Voici la contribution de la FEDENE, Fédération des Services Energie Environnement, réalisée à l’occasion du Groupe de travail « Rénovation énergétique » lancé début juin par le gouvernement. Ce document présente à la fois l’analyse de la FEDENE en matière de rénovation énergétique des bâtiments affinée par segments de marchés et par type de bâtiments, mais également ses propositions pour revoir la stratégie selon 4 axes très concrets et opérationnels : – Une stratégie générale de rénovation du parc de bâtiments en fonction de l’état des bâtiments, – Une stratégie séquencée de rénovation en commençant par les actions les plus efficientes, – Une stratégie fondée sur des engagements d’économies réelles et de suivi dans la durée, – Des solutions déclinées par segment de marché : résidentiel, tertiaire public et privé, industrie.
Synthèse globale
La FEDENE, Fédération des services énergie et environnement, regroupe plus de 500 entreprises, 60 000 salariés pour un chiffre d’affaires de 11 Mds €. Ses adhérents proposent des prestations sur mesure, fondées sur des engagements de performances réelles sur le long terme, à la fois quantitatives et qualitatives. Ils interviennent sur les projets de rénovations, de la conception et la réalisation de solutions, y compris le cas échéant leur financement, à l’exploitation et la relation avec le client final. A travers ses syndicats SNEC, SYNASAV, SYPEMI et SYPIM, les adhérents de FEDENE interviennent quotidiennement sur 60 à 70 % du parc résidentiel et tertiaire, que ce soit en chauffage collectif comme individuel. La FEDENE a de ce fait une connaissance unique en termes de montage de projets de rénovation énergétique et de la connaissance des conditions à réunir pour favoriser l’émergence de projets concrets d’économie d’énergie.
Analyse de la stratégie de rénovation énergétique
RAPPELS : – Les économies d’énergie sont le premier pilier de la transition énergétique et de la stratégie nationale bas carbone (SNBC) avec un objectif de réduction de moitié à l’horizon 2050 – La réduction de consommation finale d’énergie porte pour moitié sur les bâtiments résidentiels et tertiaires (- 112 TWh dont 80% sous forme de chaleur et de froid)
La FEDENE propose en conséquence de revoir la stratégie selon 4 axes
1. Une stratégie générale de rénovation du parc de bâtiments en fonction de l’état des bâtiments
La stratégie actuelle se décline fondamentalement de la façon suivante : – Nombre de logements à rénover par an (500.000 actuellement, ce qui a peu de sens tant en terme d’objectifs globaux de réduction que concrètement sur le terrain) sans préciser le type de rénovation. – En % de réductions appliqués de façon transversale quel que soit le type de bâtiment (ex Décret tertiaire : -40% en 2030). – Mise en avant et la promotion de l’isolation des bâtiments, quelle que soit leur situation initiale. La réalité des besoins de rénovation, les cibles d’économie et les solutions à mettre en œuvre dépendent pourtant de façon évidente des caractéristiques des bâtiments : usage (segment de marché), zone géographique, qualité des propriétaires (donc capacité financière à agir et ressorts de décision) et surtout état du bâtiment et des installations thermiques. Or, en analysant par étiquette énergétiques la structure de consommation d‘énergie de l’ensemble du parc résidentiel et tertiaire, il ressort trois grandes catégories de bâtiments avec des enjeux et des stratégies à adapter fondamentalement différente selon leur étiquette énergétique :
- Pour ces opérations de rénovation globale, la cible de consommation doit être de l’ordre de 😯 KWh/m2 (soit ce qui représenterait une division par 5 des consommations et donc une cible d’économies de 21% sur l’objectif global d’économies de 50% en 2050)
- En sommant l’ensemble de ces objectifs, on constate que l’on peut atteindre la cible de 50% d’économies en 2050, de façon pragmatique et progressive, et surtout engager rapidement des actions de rénovation sur le parc existant.
- Ces stratégies doivent également être adaptées en fonction des conditions locales, zones climatiques bien entendu, mais également plans d’aménagement urbains et présence éventuelle d’un réseau de chaleur vertueux qui peut infléchir le niveau visé en termes d’économies.
