des océans mieux informée, restaurer les stocks de poissons, mobiliser des actions en faveur d’une pêche et d’une aquaculture durables pour une alimentation suffisante, sûre et nutritive. Il vise également à réduire les pollutions marines de toutes sortes, qu’elles soient d’origine terrestre ou marine, à assurer une protection marine plus efficace, à élaborer et à mettre en œuvre des mesures d’adaptation au changement climatique, à réduire les risques de catastrophe et les effets de l’élévation du niveau de la mer, ainsi qu’à réduire les émissions dues au transport maritime. Reconnaissant que les pays en développement, en particulier les petits États insulaires en développement (PEID) et les pays les moins avancés, sont confrontés à des problèmes particuliers, les dirigeants politiques s’engagent à renforcer les efforts de collecte de données et à améliorer la coopération à tous les niveaux pour partager les connaissances.Après Lisbonne
Le financement est un autre aspect particulier de la déclaration. Le document de sept pages indique que des solutions de financement novatrices doivent être trouvées pour favoriser la transformation vers des économies durables fondées sur les océans, et développer des solutions fondées sur la nature, ainsi que des approches fondées sur les écosystèmes pour soutenir la résilience, la restauration et la conservation des écosystèmes côtiers. Déclarant que la conférence a prouvé que l’économie bleue est désormais une partie importante de la sécurité future de l’humanité, l’Envoyé spécial du Secrétaire général des Nations Unies pour l’océan, Peter Thomson, a demandé que davantage de ressources financières lui soient consacrées. Il a noté que le Secrétaire général avait poussé au consensus, en décrivant la déclaration comme une alerte rouge pour l’humanité, et M. Thomson a ajouté que 2022 s’avérait être une « super année », appelant les jeunes à être à la table de toutes les discussions sur l’avenir de l’océan, à l’avenir. S’adressant à ONU Info, Miguel de Serpa Soares a ajouté que la Conférence des Nations Unies sur les océans n’était pas le seul moment fort de l’action en faveur des océans cette année. « Au cours des prochains mois, nous aurons plusieurs événements cruciaux qui offrent de nombreuses occasions de démontrer nos engagements et notre ambition de renverser la vapeur en faveur de la durabilité des océans ». Après l’événement de Lisbonne, le chemin pour sauver nos océans se poursuivra à travers la Conférence intergouvernementale sur un traité sur la biodiversité marine des zones situées au-delà de la juridiction nationale, les négociations sur le cadre mondial pour la biodiversité post-2020, et les négociations pour un financement accru du climat et des actions d’adaptation lors de la COP27 en Égypte.Autonomiser les jeunes, les femmes et les populations autochtones
Reconnaissant le rôle important des connaissances, innovations et pratiques autochtones, traditionnelles et locales détenues par les peuples autochtones, ainsi que le rôle des sciences sociales dans la planification, la prise de décision et la mise en œuvre, les dirigeants appellent à une participation significative des communautés locales. « Il faut autonomiser les femmes et les filles, car leur participation pleine, égale et significative est essentielle pour progresser vers une économie durable fondée sur l’océan et pour atteindre l’objectif 14 », souligne la déclaration, en insistant sur l’importance de donner le pouvoir aux jeunes pour leur permettre de comprendre la « nécessité de contribuer à la santé de l’océan, y compris dans la prise de décision, en promouvant et en soutenant une éducation de qualité et un apprentissage tout au long de la vie pour la connaissance de l’océan ». Appelant les parties prenantes à faire preuve de toute urgence d’ambition et à prendre des mesures concertées pour accélérer la mise en œuvre afin d’atteindre l’objectif 14, la conférence a conclu en disant que « le rétablissement de l’harmonie avec la nature grâce à un océan sain est essentiel pour la planète ».L’espoir, et l’urgence
Encouragé par un sentiment renouvelé d’espoir et d’urgence concernant notre futur océan, M. Serpa Soares a conclu : « alors que nous nous quittons, nous devons assurer le suivi de nos engagements ». « Comme l’a dit le célèbre écrivain tongien et fidjien Epeli Hau’ofa, nous sommes l’océan. L’océan est en chacun de nous, c’est ce qui nous fait vivre, et c’est la base de notre survie future sur la planète Terre », a-t-il déclaré.Le pouvoir de la science
S’appuyant sur l’accent mis sur la science au cours de la semaine, l’UNESCO a présenté vendredi son rapport sur l’état de l’océan. Le rapport a été élaboré pour fournir des données nouvelles sur l’état actuel des océans, structurées autour des 10 défis initiaux de la Décennie. Le chef de la section des sciences océaniques de l’UNESCO, Henrik Enevoldsen, a déclaré à ONU Info que le rapport complétait le travail scientifique de la conférence et renforçait notre capacité à gérer les océans. Parlant des résultats de la conférence, il a déclaré qu’ils « mettent en évidence les domaines dans lesquels nous avons besoin de plus de connaissances pour fournir une base adéquate aux décideurs [et] mieux gérer l’océan ».