À l’heure où la transition énergétique modifie progressivement nos modes de consommation et de production, les données sur l’électricité jouent un rôle central dans les politiques territoriales, l’évolution des offres sur le marché, l’adaptation des comportements des consommateurs et le développement des énergies renouvelables. « Électricité : les données au service de la transition », la nouvelle note de La Fabrique Écologique explore comment les pouvoirs publics peuvent encourager les évolutions des pratiques et les décisions des acteurs – ménages, entreprises et collectivités – au service de la transition énergétique, tout en protégeant les consommateurs.

La part de l’électricité dans notre consommation d’énergie en 2050 devrait se situer légèrement au-dessus de 50 %, soit deux fois plus qu’aujourd’hui ; cela laissera encore une large place à d’autres formes d’énergie finale (gaz, carburants liquides, bois-énergie)1.
Les bioénergies : quelle place dans la transition énergétique ?
La Note de La Fabrique Ecologique « Les bioénergies : quelle place dans la transition énergétique ? » issue du groupe de travail initié par François Demarcq a un double objectif : rappeler ce qu’est la biomasse, à quoi elle peut servir pour mettre en lumière les limites et les arbitrages nécessaires, et expliciter quelques messages simples pour une prise en compte raisonnée et partagée de la biomasse dans les politiques publiques. Alors que la révision de notre stratégie énergétique est un enjeu majeur pour atteindre la « neutralité carbone » en 2050, cette Note propose de redonner une juste place à la thématique de la biomasse, une source d’énergie majeure et « multiusages » insuffisamment prise en compte dans les débats publics.
Au-delà des objectifs européens et de la planification nationale (PPE2 et SNBC3), la loi a confié d’importantes responsabilités aux collectivités territoriales. Et la mise en œuvre des objectifs relève d’une multitude d’acteurs de terrain, y compris les entreprises et les ménages.
Tous ont besoin de données pertinentes pour décider des actions à conduire.
C’est particulièrement le cas des données relatives à l’électricité, objet de la présente note, mais plus
largement pour l’ensemble des données territoriales sur l’énergie.
Au cœur du système électrique, entre producteurs, fournisseurs et consommateurs, les gestionnaires
de réseaux de transport et de distribution doivent veiller à l’équilibre permanent du système électrique et adapter leurs infrastructures. Ils collectent, utilisent et mettent à disposition,
directement ou par l’intermédiaire de plates-formes mutualisées (associant dans certains cas les
gestionnaires des réseaux de gaz), dans des conditions juridiquement encadrées (en particulier
pour protéger la vie privée), les multiples données qui permettent aux différents acteurs de prendre des décisions éclairées : « données sur demande » ou « données ouvertes » (open data) selon leur nature.
Tous ces acteurs sont légitimement attentifs à la pérennité, à la disponibilité et à la qualité de ces données. Pour la transition écologique, l’investissement dans les données est donc un enjeu d’intérêt général.
Le secteur électrique est promis d’ici 2050 à une expansion forte par les nouveaux usages (pompes à chaleur, véhicule électrique, etc.) et à une décarbonation totale grâce à la montée en
puissance des énergies renouvelables.
La sobriété est indispensable, notamment pour limiter les investissements lourds dans les
infrastructures et leurs impacts environnementaux.
Les productions éolienne et solaire n’étant pas forcément « pilotables », un enjeu essentiel pour
les décennies à venir consistera à assurer la flexibilité du système, tout en limitant les coûts
économiques et écologiques de la transition. Les solutions de stockage sont limitées (stations de
pompage hydrauliques) ou chères et très consommatrices de métaux (stockage
électrochimique par batteries).
Le recours à d’autres formes d’énergie « stockables » (gaz renouvelable, biomasse…) est une option complémentaire, économiquement intéressante mais probablement limitée à la gestion des pointes
de consommation d’hiver.
Les consommateurs (ménages, entreprises, collectivités) sont incités à maîtriser leurs consommations d’électricité : les quantités consommées mais aussi désormais le moment où
interviennent les appels de puissance.
La recharge des véhicules électriques et le pilotage fin du chauffage de locaux bien isolés ouvrent de grandes possibilités de flexibilité.
Pour les ménages intéressés, cela pourrait reposer sur l’utilisation des données issues de leurs compteurs Linky et sur la programmation de ces usages en fonction de tarifs « dynamiques », tenant compte de l’état du réseau mais simples à appréhender et protecteurs pour le consommateur.
Ceci suppose de faire évoluer la doctrine des autorités publiques et les textes en vigueur, après concertation avec les associations de consommateurs et les fournisseurs.
Une grande flexibilité de la demande d’électricité des consommateurs permettra de minimiser le recours au stockage, de pallier partiellement la variabilité de la production des énergies éolienne et solaire et ainsi de limiter la volatilité des prix. En consommant au moment où l’électricité est peu chère et décarbonée, on limite les coûts du système électrique, avec un intérêt collectif, économique et environnemental. La répartition de la valeur ainsi apportée par la flexibilité au système devra être régulée sous le contrôle de la CRE, en protégeant les consommateurs.
En parallèle, on peut réduire les coûts et les délais de développement des projets d’énergies
renouvelables et améliorer leur planification en simplifiant les outils de mise à disposition des
données sur le réseau électrique et l’environnement, au profit des industriels et des collectivités territoriales responsables de la planification locale (notamment pour définir les zones d’accélération des énergies renouvelables).
Trois priorités sont donc essentielles pour l’avenir
- 1. Considérer la montée en puissance quantitative et qualitative du système de gestion du réseau et des outils et plateformes de données électriques comme un véritable investissement d’intérêt général et veiller à leur utilisation optimale.
- 2. Encourager les fournisseurs d’énergie à proposer à leurs clients des « tarifs dynamiques » adaptés à leurs données de consommation, accompagnés de moyens techniques de programmation et d’une assistance pour qu’ils puissent en tirer le meilleur parti. Avec un encadrement ad hoc fixé par la CRE en liaison avec le Médiateur de l’énergie, et des moyens humains affectés pour en vérifier activement le respect
- 3. Mobiliser les moyens de communication, notamment publics (ADEME, ANAH, CRE, RTE, ENEDIS, etc.) pour sensibiliser les consommateurs aux besoins de flexibilité du système électrique, aux solutions techniques et contractuelles disponibles et aux garanties associées en matière de protection des données et d’équilibre des contrats.
- Voir la note de La Fabrique Ecologique : « Les bioénergies : quelle place dans la transition énergétique ? » – décembre 2023 ↩︎
- PPE : programmation pluriannuelle de l’énergie ↩︎
- SNBC : stratégie nationale bas carbone ↩︎