2. Une stratégie de rénovation séquencée
La FEDENE soutient une stratégie séquencée de rénovation en commençant par les actions les plus efficientes. Il apparait aujourd’hui que les politiques d’efficacité énergétique du logement sont souvent orientées vers la rénovation globale, en intégrant dès l’origine des objectifs d’isolation actuellement encore très coûteux et avec des temps de retour très longs. Cette démarche implique la nécessité de financer un reste à charge très important. Cette politique n’a pas permis de débloquer suffisamment d’opérations d’économies d’énergie, que ce soit dans le résidentiel comme dans le tertiaire public ou privé, au rythme prévu faute de décisions spontanées des acteurs, du fait du déséquilibre financier qui en découle. Il nous semble alors nécessaire :- D’encourager au maximum des démarches de rénovations par étapes avec une vision à long terme. Il est en effet possible d’accompagner les clients vers une rénovation efficiente dans un premier temps, où les économies d’énergies générées permettront de rembourser les investissements initiaux sur une durée de l’ordre de 8 à 10 ans (donc dans l’horizon de la PPE). Ensuite, les économies générées contribueront à financer les travaux plus lourds, moins directement « rentables » de rénovation qui doivent s’inscrire dans une démarche patrimoniale.
- D’engager une autre approche de la rénovation, en concentrant les efforts sur des bouquets d’actions de performance énergétique et climatique comprenant des solutions de pilotage et technologique, permettant d’intervenir rapidement, sans contrainte patrimoniale. Elles permettent en moyenne d’économiser 25% de la consommation, pour un coût moyen de 50€/m2.
3. Une stratégie fondée sur des engagements d’économies réelles et de suivi dans la durée
Les objectifs de réduction de consommation doivent être mesurables et mesurés (par exemple en TWh plutôt qu’en milliers de logements) pour juger de l’efficacité des actions menées et des mécanismes de soutien, au premier rang desquels les Certificats d’économies d’énergie (CEE) et le CITE. L’objectif principal étant in fine de réduire l’empreinte carbone des consommations énergétiques, leur traduction en une équivalence en énergie primaire favoriserait le choix des techniques les plus efficaces pour réduire la consommation mais aussi les plus intrinsèquement vertueuses en termes écologiques. Pour assurer un coût collectif maitrisé, les actions de rénovation énergétiques doivent être fondées sur des engagements de réduction mesurés et réels. Par ailleurs ils doivent être garantis dans la durée pour éviter la dégradation progressive de la performance des actions réalisées. De ce point de vue, les garanties de performance – formalisées dans le cadre d’un Contrat de Performance Energétique (CPE) constituent un outil à l’efficacité prouvée. En effet, il permet de garantir les économies d’énergies immédiates de l’ordre de 15 à 20% dans la durée et donc de sécuriser l’investissement initial des bailleurs. De plus il est possible d’intégrer dès la signature du CPE un phasage des travaux de rénovations, permettant de lisser les investissements. Pour massifier le recours à ces contrats vertueux, la FEDENE travaille avec ses membres à l’élaboration d’un contrat type, facilement duplicable, pour une plus large utilisation.4. Des solutions déclinées par segment de marché : résidentiel, tertiaire public et privé, industrie
Renforcer la politique de rénovation énergétique dans le résidentiel qui recouvre trois principaux segments – logement individuel, logement social et copropriétés – qui ont chacun des problématiques spécifiques et dans lequel le retard s’accumule, du fait de la précarité croissante et du rythme de rénovation énergétique insuffisant, notamment dans le domaine des copropriétés. Le secteur tertiaire regroupe des réalités très variées, selon l’usage des bâtiments ou leur propriété. Il est par conséquent nécessaire d’avoir une approche différenciée entre le tertiaire public et privé. Comme pour le logement, quoiqu’à un moindre degré, l’enjeu principal reste le parc existant : – Enjeu sur le parc tertiaire public : massifier la rénovation avec garantie d’économies d’énergie. La rénovation énergétique des bâtiments publics est un enjeu majeur pour la bonne tenue des objectifs nationaux de réduction des consommations d’énergie et d’émissions de gaz à effet de serre. Cependant ces actions peuvent nécessiter des investissements pour lesquels certains maîtres d’ouvrages ont besoin d’être soutenus. – Enjeu sur le parc privé : promouvoir la valeur patrimoniale des bâtiments performants Les solutions les plus efficientes du point de vue de la réduction des émissions de carbone et coût par tonne de CO2 évitée sont aujourd’hui parfaitement connues, identifiées et maitrisées: La PPE les décrit d’ailleurs très précisément : économies d’énergie les plus efficientes d’un point de vue carbone, donc les solutions technologiques et comportementales pour le chauffage, et chaleur renouvelable et de récupération La FEDENE se tient à la disposition des autorités pour approfondir et élaborer plus en détail et par segment de marchés ces diverses solutions, en particulier dans le cadre des groupes de travail sur la rénovation énergétique des bâtiments sous l’égide de la Secrétaire d’État auprès du ministre de la transition écologique et solidaire, Madame Emmanuelle Wargon.Rénovation du parc résidentiel
