Une étude OpinionWay pour makesense révèle « L’engagement écologique des jeunesses françaises ». Jeunesses au pluriel car l’étude s’est attachée à refléter les jeunes dans toutes leurs composantes, leur diversité (et leur complexité !) : toutes les données ont été isolées par origine sociale, zones géographiques d’habitation (villes, zones rurales, quartiers périphériques…) et occupation (étudiants, jeunes professionnels, NEETs).
Principaux résultats
- > le poids élevé des inégalités sociales dans l’engagement écologique, 58% des jeunes estimant « plus facile de s’engager pour l’environnement quand on vient d’une famille aisée » et 46% « quand on vit en centre-ville« .
- > les jeunes des « banlieues » très engagés sur l’écologie malgré des différences territoriales marquées : si 71% des 18 – 30 ans se déclarent engagés d’une façon ou d’une autre pour l’environnement, ils ne sont que 66% en zones rurales, contre -bonne surprise !- 77% dans les banlieues et quartiers prioritaires de la politique de la ville, largement au dessus de la moyenne générale
- > la défiance des jeunes à l’égard de l’action publique et politique mesurée à un niveau élevé, trois quarts des jeunes croyant davantage à l’action citoyenne (de quoi faire réfléchir nos décideurs dans le cadre de la planification écologique…) ;
- > les mouvements écologistes militants et radicaux largement jugés non-représentatifs et peu attractifs : seulement 10% des jeunes Français se disent « prêts à s’y investir dans les prochaines années »
Jeunesse(s) française(s), engagement écologique et mobilisation
Une étude inédite qui prend en compte les origines sociales et géographiques des jeunes tord le bras à des idées reçues sur leur engagement en faveur de l’environnement
L’écologie, une affaire de jeunes ? Si la réponse affirmative a maintes fois été remontée dans les sondages, cette nouvelle étude OpinionWay pour makesense nous fait revoir nos a priori. L’origine sociale des jeunes préoccupés par les questions environnementales n’est pas celle que l’on croit, pas plus que leurs modes d’action effectifs. N’en déplaise aux représentations médiatiques, les jeunes veulent agir localement sans passer ni par les politiques ni par les mouvements militants. Mais une fois encore, les inégalités sociales et territoriales viennent contrarier cette appétence. Quand il s’agit de passer de la préoccupation à l’action, tous les jeunes n’ont pas les mêmes cartes en jeu. Jusqu’à quand ?- 1. Le niveau d’engagement des jeunes pour l’environnement reste élevé malgré des inégalités sociales et territoriales très marquées :Avec près de huit jeunes sur dix qui estiment que s’engager en faveur de l’environnement constitue un objectif désirable et atteignable, les jeunes Français, toutes catégories confondues, constituent des vigies de l’(in)action environnementale. Une très large majorité d’entre eux déclare ainsi être déjà engagée dans la lutte pour l’environnement (71%); et prête à adopter au moins une action pour agir dans les prochaines années (88%). Cependant, ils sont nombreux à reconnaître que cette démarche s’avère plus facile pour certains que pour d’autres. L’engagement environnemental se heurte à la question sociale, et notamment aux 2 facteurs suivants :
- ● Le niveau de revenus : 58% des jeunes estiment plus facile de s’engager pour l’environnement quand on vient d’une famille aisée ;
- ● L’origine géographique : plus de 4 jeunes sur 10 jugent que s’engager pour l’environnement est plus difficile pour les habitants des quartiers périphériques des grandes villes (47%) et des zones rurales (46%). A l’inverse, ils sont autant ou presque à considérer que cela est plus facile quand on grandit en centre-ville d’une grande agglomération (46%).
“C’est l’un des enseignements les plus significatifs de cette enquête : contrairement à une idée communément admise, les jeunes des quartiers populaires sont parmi les plus engagés sur les questions écologiques. Ceci peut s’expliquer par le tissu associatif dynamique des quartiers et les problèmes socio-environnementaux spécifiques auxquels ils sont confrontés (pollution de l’air, précarité énergétique, aménagement urbain…)”, analyse Hélène Binet, porte-parole de makesense.
- 2. Trouver le mode d’action adéquat : les actions individuelles et locales privilégiées au détriment des mobilisations collectives; Malgré le niveau élevé de sensibilisation et d’engagement des jeunes, ils sont encore 68% à souhaiter en faire davantage “sans savoir comment s’y prendre”. L’étude s’est donc intéressée à certaines injonctions paradoxales – Engagement individuel ou collectif ? Local ou national ? Radical ou plus mesuré ? – auxquelles les jeunes sont régulièrement confrontés dans leurs luttes et leurs modes d’action.
- > Un déficit d’information relatif aux formes de mobilisation collective, 76% des jeunes estimant difficile de savoir à qui s’adresser lorsqu’ils souhaitent s’engager (81% chez les plus jeunes de 18-21 ans) ;
- > Une motivation plus forte à agir à l’échelle locale, 75% des jeunes estimant que les actions de proximité sont aussi efficaces que les initiatives nationales et internationales.
- 3. Les actions politiques et militantes boudées par une large majorité de jeunes : Sans grande surprise, la défiance des jeunes à l’égard des politiques et de l’action publique se mesure à un niveau élevé. Les trois quarts des jeunes sont convaincus que le changement viendra des citoyens plutôt que des mesures politiques (76%). Alors que moins d’un jeune sur deux estime que l’avis des jeunes en matière d’écologie est pris en compte par les pouvoirs publics (49%), 73% déclarent se sentir “légitimes pour agir”, créant ainsi un sentiment de frustration parmi cette population. Les pouvoirs publics ne sont pas les seuls à être sévèrement jugés par les jeunes : ils ne sont que 10% à se déclarer prêts à s’investir dans les mouvements écologistes militants dans les prochaines années, et moins de la moitié des jeunes (43%) déclare se reconnaître dans les mouvements militants actuels. Pour 87% d’entre eux, s’engager pour l’environnement ne passe pas nécessairement par rejoindre ce type de mouvements.
“Ces résultats montrent que l’action militante telle que dépeinte par les médias ne permet pas à la jeunesse de s’y retrouver. Trop de jeunes se sentent laissés de côté par des messages et des modes d’action qui ne leur ressemblent pas. Cela fait réfléchir et démontre que la clef pour embarquer n’est pas tant la radicalité que l’inclusivité. Même si le temps presse, nous devons toujours chercher à rassembler et donner à voir un futur qui donne envie de se projeter”, réagit Hélène Binet.