Les multiples crises mondiales interconnectées mettent en péril la réalisation des Objectifs de développement durable (ODD), tant dans la région arabe que dans le reste du monde, a averti mardi la Vice-Secrétaire générale de l’ONU, Amina Mohammed.
« Permettez-moi d’être franche : nous ne nous en sortons pas bien. Notre progression vers les ODD s’est ralentie et a même fait marche arrière pour certaines cibles et certains objectifs importants, laissant de nombreuses personnes à la traîne », a-t-elle déclaré dans son discours d’ouverture du Forum régional arabe sur le développement durable (AFSD) à Beyrouth, au Liban.
Permettez-moi d’être franche : nous ne nous en sortons pas bien.
Les dirigeants du monde ont adopté les 17 ODD en 2015, établissant une feuille de route pour un avenir mondial plus juste, plus équitable et plus vert d’ici 2030. Alors que les pays sont à mi-parcours, Mme Mohammed a appelé à une évaluation honnête afin de décider des corrections à apporter à la trajectoire.Une promesse en péril
Elle a souligné combien la pandémie de Covid-19, la guerre en Ukraine et la « triple crise planétaire » – le changement climatique, la perte de biodiversité et la pollution – ont affecté les vies et les moyens de subsistance. Les retombées dans le monde arabe comprennent l’insécurité alimentaire et l’augmentation de la pauvreté, qui approche les 50 % dans les pays les plus pauvres de la région. Les récents tremblements de terre dévastateurs en Syrie et en Türkiye n’ont fait qu’ajouter à la souffrance.« Si nous n’agissons pas maintenant, tous ces facteurs pourraient mettre la promesse d’atteindre les Objectifs de développement durable hors de portée pour cette région et pour le reste du monde », a-t-elle déclaré. « Il est urgent d’examiner comment les décisions politiques et les investissements peuvent remettre la région sur les bons rails ».
Un plan de relance des ODD
Mme Mohammed a déclaré qu’en dépit de ces défis, la région arabe avait progressé sur la voie du développement durable dans les domaines des énergies renouvelables, de l’accès à l’internet et de la protection sociale, ce qui devrait servir d’inspiration pour le chemin à parcourir. Cependant, le fardeau de la dette collective des pays de la région a augmenté de façon spectaculaire, a-t-elle ajouté, soulignant la « défaillance » du système financier mondial. Elle a rappelé que le Secrétaire général des Nations Unies a présenté des réformes urgentes et nécessaires à l’architecture financière mondiale, tout en appelant à un plan de relance annuel de 500 milliards de dollars pour les ODD. Action en faveur du climat et de l’égalité des sexes La numéro deux de l’ONU a également souligné la nécessité d’une action climatique, notant que la région a été frappée par des sécheresses et des tempêtes de sable qui ne feront qu’empirer avec le réchauffement de la planète.Le calcul est simple. Sans les contributions de la moitié de leurs membres, les sociétés ne réaliseront que la moitié de leur potentiel.
Les Émirats arabes unis accueilleront cette année la conférence des Nations Unies sur le changement climatique COP28. Mme Mohammed a déclaré que le pays « a l’immense responsabilité de parvenir à un consensus sur l’accélération de la transition vers l’abandon des énergies fossiles – dans la région et dans le monde entier ». Elle a également souligné que si le développement durable est essentiel, une composante cruciale – l’égalité entre les hommes et les femmes – est souvent négligée.« Le calcul est simple. Sans les contributions de la moitié de leurs membres, les sociétés ne réaliseront que la moitié de leur potentiel », a-t-elle souligné. « Nous avons besoin de la pleine contribution de tous pour surmonter les tempêtes actuelles et construire des économies et des sociétés inclusives et durables pour l’avenir ».
L’importance du secteur privé
S’exprimant lors d’un autre événement de l’AFSD, la haute responsable de l’ONU a souligné l’importance du secteur privé – des micro-entreprises aux multinationales – dans la réalisation d’un avenir mondial durable.« Les Objectifs de développement durable échoueront sans le secteur privé », a-t-elle prévenu, ajoutant que « nous avons besoin de toute urgence de partenariats puissants avec le secteur privé qui investissent dans les transitions nécessaires pour accélérer les progrès en matière de développement et remettre les ODD sur les bon rails ».La communauté des affaires peut jouer un rôle crucial en comblant le déficit de financement pour atteindre les Objectifs d’ici 2030. Ce dernier a été estimé à plus de 660 milliards de dollars par an dans 12 pays arabes. Bien que les capitaux privés soient abondants, seule une petite partie d’entre eux est alignée sur les ODD. Le défi consiste à mobiliser les capitaux privés nationaux et étrangers pour aider à combler le fossé. Mme Mohammed s’est félicitée des développements positifs, dont les récentes opérations de financement d’entreprises ayant révélé une évolution vers la durabilité dans la région, en particulier dans les domaines des énergies renouvelables, de l’eau et des transports. Cependant, elle a estimé que les investissements dans les infrastructures et les services sociaux, l’égalité, la paix et la justice, restent trop peu nombreux et insuffisants.
Une cuisine communautaire pour les personnes handicapées physiques
La Vice-Secrétaire générale a pu visiter, avec les Coordinateurs résidents des Nations Unies de la région arabe, une cuisine communautaire à Beyrouth, mise en place par l’Union libanaise pour les personnes handicapées physiques. « Access Kitchen » est soutenu par ONU Femmes dans le cadre d’un programme conjoint avec le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF). Elle a ainsi écouté les défis auxquels sont confrontées les femmes et les filles handicapées au Liban, et la manière dont elles font face aux crises dans ce pays et a ensuite participé à la préparation d’un repas. Amina Mohammed a également discuté avec les Coordinateurs de la meilleure façon d’accélérer l’élan vers la réalisation du développement durable avant le Sommet sur les ODD qui se tiendra au Siège de l’ONU à New York en septembre. Le Forum arabe pour le développement durable (AFSD) s’achève le 16 mars. Il est organisé par la Commission économique et sociale des Nations Unies pour l’Asie occidentale (CESAO), basée à Beyrouth.