Dès la fin du confinement, les Français se sont rués sur les débits de tabac frontaliers pour y profiter de prix moins élevés. Des images ahurissantes qui interrogent sur le nombre réel de fumeurs en France – contrebande et vente transfrontalière comprises.
Après plusieurs mois de confinement et alors que les consignes de distanciation sociale et de limitation des déplacements restent en vigueur pour éviter une deuxième vague, les images de foule se précipitant dès le 11 mai aux frontières pour s’approvisionner en cigarettes ne laissent pas de surprendre. Celles-ci révèlent en creux les limites des politiques de santé publique de réduction du tabagisme fondées sur la seule augmentation des prix. Et ce alors que la cigarette provoque plus de 70 000 décès chaque année.
Malgré l’augmentation du prix du paquet de cigarette à 10 euros, la vente transfrontalière constitue en effet (en temps normal) un moyen commode de contourner ces mesures. Le confinement a ainsi permis d’analyser pour la première fois ce phénomène à taille réelle. Selon la Confédération des buralistes, les ventes de cigarettes ont augmenté de 30 à 40% dans certaines zones frontalières au cours de la période de confinement. « La fermeture des frontières et le non-déplacement de nos concitoyens a provoqué un sursaut d’activité dans le Nord, l’Est, les Pyrénées-Atlantiques et orientales », a indiqué le président de la fédération Philippe Coy.
Un problème de santé… et de finances publiques
Ce phénomène ne représente pas qu’un problème de santé public, mais également un problème pour les finances publiques. Si l’impact de ces achats transfrontaliers n’est pas quantifiable à l’échelle nationale, le manque à gagner pour l’Etat est incontestablement important. Chaque paquet de cigarettes acheté en Espagne, en Italie, en Belgique ou en Allemagne signifie des taxes perdues pour la France. Et nos voisins l’ont bien compris puisqu’ils calquent leurs politiques de prix sur la nôtre, avec toujours quelques euros de retards, afin de récupérer un maximum de clientèle hexagonale. Pendant ce temps, les achats transfrontaliers et l’explosion de contrebande rendent illusoires les chiffres sur lesquels s’appuient le gouvernement pour claironner ses succès. Les baisses de vente en France sont évidemment loin d’être seulement liées à des arrêts spontanés de la part des fumeurs. Un constat qui devrait inciter les pouvoirs politiques à se tourner vers une plus grande intégration des alternatives pour aider les fumeurs à quitter la cigarette classique (cigarette électronique, snus, tabac à chauffer…), et ce une bonne fois pour toute.