Après avoir présenté 2 épisodes significatifs de la vie de François d’Assise, nous présentons cette semaine une réflexion sur le sens de sa fraternité avec les créatures et sur son opportunité dans le débat écologique d’aujourd’hui.
Pauvreté et fraternité.
Un autre aspect de la spiritualité de Saint François est son goût pour la pauvreté. Ne l’a-t-on pas appelé le ‘Poverello’ ? Et les termes ‘pauvreté franciscaine’ sont souvent associés. Mais de quelle pauvreté s’agit-il ? La règle de vie des frères franciscains précise qu’ils ne doivent ‘rien avoir en propre’ ; c’est différent de ne ‘rien avoir du tout’, ce qui serait une chimère. L’accent est mis sur le lien entre avoir et fraternité : nous ne possédons rien ‘en propre’, toutes nos ressources sont mises en commun, à charge, pour chaque frère, de ‘faire connaître ses besoins’ à la communauté. Il faut aller plus loin sur le sens de la pauvreté. L’insistance franciscaine est fondée sur une conviction : ‘Toutes les créatures sont unies dans la profondeur de leur être, par le fait même d’être créatures’. Quand on comprend que la source et le fondement de notre être ne sont pas en nous-mêmes, alors, on se connaît soi-même comme vraiment pauvre. Être pauvre, en son sens fondamental est une définition, pas une description. La vraie pauvreté, la pauvreté en esprit, est la réalisation qu’il n’y a aucune raison pour son être propre. Dans cette pauvreté fondamentale, il y a égalité. La personne humaine ne peut pas revendiquer une qualité d’être plus intrinsèque qu’une plante, un animal, une pierre ou une étoile. Ceci n’est en aucune manière dénier le rôle unique que la personne humaine joue dans la vision chrétienne : à la lumière de l’Incarnation, ce rôle est d’une extraordinaire dignité. Mais le rôle donné à l’humanité est souverainement don de Dieu, comme est le rôle de toute autre créature. L’homme est celui, dans la création, à qui la plénitude du don de Dieu peut être communiquée. Mais la personne humaine a été créée comme telle. La doctrine (biblique) de la création ex nihilo ne dit pas ‘comment’ l’univers vient à être, mais ‘pourquoi’. C’est la réponse chrétienne à la question que Heidegger voyait au début de toute métaphysique : ‘pourquoi y a-t-il quelque chose plutôt que rien ?’ Si la question cherche une raison à l’intérieur de l’être lui-même, elle est condamnée à rester sans réponse. Cette doctrine insiste sur la pauvreté fondamentale de l’univers : l’univers n’a pas de motif intrinsèque pour exister. Si nous ne nous sommes pas faits nous-mêmes, alors ce n’était ni un acte de dénigrement de soi, ni une effusion de personnification poétique que de s’adresser au soleil, à la lune, au feu, à la terre et à toutes créatures animées ou non, comme à ses frères ou sœurs ; c’était la simple vérité… C’est la meilleure manière de retrouver le thème du compagnonnage de la Genèse, et c’est ce que la tradition chrétienne a de mieux à offrir dans l’actuelle crise écologique globale : la découverte que ‘chaque créature, y compris soi-même, est un effet de l’amour de Dieu qui donne d’être à toutes choses’, fournit le fondement le plus profond pour le respect de la création. Une telle vision exige une reconnaissance de la pauvreté de son être propre – pour beaucoup, trop dur pour être vrai – et la joyeuse acceptation de l’amour qui supporte notre être propre – pour beaucoup, trop beau pour être vrai -. Prochain article la semaine prochaine : Que font les franciscains aujourd’hui sur ces questions ??