– Action 1 : Définir des objectifs précis, ambitieux, réalistes et à coûts maîtrisés. Compte tenu des différents éléments mis en évidence, à la fois sur la consommation, la typologie des logements et l’objectif national de rénovation, la FEDENE via le SNEC[[SNEC – Syndicat National de l’Exploitation Climatique et de la maintenance, membre de la FEDENE – www.snec-energie.fr]], représentant les opérateurs d’efficacité énergétique, formule des analyses et des propositions pour accélérer la transition énergétique et permettre une diminution de la facture des ménages.L’objectif de la PPE doit être atteint à un coût collectif maitriséLe rythme annuel de rénovation des logements doit permettre d’économiser 55 TWh d’ici 2028, ceci intégrant l’ensemble des facteurs d’influence de la consommation (croissance du parc, déconstruction, rénovation). La PPE rappelle dans son introduction que « Ces évolutions doivent naturellement être menées en continuant à garantir le niveau de sécurité d’approvisionnement qu’attendent les Français et à un coût collectif maitrisé, nécessaire à l’acceptabilité de cette transition énergétique par tous. Elles doivent donc être conduites avec prudence et progressivité en capitalisant sur les acquis. » Pour ce faire, il n’est pas envisageable de limiter les actions à l’objectif de 500 000 rénovation BBC par an, puisque les travaux nécessaires requièrent d’importants investissements dont le coût est très élevé et le financement très difficile à trouver. Il est alors nécessaire de mettre en œuvre une politique différenciée par catégories de logements.
Le chauffage collectif constitue un gisement facilement accessibleLe parc de LCC[[LCC : Logement avec un système de chauffage collectif]] est un important gisement d’économies. Le chauffage et l’ECS[[ECS : Eau chaude sanitaire]] de ce parc représentent 49 TWh de consommation et ceux dont l’étiquette est inférieure à l’étiquette C concentrent 90% des consommations (44 TWh). Par ailleurs, les logements avec un système de chauffage collectif présentent d’importants avantages techniques pour la rénovation puisqu’ils centralisent leur production et les coûts peuvent être facilement réduits. Pour cela, il est nécessaire développer une politique de massification de rénovations des logements avec chauffage collectif.
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Une stratégie adaptée à l’état du parc de logement
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La garantie de performance en exploitation doit être généralisée
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Les rénovations des installations thermiques doivent être encouragées et garanties par des contrats de performance énergétique (CPE)
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Les bâtiments les plus énergivores doivent être rénovés en profondeur
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Favoriser la rénovation des batiments tertiaires
– Action 6 : Une stratégie de rénovation du parc tertiaire public Les grandes lignes du programme sur 12 ans proposé par la FEDENE :- Engager une action de masse de rénovation technique (6% du parc par an) sur 75 % des bâtiments qui ne feront pas l’objet d’une rénovation lourde (2% par an) sur 2018-2030 ;
- Cibler et moderniser les systèmes énergétiques de ce parc, via des CPE Rénovation Technique, qui englobent des actions avec un temps de retour de 10 à 15 ans ;
- Investir 1 Md€ par an, complété par des aides, telles que les CEE, ainsi que les économies d’énergies réalisées.
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Massifier la rénovation avec garantie d’économies d’énergieNous proposons un recours massif au CPE notamment en : – supprimant le plafond de 10 000 m2 pour pouvoir appliquer à toutes surfaces tertiaires les fiches standardisées de CEE (et non plus traiter en opération spécifiques les CEE si > 10 000 m2) ; – créant une fiche « Changement d’étiquette énergétique » comme détaillé dans l’action 7 ; – simplifiant et standardisant davantage la mesure de la performance énergétique ; – créant un label de qualité pour les opérateurs de CPE ; – développant des « CPE-C » : énergie & carbone ; – favorisant le lancement de CPE massifiés multi-bâtiments et multi-collectivités, notamment dans le cadre de bâtiments aux profils de consommations complémentaires ; – clarifiant la note Eurostat sur la prise en compte des investissements de rénovation énergétique dans la comptabilité publique. – Action 7 : Accompagner la rénovation du parc tertiaire privé – inciter à recourir à des contrats de performance énergétique, en augmentant la bonification CPE des CEE, – présenter le CPE SERVICE comme la première étape d’efficacité énergétique, – identifier les gisements d’économies d’énergie grâce à la plateforme OPERAT et lancer des appels à projets.
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Contribution de la FEDENE au groupe de travail rénovation énergétique